Réduction du gaspillage ou facturation abusive ? Les infirmiers libéraux pris au piège des contrôles de la CPAM
Les contrôles administratifs de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) font l’objet de critiques croissantes de la part des infirmiers libéraux (IDEL), accusant l’organisme d'agir de manière contradictoire et répressive. L’avocat Kamar-Eric Hadi a récemment exposé sur LinkedIn une affaire révélatrice de ces pratiques, où des IDEL sont sommés de rembourser des milliers d’euros pour des actes jugés fictifs, simplement parce que l'utilisation de leurs stocks personnels de pansements n'est pas reconnue par la CPAM.
Une gestion des stocks de pansement ignorée par la CPAM ?
Pour de nombreux IDEL, l'utilisation de stocks de pansements personnels issus de précédente prescription est une pratique courante et réfléchie, motivée par la volonté de limiter le gaspillage, d'assurer la continuité des soins sans dépendre des stocks des pharmacies mais aussi de réduire les dépenses pour l'Assurance Maladie.
Or cette pratique peut être interprétée par la CPAM comme une irrégularité qui mérite d'être sanctionnée. Selon l'avocat Kamar-Eric Hadi, un cabinet infirmier s’est vu réclamer un remboursement pour 1 696 pansements sur une période de quatre ans, sous prétexte qu'il n’existait aucune trace de délivrance en pharmacie. La CPAM considère que ces actes n’auraient pas dû être remboursés, incluant même les frais de déplacements et les majorations MCI associés. Les deux infirmières libérales se sont vu réclamer plus de 30 000 euros.
Des procédures ubuesques et peu fondées
L'avocat qui défend plusieurs IDEL dans ce type de litige, souligne que juridiquement, les fondements des indus reposant sur l’absence de délivrance en pharmacie sont largement contestables. Il rappelle que les tribunaux disposent des outils nécessaires pour rétablir le bon sens et protéger les professionnels injustement sanctionnés.
"Juridiquement, un indu fondé sur ce seul argument ne tient pas...Comment la CPAM peut-elle alors garder son sérieux en prétendant lutter contre le gaspillage tout en sanctionnant les professionnels de santé qui agissent réellement tout en lui faisant économiser de l'argent ? " Me HADI.
Cette rigidité administrative, loin de favoriser une approche raisonnée et adaptée, pèse lourdement sur les professionnels de santé. Elle traduit une logique punitive où la suspicion prime sur la reconnaissance de l’engagement des IDEL à optimiser l’utilisation des ressources. La CPAM, censée encourager la réduction des dépenses, semble ici jouer contre l’intérêt collectif en sanctionnant ceux qui, par précaution et responsabilité, utilisent des stocks personnels.
Une rigidité dénoncée par les IDEL
Face à cette situation, de nombreux IDEL appellent à une réforme des méthodes de contrôle de la CPAM. Ils demandent que les évaluations tiennent compte des réalités du terrain et des pratiques de bon sens qui contribuent à la réduction des coûts et à la lutte contre le gaspillage. Certains, comme Céline, insistent sur le fait que l’utilisation des stocks personnels est une mesure de gestion courante pour pallier les insuffisances des délivrances en pharmacie.
"Effectivement on utilise très régulièrement des stocks de pansements que l on a au cabinet lorsque cela est possible. Avant de refaire une ordonnance par ex car le protocole a changé, une prolongation ou simplement car la pharmacie n en a pas délivré assez!
On lutte contre le gaspillage a fond et cela nous ai préjudiciable au yeux de la secu qui estime que les soins ne sont pas fait! C’est hallucinant !"
"Abérant et j'ai aussi eu des indus sur ce grief.
Une patiente m'a fourni le reste de sets restants de sa dernière plaie et bien sûr, la CPAM n'a pas de trace de passage à la pharmacie... Pareil concernant un patient dont le prestataire de santé fournissait le matériel... Pas de trace en pharmacie..." confirme Laurence.
"Qu'ils sont nuls. Ils n'ont toujours pas compris. J'ai dû jeter un stock incroyable de médicaments, de pansements, de perfusions. La CPAM est aveugle. Elle préfère que l'on jette plutôt que de permettre que cela serve à d'autres patients." Fréderic
Un harcèlement moral institutionnalisé ?
En avril 2023, le syndicat Convergence Infirmière dénonçait déjà une campagne ciblée et oppressante menée par l'État contre les infirmiers libéraux, caractérisée par des contrôles rigides et des sanctions financières systématiques. Le syndicat critique le cadre législatif et administratif, notamment l’article 102 de la loi de financement de la Sécurité sociale, qui permet de fixer des indus forfaitaires par extrapolation. Il pointe également la complexité excessive de la nomenclature des actes et l’absence de soutien tangible de l'État, qui favorise les structures de soins au détriment des IDEL.
Le syndicat accusait alors l'État de provoquer une pression mentale insoutenable, conduisant au burn-out des professionnels, tout en dégradant leur situation économique avec des honoraires figés depuis plus de dix ans et une perte de pouvoir d’achat dépassant 20 %.
Descripteur MESH : Infirmiers , Maladie , Pharmacie , Soins , Santé , Lutte , Logique , Sécurité , Continuité des soins , Assurance maladie , Assurance , Sécurité sociale , Patients , Pression , Moral , Harcèlement , Méthodes , Argent