Hospitalisations pour automutilations et tentatives de suicide en forte hausse chez les adolescentes

Hospitalisations pour automutilations et tentatives de suicide en forte hausse chez les adolescentes Une nouvelle étude de la DREES et de Santé Publique France met en évidence une recrudescence inquiétante des hospitalisations pour tentatives de suicide et automutilations non suicidaires chez les jeunes femmes de 10 à 24 ans. Les chiffres, en constante augmentation depuis 2015, soulignent la nécessité de renforcer les mesures de prévention et de soutien psychologique.

Une étude approfondie de la DREES et de Santé Publique France

La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), en collaboration avec Santé Publique France, a publié une nouvelle étude concernant les hospitalisations dues à des gestes auto-infligés, incluant tentatives de suicide et automutilations non suicidaires (scarifications, brûlures, coups, etc.).

Basée sur les données du système national de données de santé (SNDS), l’étude analyse l’évolution des taux d’hospitalisation par âge et sexe entre 2007 et 2022, dans les services de médecine et chirurgie (MCO) ainsi que ceux de psychiatrie. Elle détaille également les caractéristiques principales de ces hospitalisations en 2022, selon le type de geste, les régions ou les groupes démographiques concernés.

Progression marquée chez les jeunes patientes

L’étude révèle une augmentation préoccupante des hospitalisations pour gestes auto-infligés chez les jeunes femmes âgées de 10 à 24 ans, avec un pic autour de l’âge de 15 ans. Une hausse initiale graduelle entre 2015 et 2019, interrompue en 2020, a été suivie d'une recrudescence significative en 2021, dépassant les tendances antérieures.

En 2022, les taux se stabilisent chez les 10-14 ans par rapport à 2021, tandis qu’ils continuent d’augmenter chez les 15-24 ans, atteignant des niveaux sans précédent. En comparaison avec la période 2010-2019, les hospitalisations en MCO ont progressé de 71 % pour les filles de 10-14 ans, de 44 % pour les 15-19 ans et de 21 % pour les 20-24 ans. En psychiatrie, les augmentations sont encore plus marquées : 246 % pour les 10-14 ans, 163 % pour les 15-19 ans et 106 % pour les 20-24 ans. Le taux d’hospitalisations pour gestes auto-infligés chez les patientes de 10 à 19 ans a doublé entre 2012 et 2020, puis encore une fois entre 2020 et 2022.

Disparités territoriales et socio-économiques

Cette augmentation généralisée est observée sur tout le territoire, bien que certaines régions comme l’Occitanie soient particulièrement touchées. La hausse concerne tant les zones urbaines que rurales, qu'elles soient favorisées ou défavorisées. Cependant, l’augmentation est plus notable chez les patientes des communes les plus favorisées, même si ces dernières restent moins nombreuses que celles des zones les plus défavorisées.

Les intoxications médicamenteuses volontaires sont la cause principale des hospitalisations pour gestes auto-infligés chez les adolescentes et les jeunes femmes, représentant les deux tiers des cas, suivies par les lésions avec objets tranchants et les gestes plus violents (pendaisons, sauts d’une hauteur, etc.). En 2022, 10 % des patientes de 10 à 24 ans ont été admises en unité de soins intensifs, indiquant que les gestes les plus graves augmentent proportionnellement.

Facteurs de risque

Les facteurs de risque associés aux gestes auto-infligés et aux tentatives de suicide chez les adolescentes et les jeunes femmes sont variés et incluent des éléments individuels, familiaux, sociaux et environnementaux :

  • Troubles mentaux : La présence de troubles dépressifs, d’anxiété, de troubles du comportement alimentaire, et de troubles de la personnalité est souvent liée à un risque accru de gestes auto-infligés.
  • Expériences traumatiques : Les antécédents d’abus physiques, sexuels ou émotionnels augmentent significativement le risque. Le harcèlement scolaire, les conflits familiaux et les ruptures relationnelles peuvent également jouer un rôle important.
  • Isolement social : Le manque de soutien social, les relations familiales dysfonctionnelles et la solitude sont des facteurs contributifs. Les jeunes femmes qui se sentent isolées sont plus susceptibles de recourir à l'automutilation.
  • Facteurs socio-économiques : La précarité économique, le faible niveau d'éducation, et les conditions de vie défavorisées peuvent exacerber le stress et les difficultés émotionnelles, augmentant ainsi le risque de comportements auto-destructeurs.
  • Influences culturelles et médiatiques : L’exposition à des contenus médiatiques glorifiant ou normalisant l'automutilation et le suicide, ainsi que la pression des réseaux sociaux, peut influencer négativement les comportements des jeunes.

Comparaison avec les autres groupes démographiques

À l’inverse des tendances observées chez les jeunes femmes, les hospitalisations pour gestes auto-infligés diminuent chez les adultes de plus de trente ans, hommes et femmes confondus, depuis 2010. Chez les garçons et jeunes hommes de 10 à 24 ans, les hospitalisations pour gestes auto-infligés restent stables et peu nombreuses. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène : d'une part, la santé mentale des garçons semble moins affectée que celle des filles, avec une hausse plus marquée des syndromes dépressifs chez les jeunes femmes entre 2014 et 2021. D'autre part, les hommes expriment leur détresse psychologique par des comportements extériorisés (addictions, comportements violents), tandis que les femmes montrent des formes intériorisées (dépressions, angoisses).

Les enquêtes de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) montrent une baisse des consommations de toxiques chez les jeunes des deux sexes, mais une dégradation des indicateurs de santé mentale chez les jeunes filles.

En 2022, près de 85 000 personnes ont été hospitalisées pour un geste auto-infligé, dont 64 % de femmes. La moitié de ces hospitalisations a eu lieu en psychiatrie. Les disparités régionales sont marquées, avec des taux variant de 35 pour 100 000 habitants en Guadeloupe à 260 dans la Somme, dépassant largement la moyenne nationale de 113 pour 100 000 habitants.

 

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