La Latrypanosomiase africaine ou maladie du sommeil

illustration

La trypanosomiase africaine, également connue sous le nom de maladie du sommeil, est une maladie parasitaire qui continue d'affecter les populations rurales d'Afrique subsaharienne. Grâce aux progrès récents, notamment avec l'introduction du fexinidazole et les essais prometteurs de l'acoziborole, la lutte contre cette maladie mortelle se rapproche de son objectif d'élimination. Cependant, des défis majeurs subsistent, tels que l'accès aux soins dans les zones reculées et la persistance des réservoirs animaux.

Définition et formes de la maladie  du sommeil

La trypanosomiase humaine africaine, communément appelée maladie du sommeil, est une infection parasitaire transmise par la piqûre de mouches tsé-tsé infectées. Elle est causée par des protozoaires du genre Trypanosoma et affecte principalement les populations rurales de l'Afrique subsaharienne.

On distingue deux formes principales de la maladie, selon le parasite en cause :

  • Forme gambiense : responsable de plus de 95 % des cas, elle est provoquée par Trypanosoma brucei gambiense et sévit en Afrique de l'Ouest et centrale. Cette forme évolue de manière chronique, sur plusieurs années.
  • Forme rhodesiense : moins fréquente, elle est due à Trypanosoma brucei rhodesiense, présente en Afrique de l'Est et du Sud-Est. Cette forme est plus virulente et progresse rapidement, en quelques mois seulement.

Les efforts internationaux pour contrôler la maladie ont permis une réduction significative du nombre de cas. En 2021, seulement 747 nouveaux cas de la forme gambiense ont été signalés, principalement en République démocratique du Congo, tandis que 55 cas de la forme rhodesiense ont été rapportés, en majorité au Malawi.

Cycle parasitaire et transmission de la maladie du sommeil

La transmission des trypanosomes à l'homme se fait par la piqûre de mouches tsé-tsé infectées, du genre Glossina. Une fois dans l'organisme, les parasites se multiplient dans le sang et la lymphe, puis envahissent progressivement le système nerveux central, causant des symptômes plus graves au fil du temps.

Le réservoir principal de Trypanosoma brucei gambiense est l'homme, alors que Trypanosoma brucei rhodesiense infecte principalement les animaux sauvages et domestiques, l'homme étant considéré comme un hôte accidentel.

Symptômes et évolution clinique de la maladie du sommeil

La trypanosomiase évolue en deux phases :

  • Phase lymphatico-sanguine : elle se manifeste par des symptômes généraux tels que fièvre, céphalées, douleurs articulaires et adénopathies. Un chancre peut apparaître au point de piqûre de la mouche.
  • Phase méningo-encéphalitique : si la maladie n'est pas traitée, elle progresse vers des troubles du sommeil, des troubles neurologiques et psychiatriques, pouvant entraîner le coma puis la mort.

La forme gambiense évolue lentement, parfois sur plusieurs années, tandis que la forme rhodesiense peut causer des symptômes sévères en l'espace de quelques mois.

Diagnostic et traitement de la maladie du sommeil

Le diagnostic repose principalement sur la détection des trypanosomes dans le sang, la lymphe ou le liquide céphalo-rachidien par examen microscopique. Des tests sérologiques sont également disponibles pour le dépistage, notamment dans les zones à haut risque.

Le traitement dépend de l'espèce de trypanosome en cause et du stade de la maladie :

  • En phase précoce : la pentamidine est utilisée pour la forme gambiense et la suramine pour la forme rhodesiense.
  • En phase avancée : le fexinidazole, un traitement oral approuvé récemment, est devenu le traitement de première intention pour les cas non sévères de forme gambiense. Dans les cas plus graves, l'éflornithine, seule ou associée au nifurtimox, est utilisée. La forme rhodesiense est traitée avec le mélarsoprol.

Les nouveaux traitements contre la maladie du sommeil

  1. Fexinidazole : un traitement oral prometteur Le fexinidazole représente un progrès significatif dans le traitement de la trypanosomiase humaine africaine, notamment pour la forme Trypanosoma brucei gambiense (THA gambiense). Ce médicament, administré par voie orale, a été approuvé pour traiter les deux phases de la maladie, ce qui constitue une avancée majeure par rapport aux traitements précédents. Avant l'introduction du fexinidazole, les patients devaient être hospitalisés pour des traitements plus invasifs, souvent par perfusion, comme l’éflornithine, ce qui rendait la prise en charge logistique plus compliquée.

    • Avantages : Le fexinidazole permet une prise en charge plus simple, car il ne nécessite pas d'hospitalisation ni de perfusions intraveineuses. De plus, sa facilité d’administration, par comprimés, est un atout majeur pour les zones rurales d'Afrique où l’accès aux infrastructures de santé est limité.
    • Limites : Malgré ses avantages, le fexinidazole présente des restrictions. Il n'est efficace que pour les cas non sévères de THA gambiense, en particulier pour les patients ayant moins de 100 cellules dans leur liquide céphalo-rachidien (LCR). Par ailleurs, il doit être pris avec des repas équilibrés pour garantir une absorption optimale, ce qui peut être un défi dans les zones touchées par l’insécurité alimentaire. Enfin, il ne peut pas être utilisé chez les enfants de moins de six ans, limitant son usage dans certaines populations vulnérables.
  2. Acoziborole : un traitement à prise unique révolutionnaire

    L'Acoziborole est un médicament actuellement en phase d’essai clinique qui pourrait représenter une véritable révolution dans le traitement de la trypanosomiase africaine. Il s'agit d'un traitement par voie orale, mais avec une prise unique, ce qui en fait un traitement potentiellement décisif, particulièrement pour les zones isolées.

    • Mode d'action : L’acoziborole cible à la fois les phases précoces et tardives de la trypanosomiase, ce qui en fait une option tout-en-un pour les patients atteints. Contrairement aux traitements actuels, il n’est pas nécessaire d’administrer plusieurs doses ou de surveiller le patient en milieu hospitalier pendant plusieurs jours.
    • Avantages : Ce traitement pourrait simplifier grandement la prise en charge des patients. En plus de sa prise unique, il est bien toléré et ne semble pas présenter d'effets secondaires graves selon les premiers essais cliniques. Cela le rendrait accessible aux populations les plus démunies, souvent éloignées des centres de santé. De plus, l'acoziborole pourrait être utilisé pour traiter non seulement les malades confirmés, mais également les personnes à risque, comme les individus séropositifs non confirmés.
    • Impact potentiel : Si les essais cliniques confirment son efficacité et son innocuité, l'acoziborole pourrait être utilisé à grande échelle, non seulement pour traiter les patients, mais aussi pour interrompre la transmission dans les communautés à risque, contribuant ainsi à l’élimination de la maladie.
  3. Implications pour l'élimination de la trypanosomiase L’introduction de ces nouveaux traitements, et en particulier de l'acoziborole, pourrait jouer un rôle clé dans la réalisation des objectifs d'élimination de la trypanosomiase africaine fixés par l’OMS pour 2030. En facilitant le traitement des patients, même dans des zones éloignées ou en situation d’urgence sanitaire, ces médicaments réduisent le besoin d’infrastructures médicales complexes. Cependant, pour que ces traitements soient pleinement efficaces, il est essentiel d'assurer un accès universel aux diagnostics, aux médicaments, et de maintenir les efforts de lutte antivectorielle.

Épidémiologie de la trypanosomiase africaine

La trypanosomiase humaine africaine est une maladie endémique dans 36 pays d'Afrique subsaharienne, où environ 65 millions de personnes vivent dans des zones à risque. La répartition géographique de la maladie varie selon les deux formes : la forme gambiense est concentrée en Afrique de l’Ouest et centrale, notamment en République démocratique du Congo, Angola, Soudan du Sud et République centrafricaine. La forme rhodesiense, beaucoup plus rare, est limitée aux régions d'Afrique de l'Est et du Sud-Est, principalement au Malawi, en Zambie et en Ouganda.

Historiquement, la maladie a causé des épidémies dévastatrices, notamment au début du XXe siècle. Toutefois, les campagnes intensives de dépistage et de traitement mises en œuvre depuis les années 1990 ont conduit à une réduction drastique du nombre de cas, passant de plus de 37 000 cas signalés en 1998 à moins de 1 000 cas par an depuis 2019. Les efforts de surveillance et de contrôle dans les régions touchées restent cruciaux pour prévenir une résurgence, d’autant que la majorité des nouvelles infections surviennent dans des zones rurales isolées, difficiles d'accès pour les équipes de santé.

Prévention et perspectives

La lutte contre la maladie repose sur plusieurs stratégies complémentaires : le dépistage actif et le traitement des cas, la lutte antivectorielle (utilisation de pièges et d’écrans imprégnés d'insecticides), la surveillance épidémiologique et l'éducation des populations exposées.

Ces mesures ont permis à plusieurs pays de parvenir à l'élimination de la trypanosomiase en tant que problème de santé publique. Le Tchad, par exemple, a atteint cet objectif en 2024, devenant le septième pays à le faire pour la forme gambiense.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fixé l'objectif ambitieux d'éliminer la transmission de la maladie d'ici 2030. Cependant, des défis subsistent, notamment l'accès limité aux zones reculées, la nécessité de maintenir des efforts de surveillance et le risque de réémergence dans certaines régions.


Pour en savoir plus 

1. Site de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur la trypanosomiase humaine africaine :
https://www.who.int/fr/health-topics/human-african-trypanosomiasis

2. Fiche d'information détaillée de l'OMS sur la maladie :
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/trypanosomiasis-human-african-(sleeping-sickness)

3. Page de l'Institut Pasteur sur la maladie du sommeil :
https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/maladie-du-sommeil-trypanosomiase-humaine-africaine

4. Informations de Médecins Sans Frontières sur la trypanosomiase :
https://www.msf.fr/eclairages/maladie-du-sommeil

5. Page du CDC (Centers for Disease Control and Prevention) sur la maladie (en anglais) :

https://www.cdc.gov/sleeping-sickness/about/index.html

6. Informations de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) sur la lutte contre la trypanosomiase :
https://www.fao.org/paat/fr/

 

7.Vers l’élimination de la maladie du sommeil (IRD)

Ces ressources offrent des informations complémentaires sur l'épidémiologie, la transmission, le diagnostic, le traitement et les efforts de lutte contre la maladie du sommeil, provenant d'organisations reconnues dans le domaine de la santé publique et de la recherche.

Descripteur MESH : Maladie , Trypanosomiase , Mélarsoprol , Eflornithine , Sommeil , Trypanosomiase africaine , Épidémiologie , Diagnostic , Biologie , Bibliographie , Afrique , Sang , Infection , Santé , Suramine , Personnes , Système nerveux , Pentamidine , Parasites , Organisation mondiale de la santé , Mort , Maladies transmissibles , Médecine , Lutte , Repos , Afrique centrale , Antiprotozoaires , Trypanosoma , Tête , Cerveau , Système lymphatique , Coeur , Suisse , Coma , Soins , Comportement , Conscience , Réunion , Région des Grands Lacs , Recherche , Ponctions , Eau , Encéphalite , Paris , Fièvre , Ganglions , Glandes salivaires , Hommes , Injections , Lacs

PUBLICITE