Méningite à méningocoques : la nouvelle vague Post-Pandémie
La recrudescence des cas de méningite à méningocoques à la suite de la levée des restrictions liées au Covid-19 inquiète les professionnels de santé. Une étude de l'Institut Pasteur révèle une hausse significative des infections, particulièrement chez les jeunes adultes.
L'Institut Pasteur, grâce à son Centre national de référence des méningocoques, a étudié l'évolution des cas de méningite à méningocoques entre 2015 et 2022. L'arrêt des mesures sanitaires liées au Covid-19 a marqué un tournant, révélant un rebond inattendu de la maladie. La plupart des cas récents sont associés à des souches de méningocoques moins fréquentes avant la pandémie et affectent maintenant davantage les jeunes adultes entre 16 et 24 ans. Ces observations, publiées dans le "Journal of Infection and Public Health" en octobre 2023, ont des implications significatives pour la stratégie vaccinale contre cette affection potentiellement mortelle.
La diminution des gestes barrières et ses conséquences
Les mesures de précaution comme le port du masque et la distanciation physique, adoptées durant la pandémie de Covid-19, ont eu un impact positif sur la réduction des infections respiratoires, y compris la méningite à méningocoques. Cependant, avec l'assouplissement de ces mesures, les cas de méningite ont rapidement augmenté. En 2020 et 2021, une chute de plus de 75 % des contaminations avait été observée. Or, dès l'automne 2022, un rebond sans précédent de la maladie a été constaté. À l'automne 2023, le nombre de cas dépassait ceux enregistrés avant la pandémie. Entre janvier et septembre 2019, 298 cas avaient été recensés, contre 421 pour la même période en 2023, soit une hausse de 36 %, et ce, avant même le pic hivernal de cette année.
Changement dans les souches de méningocoques et impact sur les jeunes
Une mutation notable s'est produite dans la typologie des souches de méningocoques. Les groupes W et Y sont devenus plus prédominants après la pandémie. Les chercheurs de l'Institut Pasteur ont noté que toutes les catégories d'âge sont touchées, mais les jeunes de 16 à 24 ans sont désormais particulièrement vulnérables. Cette évolution suggère que les souches de méningocoques responsables des infections actuelles diffèrent de celles qui prévalaient avant la pandémie. Il semble que l'épidémie de Covid-19 ait servi de catalyseur pour une réinitialisation du système, engendrant un paysage épidémiologique modifié
Cette recrudescence de la méningite à méningocoques pourrait s'intensifier avec l'arrivée de la grippe saisonnière. Le virus grippal crée en effet un environnement propice à la prolifération des bactéries méningocoques. De plus, les grands rassemblements favorisent les contaminations, accélérant ainsi la propagation de cette maladie.
Vers une stratégie vaccinale évolutive
En France, la vaccination contre le méningocoque de groupe C est obligatoire, tandis que celle contre le groupe B est recommandée pour les nourrissons. Cependant, il n'existe pas encore de directive générale concernant les souches Y et W. Les chercheurs travaillent en collaboration avec la Haute autorité de santé pour adapter la stratégie vaccinale. Ala-Eddine Deghmane suggère l'emploi du vaccin tétravalent (A, C, Y, W) chez les adolescents, principaux porteurs sains, pour protéger à la fois cette tranche d'âge et indirectement le reste de la population. Muhamed-Kheir Taha met en exergue l'importance de la prévention vaccinale, soulignant que les méningites bactériennes non traitées sont presque toujours mortelles, avec une mortalité persistante de 10 % même avec un traitement approprié.
« Si le vaccin tétravalent ciblant les méningocoques de groupes A, C, Y et W était recommandé auprès des adolescents, cela permettrait de les protéger directement mais aussi de protéger indirectement les autres catégories de la population. … Et il ne faut pas oublier que sans traitement, les méningites bactériennes sont quasiment mortelles à 100 % et même correctement traitées, la mortalité reste de 10%. Cela souligne l’importance de la prévention vaccinale. », Muhamed-Kheir Taha.
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