Carrière des femmes médecins : le temps partiel n’est pas la solution
La féminisation de la profession médicale est un enjeu sanitaire et économique majeur. Il faut des mesures fortes pour lutter contre la discrimination des femmes médecins.
Le 8 mars dernier, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, Olivier Véran et Frédérique Vidal ont annoncé que désormais, les personnels hospitalo-universitaires pourront exercer à temps partiel pour la naissance d’un enfant ou son arrivée au foyer lors de son adoption, ou même, pour convenance personnelle.
Le ministre des Solidarités et de la Santé et la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation se disent conscients des attentes de la communauté médicale, en particulier celles des femmes médecins qui représentent aujourd’hui la moitié des effectifs et la majeure partie des médecins de demain alors qu’elles ne sont que 22 % de professeures des universités-praticiens hospitaliers en 2020.
La discrimination des femmes se pratique dès le début des études de médecine et les empêche donc d’accéder aux postes à responsabilités et universitaires. Nous attendons des mesures concrètes pour marquer une rupture avec cette situation injuste et indécente pour les carrières féminines. Nous avons fait, avec le syndicat Jeunes Médecins, des propositions afin de favoriser l’égalité des chances entre les hommes et les femmes au travail et dans les carrières médicales. Notamment, remplacer systématiquement les femmes en congés maternité, celles-ci étant le plus souvent accablées et discriminées à l’occasion de leur grossesse. Nous avons aussi proposé de rendre le congé paternité obligatoire et de le prolonger à hauteur du congé maternité.
C’est uniquement de cette manière, Madame et Monsieur le Ministre, qu’il sera possible de « susciter des vocations chez de nouveaux talents ».
D’après une enquête intersyndicale de 2019 concernant plus de 3000 médecins hospitaliers, 22 % des femmes étaient à temps partiel contre 6 % des hommes. Le temps partiel est justement une des causes d’inégalité salariale entre les femmes et les hommes, les femmes étant plus souvent à temps partiel pour assurer la charge domestique qui pèse toujours plus sur leurs épaules. Nous savons aussi que la charge de travail dans les services hospitaliers, avec la tension créée par le manque d’effectifs, ne permet pas de travailler à temps partiel et qu’en pratique, ce statut légitime simplement le fait de payer moins un personnel qui travaille plus.
Nous attendons toujours à ce jour une réponse du ministre des Solidarités et de la Santé et de la ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances. En effet, nous leur avons adressé un courrier en date du 7 octobre 2020, les interpelant au sujet des discriminations faites aux femmes médecins suite à notre tribune parue dans le journal Le Monde le 26 septembre 2020 et signée par plus de 300 médecins.
Nous attendons toujours un second entretien avec le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, suite au premier qui a eu lieu le 15 décembre 2020, où nous avons discuté de sanctions contre les services qui seraient discriminants envers les femmes et de parité représentative lors des nominations des personnels universitaires.
Favoriser l’égalité des chances pour l’accession à une carrière hospitalière : oui, mais creuser le fossé entre le peu de femmes hospitalo-universitaires et les hommes en favorisant le temps partiel : NON.
Docteur Anna BOCTOR
Première vice-présidente Jeunes Médecins en charge de l’égalité homme-femme
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