Identification de deux gènes voisins prédisposant à la lèpre
Une nouvelle étape vient d'être franchie dans la voie de l'éradication de la lèpre, l'une des maladies les plus anciennes et les plus craintes au monde. Une équipe de recherche internationale sous la direction de chercheurs de l'unité Inserm 550 " Génétique humaine des maladies infectieuses " et de l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill, a découvert que de petits changements dans deux gènes, le gène Parkin et le gène voisin, PACRG, multiplient par cinq le risque de développer la maladie. De façon intrigante, des mutations dans le gène Parkin avaient été précédemment identifiées comme responsable de certaines formes de la maladie de Parkinson, maladie neurodégénérative fréquente dans les pays développés. Ces résultats sont accessibles en ligne depuis le 25 janvier sur le site web de la revue scientifique Nature.
Paris, le 26 janvier 2004
Une nouvelle étape vient d'être franchie dans la voie de l'éradication de la lèpre, l'une des maladies les plus anciennes et les plus craintes au monde. Une équipe de recherche internationale sous la direction de chercheurs de l'unité Inserm 550 " Génétique humaine des maladies infectieuses " et de l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill, a découvert que de petits changements dans deux gènes, le gène Parkin et le gène voisin, PACRG, multiplient par cinq le risque de développer la maladie. De façon intrigante, des mutations dans le gène Parkin avaient été précédemment identifiées comme responsable de certaines formes de la maladie de Parkinson, maladie neurodégénérative fréquente dans les pays développés. Ces résultats sont accessibles en ligne depuis le 25 janvier sur le site web de la revue scientifique Nature.
La lèpre, causée par le bacille Mycobacterium leprae, est une maladie infectieuse chronique dont, pour parodier Mark Twain, 'les rumeurs sur sa disparition ont été grandement exagérées' puisqu'elle touche encore plus d'un million de personnes dans le monde. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, 91 pays ont été identifiés où la proportion d'individus infectés par la lèpre reste élevée malgré une couverture thérapeutique satisfaisante. Cliniquement, la lèpre associe des lésions cutanées et de sévères atteintes nerveuses. En l'absence de traitement, elle peut conduire à des mutilations graves, notamment la perte de doigts, d'orteils, de pieds et de mains. De fait, parmi les maladies transmissibles, la lèpre est la principale cause d'incapacités physiques permanentes.
Chez l'homme, l'existence d'une composante génétique dans la réponse à l'infection est actuellement admise sur la base d'observations épidémiologiques et d'études familiales. Une étude pour identifier les gènes en cause est menée depuis plusieurs années par des chercheurs et des médecins du Vietnam, du Brésil, des Pays-Bas, de la France et du Canada. L'an dernier, un premier cap avait été franchi avec la localisation, par cette équipe, d'un gène de prédisposition à la maladie sur le chromosome 6.
Un composant génétique majeur dans la prédisposition à la lèpre
Le travail mené par Alexandre Alcaïs au sein de l'équipe Inserm coordonnée par Laurent Abel (Inserm/Université René Descartes Unité 550 dirigée par Jean-Laurent Casanova à la faculté de Médecine Necker) a finalement permis d'identifier les gènes en question. Pour arriver à leurs conclusions, Alexandre Alcaïs et Laurent Abel ainsi que leurs collègues ont analysé des échantillons d'ADN d'environ 200 familles vietnamiennes atteintes par la lèpre à l'aide d'outils technologiques de toute dernière génération. Ils ont établi que la présence de certaines formes des gènes Parkin et du gène voisin PACRG étaient associées à un risque cinq fois plus élevé de développer la maladie. Ces résultats ont été confirmés dans un échantillon de près de 1000 individus au Brésil, ce qui montre l'importance de ces découvertes dans un objectif de lutte mondialisée contre la lèpre.
Au total, cette étude a identifié un composant génétique majeur de prédisposition à la lèpre qui met en évidence une voie de réponse au bacille de la lèpre totalement nouvelle impliquant la façon dont les cellules se débarrassent des protéines superflues. Il s'agit exactement des mêmes mécanismes que ceux impliqués dans la pathogénèse des formes de maladie de Parkinson causées par des mutations du gène Parkin.
Cette découverte soulève ainsi l'hypothèse séduisante que des anomalies dans la façon dont les cellules gèrent le matériel superflu pourraient être à l'origine de pathologies assez communes et très différentes dans leur présentation comme des maladies infectieuses ou des maladies neurodégénératives.
Ces résultats ouvrent une perspective entièrement originale sur le processus physiopathologique de la lèpre et pourraient permettre de percer le secret de sa persistance dans de nombreuses parties du monde en dépit de l'utilisation de traitements médicamenteux efficaces. De plus, ils ouvrent la voie à l'éradication de la lèpre en permettant d'envisager de nouvelles thérapeutiques fondées sur la restauration d'une réponse immunitaire performante après infection par le bacille de la lèpre.
La recherche a été financée par des subventions du Réseau canadien de maladies génétiques (RCMG), des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), et d'organismes de soutien à la recherche de France et des Pays-Bas.
Pour en savoir plus
" Susceptibility to leprosy is associated with PARK2 and PACRG "
Marcelo T. Mira (1,2), Alexandre Alcaïs (3), Nguyen Van Thuc (4), Milton O Moraes (5), Celestino Di Flumeri (1), Vu Hong Thai (4), Mai Chi Phuong (4), Nguyen Thu Huong (4), Nguyen Ngoc Ba (4), Pham Xuan Khoa (4), Euzenir N. Sarno (5), Andrea Alter (1), Alexandre Montpetit (6), Maria E. Moraes (7), José R. Moraes (7), Carole Doré (6), Caroline J. Gallant (1), Pierre Lepage (6), Andrei Verner (6), Esther van de Vosse (8), Thomas J. Hudson (1,6), Laurent Abel (3) & Erwin Schurr (1).
1 = Mc Gill Centre for the Study of Host resistance and departments of Human Genetics, Medicine and Biochemistry, Mc Gill University, Montreal, Canada.
2 = Centro de ciencias Biologicas e da Saude, Pontificia Universidade Catolica do Parana, Parana, Brésil.
3 = Laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses, Inserm U550, Faculté de Médecine Necker, Université de Paris René Descartes, Paris.
4 = Hospital for Dermato-Venereology, Ho Chi Minh City, Vietnam.
5 = Leprosy Laboratory, Tropical Medicine Department Oswaldo Cruz Institute, Rio de Janeiro, Brésil
6 = McGill University and Genome Quebec Innovation Centre, Montréal, Canada.
7 = Laboratorio de Immunogénetica, Instituto Nacional do Cancer, Rio de Janeiro, Brésil.
8 = Department of Infectious diseases & Department of Immunohematology and Blood transfusion, Leiden, Pays-Bas.
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