STEMI : et dans la vraie vie ?
« Les Registres ou Observatoires nous apportent des informations essentielles qui vont au delà des résultats des essais cliniques randomisés où la population est par principe sélectionnée ».
En Bretagne, entre 2007 et 2015, le registre ORBI montre que le profil de la population a peu changé si ce n’est que l’hypercholestérolémie est moins fréquente et l’infarctus de plus ou plus souvent (86 %) inaugural. Les premiers appels au 15 sont en augmentation (55 %) et le généraliste est moins souvent impliqué dans la prise en charge.
Le taux de prise en charge pré-hospitalière par le SAMU est élevé (80 %) en cas de 1er appel mais 20 % des patients sont pris en charge initialement dans des centres sans plateau technique de cardiologie interventionnelle avec un délai ECG qualifiant – angioplastie primaire allongé. Huit patients sur 10 sont traités à la sortie par les inhibiteurs de P2Y12 ( aspirine) après angioplastie mais le stent actif demeure sous-utilisé.
Une étude menée en Bretagne auprès de 9 centres de cardiologie interventionnelle dans les conditions de la « vraie vie » (ORBI : Observatoire Régional Breton sur l’Infarctus du myocarde) a inclus au total 8 920 patients (STEMI admis dans les 24 heures suivant le début de la douleur, qu’il soit ou non passé par un autre centre) sur 3 périodes (9 ans : de 2007 à 2009 ; de 2010 à 2012 et de 2013 à 2015). L’âge moyen des patients – 63 ans – ne diffère pas selon les périodes, comparable aux données de Fast MI 2010 (63,3 ans) [11] et le pourcentage de femmes est de 24 % (27 % dans Fast MI).
Stable également, le pourcentage d’hypertendus (40 %), de diabétiques (10 %), de fumeurs actifs (40 %) : seul celui des patients présentant une hypercholestérolémie a diminué sur cette période de suivi de 9 ans, passant de 49 à 40 %. Parmi les antécédents cardiovasculaires, le pourcentage de patients coronariens connus a diminué de 21 à 13,7 % - les antécédents de pontage (1,2 %), d’angioplastie (9 %), d’AVC/AIT (3,6 %) ou d’AOMI (4,5 %) sont comparables sur les 3 périodes. Le 15 est désormais le principal destinataire du 1er appel téléphonique (de 43,6 %
à 54,9 % sur la 3ème période) alors que les appels vers le médecin généraliste ont diminué (de 19,1 % à 8,1 %), allant de pair avec une diminution de la prise charge par ces derniers. Les hommes appellent plus tôt que les femmes (médianes de 41 min versus 49 min en période 3), de même que les patients de moins de 50 ans (36 versus 45 min).
Pour mémoire, dans Fast MI 2010, le délai médian entre le début de la douleur et le 1er appel est passé de 120 min en 2000 à 74 minutes en 2010 [3]. Le pourcentage de patients admis directement dans un centre de cardiologie interventionnelle est élevé (80 %) lorsque le 1er appel est fait au SAMU avec une angioplastie primaire décidée dans 81,9 % des cas (6,6 % de fibrinolyse).
En revanche, 20 % des patients demeurent pris en charge initialement dans des centres sans plateau technique de cardiologie interventionnelle (le pourcentage d’angioplasties est alors de 57,8 % et de 28,8 % pour la fibrinolyse). Dans ce cas de figure, le délai ECG qualifiant – angioplastie primaire s’avère très supérieur aux délais recommandés (143 min en période 3 versus 80 min pour les patients admis directement en centre de cardiologie interventionnelle).
La voie radiale est désormais préférentiellement utilisée (de 42,1 % en période 1 à 79,8 % en période 3) alors que le pourcentage de thrombo-aspirations reste élevé (47,2 % en période 1 et 60,2 % en période 3) mais devrait diminuer au vu des résultats de l’étude TOTAL. Globalement, 8 patients sur 10 reçoivent un traitement par les inhibiteurs de P2Y12 après angioplastie (en période 3 : 51,4 % de prasugrel ; 25,4 % de ticagrelor et 22 % de clopidogrel) alors que le stent actif est – malgré les Recommandations – largement sous utilisé (62 % en 2015 mais pourcentage très variable selon les centres – de 87 à 36 %). Enfin, la mortalité hospitalière est stable sur les 3 périodes (de 4,8 à 4,9 %), comparables aux données de Fast MI 2010 sur les régions Bretagne, Pays de Loire et Normandie (3,9 %) [3].
Réalisée par le même groupe, l’étude observationnelle Bleeding and Myocardial Infarction Study a inclus 1 083 patients (STEMI < 24 heures entre le 1er avril 2011 et le 31 mars 2012 ; définition BARC des saignements) analysables à 1 an de suivi [12]. Elle a montré que 96,6 % des patients recevaient à leur sortie de l’hôpital une bithérapie AAP dont 47,2 % de patients sous clopidogrel et 46,9 % sous prasugrel. A 12 mois, ces pourcentages étaient – respectivement – de 60 %, 20,7 % et 27,4 %.
Des complications hémorragiques (BARC 3 5) au cours du suivi ont été constatées chez 1,6 % (clopidogrel) et 0,2 % (prasugrel) des patients (p=0,0389). Les complications à type d’AVC/AIT ont été recensées chez 20 patients dans le bras clopidogrel (4 %) et 5 dans le bras prasugrel (1 % ; p=0,0034).
Références :
[11] Sokoloff A, Lefèvre G, Teixeira N et al. Characteristics and management of ST-elevation myocardial infarction in France: Regional variations in 2010 Ann Cardiol Angeiol (Paris)
2015 ;64(6) :427-33
[12] Bacquelin R, Oger E, Filippi E et al. Safety of prasugrel in real-world patients with ST- segment elevation myocardial infarction: 1-year results from a prospective observational study (Bleeding and Myocardial Infarction Study) Arch Cardiovasc Dis 2016 ;109 (1) :31-8
D’après la communication d’Hervé Le Breton (Rennes)
13ème édition du Congrès Thromboses et Urgences Coronaires (TUC)
(Du 23 au 25 mars 2016 – Eurosites George V, 28 avenue George V, 75008 Paris)
Compte-rendu du symposium, organisé avec le soutien institutionnel de Daiichi-Sankyo, le 24 Mars 2016
« SCA aux urgences »
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