Encadrement des prescriptions du traitement à la #chloroquine du Pr Raoult, un scandale d’état ?
Alors qu’Olivier Véran, ministre de la Santé, a annoncé il y a deux jours sa volonté de restreindre l’usage de l’hydroxychloroquine aux seules équipes hospitalières dans le cadre de l’essai clinique Discovery ou de prescriptions compassionnelles pour les cas graves, des personnalités médicales s’insurgent contre ce qu’elles considèrent comme une perte de chance pour les autres patients, ou simplement une restriction de la liberté de prescription des médecins de ville.
Le Pr Raoult généralise les tests et le traitement à l’hydroxychloroquine le 22 mars
Depuis le dimanche 22 mars, l’équipe du Pr Raoult de l’IHU Méditerranée Infection propose à toute personne fébrile un test diagnostic et, pour tout patient positif au Coranavirus SARS COV-2, un traitement combinant 3 prises de 200 mg d’hydroxychloroquine pendant 10 jours et 500 mg d’Azithromycine le premier jour puis 250 mg par jour pour 5 jours de plus.
« Avec mon équipe, nous estimons avoir trouvé un traitement. Et sur le plan de l’éthique médicale, j’estime ne pas avoir le droit, en tant que médecin, de ne pas utiliser le seul traitement qui ait jusqu’ici fait ses preuves. » Didier Raoult pour le Parisien.
Cette décision est la conséquence des résultats prometteurs obtenus dans le cadre d’un essai clinique mené sur une vingtaine de patients qui montrerait une réduction spectaculaire de la charge virale de 75 % des patients au bout de 6 jours seulement. L’intérêt principal de ce traitement serait selon le Pr Raoult d’éviter toute forme de complications, mais surtout de réduire la contagiosité des patients et de limiter la propagation l’épidémie. Ce traitement serait donc particulièrement indiqué dès le début de l’infection pour les formes légères ou modérées.
Dans une interview à La Provence, le Pr Raoult indique lui-même ne pas avoir eu affaire à de cas graves.
« Nous n’avons pas eu d’aggravation dans les cas traités, mais nous ne voyons pas de gens dans des états graves. Pour l’instant, les cas graves sont ceux qui ne sont ni détectés, ni traités et qui arrivent avec une insuffisance respiratoire très grave. Ils vont directement en réanimation et ils vont mourir là-bas. Si on dépiste et que l’on traite les gens précocement il y a forcément plus de chance de les sauver que 48 heures avant la phase terminale. »
Le 23 mars Olivier Véran annonce un futur décret encadrant l’usage de l’hydroxychloroquine
Il fonde sa décision sur un avis du Haut Conseil de la Santé Publique qui recommanderait d’en limiter l’usage aux seuls cas graves soit la position inverse de l’équipe du Pr Raout pour qui ce traitement est indiqué dans les formes légères ou modérées.
Sur le sujet : Les pharmacies d’officine ne peuvent plus délivrer du Plaquenil sur la base d’une prescription d’un médecin généraliste
« Le Haut Conseil recommande de ne pas utiliser ce traitement en l’absence de recommandations, à l’exception de formes graves, hospitalières, sur décision collégiale des médecins et sous surveillance stricte » Olivier Véran
En réalité, le HCSP ne recommande l’hydroxychloroquine qu’en dernier recours en cas d’indisponibilité des autres molécules à effet antiviral. Pour les formes légères ou modérées, la recommandation est de ne prescrire aucun traitement spécifique.
« Aucun traitement spécifique n’est recommandé pour les cas de Covid-19 pauci-symptomatiques ou présentant une infection respiratoire basse non compliquée, un suivi médical devant toutefois être mis en œuvre dans ces situations, car il n’existe actuellement pas de données permettant d’envisager l’utilisation hors protocole de l’hydroxychloroquine en prophylaxie du Covid-19.
En présence de signes de gravité, un traitement peut être envisagé : utilisation dans ce contexte d’une molécule à effet antiviral attendu (association fixe lopinavir ritonavir, voire le Remdesivir dans les cas les plus sévères) ou, à défaut de l’hydroxychloroquine. Cette prescription doit s’effectuer dans les conditions rappelées ci-dessus. » HCSP
Le Pr Perronne, choqué par l’avis du HCSP, a « mal aux tripes »
Christian Perronne est chef de service en infectiologie à l’hôpital universitaire Raymond-Poincaré de Garches. Le Haut Conseil de la Santé publique, il connait. Il a présidé pendant de nombreuses années différentes commissions du HCSP, comme celle de la Santé Publique et a participé à la rédaction de très nombreuses recommandations en infectiologie. Pourtant là non seulement il ne comprend pas, mais il se dit très choqué.
« Je ne comprends pas que les autorités suivent ces recommandations alors qu’on sait que le Plaquenil marche. Cet avis me parait à contresens de l’évidence. Je n’arrive pas à comprendre qu’on dise que les résultats obtenus par le Pr Raoult n’aient aucune valeur. Je dis stop ce n’est pas éthique. Je suis très choqué en tant que citoyen et en tant que médecin ».
En dépit de la faiblesse des preuves scientifiques dont il convient, le Pr Perronne défend l’utilisation de l’hydroxychloroquine sur Europe1.
« Il y a urgence sanitaire. C’est très bien de faire des études, mais les malades en état grave ne peuvent pas attendre. Il faut en donner dès maintenant aux patients. »
S’il ne nie pas les possibles effets secondaires, pour lui la majorité des patients le tolère très bien. Il évoque des douleurs, de la fièvre et précise que les effets cardiaques sont très rares, et s’ils sont surveillés, ne posent pas de problème.
Pour le Dr Maudrux, nous sommes dirigés par des irresponsables, voire des criminels
Si le Dr Maudrux est chirurgien urologue, pour beaucoup il restera à jamais le président de la caisse de retraite des médecins libéraux, la CARMF. Il est très remonté contre la « déplorable » gestion du gouvernent qu’il qualifie d’irresponsable voire de criminel. Sur son blog il dénonce un scandale de la chloroquine.
« Ils continuent de faire le contraire de ce qu’on devrait faire. Je doute fortement que le Plaquenil agisse sur les poumons des patients hospitalisés (l’Azithromycine si). La première indication du Plaquenil, c’est au début de la maladie, en diminuant la charge virale, il diminue la contagiosité et peut éviter l’aggravation et le passage à l’hôpital. Il est probablement plus utile pour éviter l’hospitalisation, que pour les cas déjà sévères. »
La liberté de prescription des médecins libéraux bafouée
Il fustige le mépris des autorités pour les médecins libéraux dont la liberté de prescription, même hors AMM, est entravée par la préemption de l’État sur les stocks de Plaquenil, désormais réservés pour les usages hospitaliers. Il milite donc pour que les médecins libéraux puissent également prescrire du Plaquenil en toute liberté.
« LE PREMIER PRESCRIPTEUR DOIT ÊTRE LE MÉDECIN TRAITANT, pas l’hôpital, même s’il peut en utiliser aussi. Le gouvernement envoie les médecins de ville en première ligne, sans protection, mais ne leur fait toujours pas confiance, lui seul sait comment faire, pas les ploucs de la ville (et de la campagne). Ils ne doivent plus prescrire ce traitement, alors qu’ils devraient le PRESCRIRE en premier, DÈS LES PREMIERS SYMPTÔMES, pour éviter l’hospitalisation. »
Des prescriptions hors AMM légalisées depuis 2011
C’est l’article L 5121-12-1 du code de la santé publique qui encadre depuis 2011 toute prescription hors AMM.
« Une spécialité pharmaceutique peut faire l’objet d’une prescription non conforme à son autorisation de mise sur le marché »
Pour être valide, une prescription hors AMM soit respecter les critères suivants :
– Aucune alternative médicamenteuse bénéficiant d’une AMM ou d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) n’est disponible
– le prescripteur juge indispensable, au regard des données acquises de la science, le recours à cette spécialité pour améliorer ou stabiliser l’état clinique de son patient
– Le prescripteur informe le patient que la prescription n’est pas conforme à son autorisation de mise sur le marché, des risques encourus, des contraintes et des bénéfices susceptibles d’être apportés par le médicament
– Le prescripteur porte sur l’ordonnance la mention : « Prescription hors autorisation de mise sur le marché »
– le prescripteur motive sa prescription dans le dossier médical du patient.
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