Découverte de puissants inhibiteurs spécifiques de l’intégrase du VIH
Une équipe américaine rapporte dans Science avoir pour la première fois développé des composés capables de spécifiquement bloquer dans des cellules infectées l’activité de l’enzyme intégrase du VIH-1, une enzyme virale responsable de l’intégration de l’ADN du virus du sida dans le génome des cellules hôtes. Cette découverte pourrait à terme conduire à une nouvelle classe d’agents thérapeutiques anti-VIH : les inhibiteurs de l’intégrase.
C’est la première fois que des inhibiteurs de l’intégrase actifs in vitro dans des tests biochimiques se montrent efficaces dans des cellules. De plus, jusqu’à présent, les antirétroviraux dont on dispose ne sont dirigés que contre deux enzymes virales : la transcriptase inverse et la protéase.
L’intégration de l’ADN proviral est une étape obligatoire du cycle de réplication du VIH, qui conditionne la progression de l’infection cellulaire par le virus. Cette réaction est catalysée par l’intégrase. Cette enzyme se fixe aux extrémités LTR (Long Terminal Repeats) de l’ADN viral, mature les extrémités par clivage d’un dinucléotide terminal en 3’ et intègre de façon covalente l’ADN viral dans le génome hôte. Cette dernière étape est une réaction de transfert de brin. Elle se déroule de façon concertée pour les deux extrémités de l’ADN viral.
Après avoir procédé au screening de plus de 250.000 molécules, Daria Hazuda et ses collaborateurs du laboratoire pharmaceutique Merck (West Point, Pennsylvanie) ont identifié plusieurs inhibiteurs de l’intégrase. Les plus puissants et les plus spécifiques contenaient un groupement ‘diketo acid’.
Parmi eux, les composés L-731.988 et L-708.906 se sont montrés les plus efficaces pour inhiber la réaction de transfert de brin dans un test utilisant de l’intégrase recombinante.
Dans un modèle simple-cycle d’infection aiguë, ces deux molécules ont inhibé la réplication du VIH-1 avec une concentration inhibitrice 50 % (IC 50) de 1 à 2 µM. Le L-731.988 et le L-708.906 ont été tous deux actifs contre des souches à tropisme lymphocytaire et macrophagique, des isolats cliniques, ainsi que des souches résistantes aux inhibiteurs de la transcriptase inverse et de la protéase.
Afin de s’assurer que la cible moléculaire de ces composés était véritablement l’intégrase virale, les chercheurs ont sélectionné des variants résistants pour L-731.988 ou à L-708.906. Ces clones renfermaient bien des mutations dans la région du génome viral codant l’intégrase (gène pol). Par ailleurs, certaines de ces mutations conféraient à elles seules une perte de la sensibilité vis-à-vis de L-731.988 ou L-708.906, d’un facteur 6 à 7. Ces mutants résistants restaient sensibles aux inhibiteurs de la protéase et de la transcriptase inverse.
Les auteurs ont déterminé que les deux composés identifiés bloquent la dernière étape du processus d’intégration du génome viral : la réaction de transfert de brin. Concentrant leurs efforts sur le composé L-731.988, ils indiquent que " cet effet spécifique sur l’intégrase suffit à rendre compte des propriétés antivirales de l’inhibiteur ".
Enfin, ils soulignent que le traitement par le L-731.988 de cellules infectées par une souche sauvage de VIH-1 a entraîné une accumulation de formes circulaires de l’ADN viral (produit non compétent pour l’intégration) et une diminution concomitante de l’ADN viral linéaire compétent pour l’intégration.
Source : Science, 28 janvier 2000, Vol.287, 646-50. Schéma de la réaction catalysée par l'intégrase : http://www.medscape.com/SCP/IIM/1998/v15.n02/m3151.robinson/img-m3151.fig1.html
Descripteur MESH : VIH Virus de l'Immunodéficience Humaine , Cellules , Génome , Science , Virus , Transfert , Génome viral , Antirétroviraux , Concentration inhibitrice 50 , Enzymes , In vitro , Inhibiteurs de la transcriptase inverse , Pennsylvanie , Tropisme