Hôpitaux en crise : la suppression de 1 510 postes d'internes menace la qualité des soins

Hôpitaux en crise : la suppression de 1 510 postes d’internes menace la qualité des soins La rentrée 2024 s'annonce difficile pour les hôpitaux français, avec la suppression de 1 510 postes d'internes en médecine, conséquence d'une réforme du concours de l'internat. Cette réforme, perçue comme brutale par les étudiants et les professionnels de santé, suscite des inquiétudes quant à l'avenir des soins et aux conditions de travail dans les établissements hospitaliers.

Une réforme qui chamboule l'organisation des hôpitaux

À partir de novembre 2024, seulement 7 974 postes seront ouverts pour les internes en médecine, soit une baisse significative par rapport aux 9 484 postes disponibles en 2023. Le ministère de l'Enseignement supérieur justifie cette réduction en affirmant : « Il est normal d'adapter le nombre de postes disponibles au nombre de candidats pour conserver la même exigence » (France Info). Cette diminution est en grande partie due à la réforme du concours de l'internat, qui a introduit de nouvelles modalités d'évaluation, y compris un examen oral, ce qui a suscité une forte réticence parmi les étudiants.

En effet, un grand nombre d'étudiants ont préféré redoubler plutôt que de faire partie de la première promotion soumise à cette nouvelle évaluation, ce que certains ont qualifié de génération « crash test » (France Info). Selon les informations de France 3 Hauts-de-France, la réforme a été perçue comme « arbitraire » par les futurs internes, qui dénoncent des épreuves orales classantes passées « dans des conditions de neutralité douteuses ».

Une répartition des postes qui ne tient pas compte des réalités du terrain

Les effets de cette réforme ne se limitent pas à une simple réduction du nombre de postes. Ils se manifestent également dans la répartition inégale des postes entre les différentes spécialités. Par exemple, les postes en chirurgie plastique ont été réduits de moitié, tandis que d'autres spécialités, comme la médecine générale à Bordeaux, ont vu une diminution de 20 % des postes disponibles (France 3 Hauts-de-France). Cette répartition, décidée par les Agences Régionales de Santé (ARS), est souvent perçue comme technocratique et déconnectée des besoins réels du terrain. Comme le souligne Michaël Peyromaure, chef du service d'urologie de l'hôpital Cochin : « La situation des internes est variable selon les régions, les hôpitaux et les spécialités » (Le Figaro).

Les conséquences de cette répartition sont dramatiques pour les étudiants qui doivent désormais faire des choix par défaut. Une pétition signée par des milliers d'étudiants exprime cette frustration : « Après six ou sept ans d'études acharnées, on ne nous permet pas de choisir notre métier » (Change.org). Cette situation pourrait avoir des répercussions sur la qualité des soins, les étudiants risquant de s'investir moins dans des spécialités qu'ils n'ont pas choisies par vocation.

Des conditions de travail de plus en plus difficiles pour les internes

La réduction du nombre de postes d'internes pose également des problèmes en termes de charge de travail. Selon France 3 Hauts-de-France, 40 % des « ressources médicales » dans les CHU sont constitués par les internes. Avec moins de postes ouverts, la charge de travail pour les internes restants va inévitablement augmenter, en particulier dans les spécialités avec des gardes. Jérome Delécrin, vice-président du Bureau des Internes Picards, alerte : « Le risque, c'est qu'on se retrouve avec des médecins qui vont prendre une spécialité par défaut alors qu'ils vont faire ça toute leur vie » (France 3 Hauts-de-France).

La question de la santé mentale des internes est également soulevée, compte tenu de l'augmentation prévisible de la charge de travail. « Ça va être une charge de travail beaucoup plus importante alors que ça fait déjà plusieurs années qu'on a lutté pour les 48 heures/semaine », explique Delécrin (France 3 Hauts-de-France). Actuellement, un interne travaille en moyenne 59 heures par semaine, bien au-delà des normes européennes.

Un "trou d'air" temporaire

Selon Guillaume Bailly, président de l’Intersyndicale nationale des internes (Isni), la baisse du nombre de postes d’internes pourrait n’être qu’un « trou d'air » limité à cette année, avec une compensation possible l’année suivante. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la Santé, a confirmé que ce « trou d'air » observé cette année « sera rattrapé l'an prochain », en référence aux étudiants qui ont choisi de redoubler pour éviter les nouvelles modalités du concours (Egora). Cependant, cette perspective n’atténue guère les préoccupations immédiates des étudiants qui doivent faire face à une situation particulièrement difficile pour leur avenir professionnel.

Un appel à réévaluer la réforme

Les étudiants et les professionnels de santé appellent à une réévaluation urgente de cette réforme, qui, malgré ses intentions de modernisation, a été mise en œuvre de manière précipitée et avec des conséquences lourdes pour l'ensemble du système de santé. La pétition des étudiants, qui compte 55000 signatures, résume bien leur position : « Nous demandons avec insistance la réouverture des négociations sur le nombre de postes d’internes proposés pour mieux adapter leur répartition à la demande des étudiants » (Change.org).

Le gouvernement est donc face à un choix : persister dans une réforme contestée ou ouvrir le dialogue pour trouver des solutions qui respectent à la fois les besoins des hôpitaux et les aspirations légitimes des futurs médecins.

Quoiqu'il en soit, la suppression de 1 510 postes d'internes, justifiée par une réduction du nombre de candidats, révèle un manque de vision stratégique du gouvernement face à une crise systémique des hôpitaux. En se focalisant sur des ajustements comptables plutôt que sur une réelle réflexion sur les besoins du terrain, le gouvernement met en péril la qualité des soins et aggrave les conditions de travail déjà précaires des internes. La précipitation dans l'application de la réforme, sans concertation suffisante, montre une déconnexion préoccupante entre les décideurs et les réalités hospitalières.

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2 réaction(s) à l'article Hôpitaux en crise : la suppression de 1 510 postes d'internes menace la qualité des soins

  • MyPassion

    Thomas BONNET| 29/08/2024- REPONDRE

    Ou comment détruire activement un système qui fonctionnait, pas parfaitement, mais quand même !
    Une menace sur la qualité des soins ? Oui et c'est même peu de le dire et ça fait des décennies que les moyens humains et matériels se contractent !
    Comme les Anglo-saxons diraient : "No shit, Sherlock!"...
  • MyPassion

    marie-christine gaye-bex| 19/09/2024- REPONDRE

    Les technocrates ont encore frappé ! Ils ne savent toujours pas compter … les déserts médicaux n’ont pas suffit ..

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