Covid-long : des travaux de l’INSERM ouvrent la voie à un diagnostic biologique

Covid-long : des travaux de l’INSERM ouvrent la voie à un diagnostic biologique Les travaux menés par des équipes de recherche de l'INSERM et de l'Université Paris Cité, en collaboration avec l'Université de Minho à Braga (Portugal), ont montré que les symptômes persistants du « Covid long » pourraient s'expliquer biologiquement par des anomalies du système immunitaire associées à la présence durable du virus dans les muqueuses de l'organisme. Ces résultats, publiés dans la revue Nature Communication, pourraient à plus long terme ouvrir la voie à un outil de diagnostic pour le Covid long.

Covid Long, des manifestations cliniques peu documentées

La Covid-19 est une maladie aux multiples facettes, tant par sa présentation clinique que par sa gravité et sa durée. Suite à la première vague épidémique en mai 2020, on a observé que plus de 20 % des patients présentaient des symptômes persistants après 5 semaines, et plus de 10 % d'entre eux souffraient encore après 3 mois. À ce jour, les facteurs de risque identifiés pour les symptômes prolongés incluent l'hospitalisation et un grand nombre de symptômes lors de l'épisode initial.

Le caractère polysymptomatique et changeant de ces manifestations cliniques suscite des interrogations et des inquiétudes chez les patients et les professionnels de santé. Les informations sur l'évolution de la Covid-19 restent limitées et les mécanismes physiopathologiques sont peu documentés. Si la persistance de ces symptômes au delà de 3 mois toucherait entre 10 et 30 % des personnes infectées par le SARS-CoV-2, le diagnostic et le traitement du Covid Long demeurent difficiles. Pour apporter des éléments de réponse à cet enjeu sanitaire, l'équipe de chercheurs dirigée par Jérôme Estaquier de l'INSERM, en collaboration avec l'université de Minho au Portugal, s'est penchée sur les anomalies immunitaires associées à la présence persistante du virus dans les muqueuses de l'organisme.

Les chercheurs ont évalué les réponses immunitaires chez les individus convalescents atteints de symptômes prolongés en comparaison avec des personnes convalescentes asymptomatiques et non infectées, six mois après leur diagnostic de COVID-19. 164 personnes ont ainsi été étudiées.

Marqueurs immunitaires et persistance du virus dans les muqueuses

Les scientifiques ont identifié plusieurs marqueurs sanguins présents chez 70 à 80 % des personnes présentant un Covid long. Parmi ces marqueurs, un sous-type de cellule CD8 exprimant le granzyme A, une protéine inflammatoire, est en excès, tandis qu'un autre sous-type de CD8 exprimant l'intégrine b7 est en faible quantité. Cette dernière sous-population est pourtant essentielle pour contrôler les virus dans les muqueuses.

De plus, les anticorps IgA spécifiques du virus sont également en surnombre, suggérant la persistance du virus dans l'organisme et notamment dans les muqueuses. Les chercheurs avancent l'hypothèse que le SARS-CoV-2 pourrait se réfugier au niveau de la muqueuse intestinale, plus "permissive" sur le plan immunitaire du fait de la nécessité de préserver la flore bactérienne.

« Initialement présent au niveau des muqueuses pulmonaires, le SARS-Cov-2 pourrait donc descendre au niveau intestinal et y persister sans que le système immunitaire ne parvienne à l’éliminer tout à fait »D'autres virus, tels que le VIH, utilisent cette stratégie d'échappement.

Vers un outil diagnostic pour le Covid long

En évaluant le niveau d'inflammation initial lors de la phase aiguë, les scientifiques ont observé une association entre une réponse inflammatoire marquée, notamment par des taux très élevés d'interféron IP-10 ou d'interleukine IL-6, et le risque de développer un Covid long par la suite.

« Cela confirme des observations cliniques selon lesquelles la sévérité initiale de la Covid est associée à un risque plus élevé de développer un Covid long », précisent les chercheurs. « Une des hypothèses est que des personnes qui présentent précocement une immunodéficience plus exacerbée développent des formes initiales plus graves de la Covid-19 et ne parviennent pas à éliminer efficacement le virus qui passe dans les muqueuses intestinales, où il s’installe durablement. Le système immunitaire finit en quelque sorte par le tolérer au prix d’une persistance des symptômes d’intensité et de nature variables », explique Jérôme Estaquier dans un communiqué de l'INSERM

L'objectif est désormais de valider ces résultats dans de nouvelles cohortes afin de déterminer si certains de ces marqueurs pourraient servir d'outil diagnostic. Selon Jérôme Estaquier, si un dosage d'IgA à distance de la phase aiguë et éventuellement de cellules CD8 b7 permettait de diagnostiquer un Covid long, les médecins pourraient poser un diagnostic objectif.

Dans un second temps, nous pourrons réfléchir à des cibles thérapeutiques sur la base de ces travaux », conclut Jérôme Estaquier.

https://doi.org/10.1038/s41467-023-37368-1

 

Crédit photo : DepositPhotos

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