Pour sauver la maternité de Sarlat, l’ARS contourne la loi Rist et propose des contrats à 1800 € les 24 heures
La mise en application de la loi Rist, plafonnant la rémunération des intérimaires médicaux à 1 390 euros brut pour 24 heures de garde, a exacerbé la crise dans les maternités de la région Nouvelle-Aquitaine et particulièrement en Dordogne. Face à une pénurie de personnel, notamment d’obstétriciens et de pédiatres, plusieurs établissements ont dû fermer temporairement leurs portes aux futures mamans, mettant en lumière les limites de cette loi controversée.
L’avenir de la maternité de Sarlat suscite de vives inquiétudes depuis le 28 mars, date de sa fermeture temporaire. Le directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine, Benoit Elleboode, a tenu à se déplacer en personne pour venir rassurer les équipes soignantes et les élus lors de sa visite à Sarlat ce 4 avril. Il a affirmé que la fermeture de la maternité de Sarlat n’était pas à l’ordre du jour et que l’ARS travaillait pour que le service puisse reprendre le plus rapidement possible.
Selon SudOuest, une vingtaine de femmes ont été réorientées vers d'autres maternités (Périgueux, Brive ou Bergerac) pour leur accouchement, après avoir été informées par les équipes soignantes de l'impossibilité d'accoucher à Sarlat. Leur dossier médical sera transmis à l'établissement de leur choix, mais la maternité de Sarlat continuera d'assurer les consultations pré et postnatales, les échographies et suivis de grossesse, les activités gynécologiques médicales ou chirurgicales, et les interruptions volontaires de grossesse.
Les raisons de la fermeture temporaire de la maternité de Sarlat
La maternité de Sarlat a été fermée depuis le 28 mars en raison de l’absence de trois médecins spécialistes : un pédiatre, un obstétricien et un anesthésiste. Cette situation a entraîné la réorientation des futures mamans vers d’autres maternités de la région, notamment à Périgueux, Bergerac ou Brive. Cette fermeture temporaire est due à un manque de personnel médical, qui est devenu de plus en plus criant ces derniers temps, en particulier en raison de l’entrée en vigueur de la loi Rist sur l’intérim médical.
La maternité de Sarlat est d’une importance stratégique pour la région pour des raisons géographiques et d’aménagement du territoire. Les autres maternités de la région sont situées à plus d’une heure de Sarlat, ce qui rend difficile l’accès aux soins pour les femmes enceintes de la région. La situation est d’autant plus critique que la crise sanitaire du Covid-19 a entraîné un exode urbain vers les zones rurales, ce qui a augmenté la demande pour les services de santé dans ces régions.
Les mesures prises pour sauver la maternité de Sarlat
Benoit Elleboode, directeur général de l’Agence Régionale de Santé de Nouvelle-Aquitaine, a donné son aval à l’équipe médicale Périgueux-Sarlat pour « utiliser au maximum des contrats de motif 2 permettant de mieux rémunérer les praticiens », à hauteur de 1 800 euros la garde, pour les spécialités en tension sur le territoire, y compris la périnatalité. Il a également annoncé l’inclusion de la maternité de Sarlat dans le prochain programme régional de santé allant de 2023 à 2028 et s’est engagé à soutenir financièrement l’hôpital de Sarlat. Par ailleurs l’ARS s’est engagée à soutenir financièrement l’hôpital de Sarlat pour l’aider à surmonter cette période difficile. Les urgences de l’hôpital de Sarlat devraient également être rénovées dans les trois ans à venir, ce qui est une bonne nouvelle pour les habitants de la région.
La direction de l’Agence régionale de santé a toutefois assuré que cette situation était temporaire et que l’existence de la maternité de Sarlat n’était pas remise en cause. Selon Corinne Mothes, directrice des centres hospitaliers de Périgueux, Lanmary, Sarlat et Domme, la maternité de Sarlat ne peut assurer une prise en charge sécurisée et de qualité 24 heures sur 24 en raison du manque de pédiatres, d’obstétriciens et d’anesthésistes.
Des tensions dans plusieurs hôpitaux
Le manque de praticiens intérimaires ne se fait pas seulement sentir à la maternité de Sarlat ou aux urgences. De très nombreux secteurs sont concernés. Certains intérimaires n’ont pas voulu revenir travailler depuis que leurs salaires sont bloqués. À l’hôpital de Bergerac ou à Périgueux, faute de médecins, on opère moins ou plus tard dans la journée. Le service de Cardiologie bergeracois a dû lui aussi se réorganiser pour faire face au manque de praticiens. Les directions gèrent au jour le jour, en essayant aussi d’épargner un peu les équipes en place. Le personnel hospitalier est sur sollicité et parfois au bout du rouleau.
Le directeur de l’ARS a annoncé le lancement d’une enquête auprès des établissements de santé du Périgord pour connaître tous les intérimaires employés en février et mars afin de voir s’ils sont partis dans d’autres régions ou dans le privé.
Les hôpitaux de Bergerac et de Périgueux connaissent également une pénurie de personnel médical, notamment en anesthésie, en psychiatrie, en périnatalité et en neurologie. Didier Couteaud, directeur de l’ARS départementale, a confirmé que la maternité de Bergerac fonctionnait déjà avec de nombreux contrats de motif 2. Les blocs opératoires bergeracois connaissent également une réduction d’activité en raison de la pénurie d’anesthésistes.
La question de la régulation des urgences est également sur la table. L’ARS en Dordogne réfléchit à une organisation départementale de l’accueil des urgences, qui pourrait passer par une régulation de tous les services d’urgence de Dordogne de 18 h à 8 h du matin ou de 20 h à 8 heures du matin. Cette réflexion est en cours, mais elle témoigne de la difficulté pour les hôpitaux de la région de faire face à une pénurie de personnel médical.
Face à cette situation, les professionnels de la santé appellent à des mesures urgentes pour renforcer les effectifs médicaux et assurer la continuité des soins dans les hôpitaux de la région.
En Dordogne, la santé publique est menacée par la loi Rist
La situation actuelle dans les maternités de Sarlat, Périgueux et Bergerac est préoccupante et laisse planer des inquiétudes quant à la pérennité des services de santé publique dans la région. La fermeture temporaire de la maternité de Sarlat et la réorientation des futures mamans vers d’autres établissements est un exemple concret de la situation difficile à laquelle est confrontée la Dordogne. La mise en place de la loi Rist, qui limite la rémunération des intérimaires médicaux, n’a fait qu’aggraver les choses, en conduisant à une pénurie de personnel médical dans les hôpitaux de la région dont le taux de recours aux intérimaires varie de 54 à 100%.
Le déplacement récent de Benoît Elleboode, directeur général de l’Agence régionale de santé, montre que les autorités sanitaires sont conscientes de la gravité de la situation et qu’elles cherchent des solutions pour remédier aux problèmes posés par le législateur et la politique du gouvernement. Quitte à contourner la loi.
Crédit photo : DepositPhotos
Descripteur MESH : Contrats , Face , Rémunération , Application de la loi , Lumière , Santé , Hôpitaux , Urgences , Médecins , Femmes , Soins , Santé publique , Grossesse , Services de santé , Établissements de santé , Femmes enceintes , Services hospitaliers , Blocs opératoires , Continuité des soins , Personnel hospitalier , Politique , Gouvernement , Neurologie , Cardiologie , Temps , Déplacement , Mars , Psychiatrie , Anesthésie , Solutions