Cancer de la moelle osseuse : une rechute précoce liée à un sombre pronostic

Cancer de la moelle osseuse : une rechute précoce liée à un sombre pronostic La récente publication d’une étude menée par l’équipe du Professeur Avet-Loiseau* a confirmé que, chez les patients atteints de myélome, une rechute précoce était directement liée à un mauvais pronostic. Un constat simple en apparence, mais qui guide aujourd’hui des travaux de recherche prometteurs, visant à identifier au cœur des cellules cancéreuses les signes révélateurs d’une prédisposition à ce risque de rechute rapide. Une cartographie de ces marqueurs est en cours, qui permettrait à terme aux médecins d’opter pour des choix thérapeutiques sur mesure chez ces patients à haut risque. Des résultats sont attendus pour fin 2020, qui pourraient offrir aux patients concernés un meilleur pronostic.

Démontrer le lien entre rechute rapide et mauvais pronostic

En médecine comme ailleurs, il est des observations élémentaires qu’il faut traduire en données scientifiques avant d’avancer dans les travaux de recherche. C’est le cas de l’étude « Early relapse after autologous transplant for myeloma is associated with poor survival regardless of cytogenetic risk » publiée dans la revue Haematologica, dont les conclusions marquent une étape clé dans le diagnostic et la prise en charge des patients atteints de myélome.

« Nous avons constaté lors de cette étude que chez 300 patients traités entre 2010 et 2016, une rechute précoce était systématiquement liée à un mauvais pronostic. Cette rechute est survenue, malgré les traitements, dans les 18 mois suivant le diagnostic. Les patients concernés ont succombé à la maladie rapidement, explique Hervé Avet-Loiseau. Ils avaient tous été traités de façon classique, par chimiothérapie et autogreffe. Le séquençage ADN mené durant cette étude sur leurs prélèvements de moelle a révélé que chez 40 % d’entre eux, les cellules tumorales présentaient des anomalies ou des mutations, dont on sait aujourd’hui qu’elles préfigurent un mauvais pronostic, autrement dit, un décès rapide. Chez 60 % de ces patients, nous n’avons trouvé aucun marqueur connu, alors qu’ils présentent le même mauvais taux de survie. Mais inconnu ne veut pas dire absent ! Nous partons désormais de l’hypothèse qu’il existe quantité de marqueurs que nous ne détectons pas encore. À nous de les identifier. »

Anomalies moléculaires des cellules : des signaux de risque à décrypter

Caractériser un maximum de ces facteurs est l’objet d’une nouvelle étude en cours, qui mobilise une équipe d’une vingtaine de personnes composée de médecins, de bio-informaticiens et de chercheurs.

 

« À l’Institut Universitaire du Cancer de Toulouse-Oncopole, nous sommes les seuls au monde à réaliser, depuis février 2019, un séquençage systématique des cellules cancéreuses de nos patients atteints de myélome, et ce dès l’étape diagnostique, poursuit Hervé Avet-Loiseau. Nous décryptons non pas l’ADN de nos patients, mais celui de leurs tumeurs, car leurs anomalies moléculaires sont de précieux indicateurs. Nos activités cliniques alimentent notre base de données, la plus importante au monde disponible à ce jour, qui contient des échantillons de 25 000 patients venant de toute la France. Un outil phénoménal, sur lequel nous nous appuyons pour passer au crible les caractéristiques de milliards de cellules, avec pour objectif de détecter parmi elles des facteurs de risque jusque-là inconnus. »

Des résultats porteurs d’espoir

Une opération que cette équipe spécialiste du myélome (parmi les 3 meilleures mondiales) mène tambour battant, avec une phase d’analyse et de séquençage programmée pour l’été 2020. Les données recueillies seront ensuite exploitées par les bio-informaticiens lors des analyses statistiques.

« Leurs compétences mathématiques sont essentielles à la conduite de cette étude, souligne l’hématologue. La quantité de données générée est telle que seuls des programmes informatiques conçus sur mesure sont aptes à les traiter et à détecter les récurrences ou les caractéristiques qui nous intéressent. »

Les résultats sont attendus pour la fin de l’année 2020. L’identification de nouveaux marqueurs représenterait une avancée majeure dans la prise en charge du myélome et un espoir pour les patients concernés. « Nous disposons déjà de plusieurs types de traitements, et de nouveaux médicaments vont être approuvés cette année. Débusquer ces indicateurs lors du séquençage systématique que nous pratiquons nous permettrait de miser immédiatement sur les solutions thérapeutiques les plus fortes et les plus adaptées. Des longueurs d’avance sur la maladie et donc de meilleures chances pour les patients », conclut Hervé Avet-Loiseau

 

Biologiste, Hervé Avet-Loiseau, est Professeur des Universités et praticien hospitalier au CHU de Toulouse. Médecin, chercheur et enseignant, c’est un spécialiste mondialement reconnu du myélome. Il est responsable de l’unité « Génomique du myélome » à l’IUCT-Oncopole et de l’équipe « Oncogénomique et immunologie du myélome » au Centre de recherches en cancérologie de Toulouse, un laboratoire labellisé par l'Inserm et l'Université Toulouse III - Paul Sabatier. En 2019, il est entré dans la liste des chercheurs les plus influents de la dernière décennie, publié par le cabinet Claryvate Analytics.

 

« Early relapse after autologous transplant for myeloma is associated with poor survival regardless of cytogenetic risk. »

Haematologica. 2019 Dec 19. DOI:10.3324/haematol.2019.236588
Corre J, Montes L, Martin E, Perrot A, Caillot D, Leleu X, Belhadj K7, Facon T, Hulin C, Mohty M, Fontan J, Macro
M, Brechignac S, Jaccard A, Stoppa AM, Orsini-Piocelle F, Adiko D, Voillat L, Keddar F, Barry M, Demarquette H, Certain MN, Plantier I, Roussel M, Hébraud B, Filleron T, Attal M, Avet-Loiseau H.

 

 

Cancer de la moelle osseuse : une rechute précoce liée à un sombre pronostic

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