Dépistage organisé du cancer du col utérin : une nécessité d’information éthique pour les femmes
Les autorités sanitaires annoncent la mise en place d’un dépistage organisé (DO) du cancer du col de l’utérus début 20181. Comme le dépistage individuel (DI), le DO reposera sur un frottis cervico-utérin (FCU) tous les 3 ans (après deux frottis normaux espacés d’un an) chez les femmes âgées de 25 à 65 ans. Les femmes invitées au DO du cancer du col seront les femmes non dépistées par le DI2.
Des études observationnelles ont montré une diminution de l’incidence (- 2,5% par an) et de la mortalité (- 3,2% par an) de ce cancer en France, entre 1980 et 20123. Cependant, en l’absence d’essai randomisé comparatif mené en France ou en Europe, l’imputabilité de cette diminution au seul dépistage n’est pas démontrée.
Le dépistage du cancer du col de l’utérus n’est pas dénué de risques :
Sur 10 000 femmes dépistées, 390 (3,9%) ont un frottis anormal, parmi lesquelles 51 (13,1%) ont réellement une lésion précancéreuse ou un cancer4.
Un frottis anormal est source d’anxiété5.
Le traitement des lésions pré-cancéreuses par conisation augmente le risque d’accouchement prématuré et de petit poids de naissance6,7.
De plus, le dépistage du cancer du col par FCU avant 25 ans8, ou à un rythme supérieur à la fréquence triennale recommandée, expose à un surdépistage et parfois à un surtraitement. Le surdépistage est la mise en évidence et la prise en charge de lésions précancéreuses qui auraient spontanément régressé. Il concerne environ 41% des femmes ciblées par le dépistage9. Le surtraitement entraine des gestes invasifs ou de la chirurgie « inutiles », sur des lésions parfois spontanément régressives. Les principaux bénéfices attendus du DO sont l’augmentation du taux de couverture, la diminution du surdépistage et du surtraitement10,11, à condition que le DI diminue fortement.
Il a été montré que les invitations au dépistage dans certains pays n’étaient pas accompagnées d’une information complète sur les risques, prérequis nécessaire au processus de décision médicale partagée12,13
Aussi, le CNGE :
- Approuve la mise en place du dépistage organisé, afin de réduire l’incidence du cancer du col et le nombre de décès qu’il provoque ;
- Rappelle l’existence des risques liés au dépistage et au surtraitement potentiellement induit.
Afin d’appliquer la loi relative aux droits des malades14, le CNGE recommande :
- Que les supports d’invitation et d’information intègrent toutes les informations nécessaires à une décision médicale partagée entre patientes et professionnels pour discuter des bénéfices et des risques du dépistage ;
- Que les professionnels de santé disposent de ces informations afin d’éclairer les femmes dans leur décision ;
- Que l’évaluation du DO comporte la mesure d’autres indicateurs que le taux de couverture (effets sur l’incidence, la morbidité et la mortalité, effets indésirables du dépistage, qualité de vie des patientes) ;
- Que la mise en place du DO soit accompagnée d’un encadrement du DI afin de réellement limiter le surdépistage et le surtraitement.
Références
- Institut national du cancer. Dépistage du cancer du col de l’utérus, vers un dépistage organisé. Boulogne Billancourt : Inca, 2017. Disponible sur : http://www.e-cancer.fr/
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- République française. Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.
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