Le pronostic de l'espérance de vie de patients en phase terminale est trop optimiste
L'estimation de l'espérance de vie des malades en phase terminale est généralement surévaluée. Selon une étude américaine publiée dans le British Medical Journal, 63 % des pronostics seraient excessivement optimistes. Ceci aurait des conséquences négatives sur la qualité des soins et le bien-être des patients en fin de vie
Evaluer l'espérance de vie de patients en phase terminale a toujours été un exercice délicat. Ce pronostic reste pourtant décisif pour le patient, son traitement et sa prise en charge éventuelle dans des unités de soins palliatifs.
Une étude conduite par N. Christakis (Université de Chicago, USA) a estimé l'exactitude des pronostics de 343 médecins concernant l'espérance de vie de 468 malades en phase terminale. Tous ces patients avaient été admis dans des hôpitaux de Chicago.
Ces patients avaient une moyenne d'âge de 69 ans. Ils étaient atteints de cancer (65 %), du SIDA (12 %) ou d'une autre maladie (23 %).
L'exactitude du pronostic a été mesurée par le rapport [espérance de vie observée / espérance de vie estimée]. Un rapport inférieur à 0,67 a été défini comme optimiste et un rapport supérieur à 1,33 comme pessimiste.
Seulement 24 % des pronostics étaient exacts, 63 % optimistes et 17 % pessimistes. Il apparaît que plus l'espérance de vie estimée était longue, plus l'erreur était grande. Réciproquement, plus l'espérance de vie observée était longue, plus l'erreur était faible.
On retrouve le plus fort pourcentage de pronostics optimistes chez les patients cancéreux (67 %). Ces patients sont également ceux chez lesquels les pronostics pessimistes sont les plus faibles (13 %).
L'estimation de l'espérance de vie est la plus mauvaise chez les malades du SIDA avec seulement 14 % de pronostics corrects.
L'erreur de pronostic se répartit de façon homogène entre les différentes spécialités médicales et concerne toutes les affections.
Les pronostics des médecins non-cancérologues sont les moins précis et se révèlent exacts dans seulement 10 % des cas. Les cancérologues sont ceux qui présentent le moins de pronostics excessivement pessimistes (9 % des estimations de ces praticiens). Les médecins les plus expérimentés semblent donner cependant les meilleures estimations.
La relation entre le patient et le médecin influe sur la qualité du pronostic. En effet, plus le médecin connaît le malade, plus son estimation est erronée.
Ces résultats ont une incidence négative sur le patient. Selon les auteurs, une estimation erronée de l'espérance de vie empêche le patient d'accéder à des soins qui faciliteraient ses derniers jours. Donner de faux espoirs au malade peut conduire celui-ci à des choix peu judicieux tel qu'un traitement agressif et inefficace plutôt que des soins palliatifs.
Enfin, N. Christakis indique que l'attitude des médecins face à ce problème doit évoluer. Des médecins ayant eu peu de contacts avec ces patients semblent donner de meilleurs pronostics. L'avis de plusieurs confrères, notamment plus expérimentés, apparaît donc recommandé dans ces situations.
Source : British Medical Journal, 19 Février 2000, Vol. 320, 469-473
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