L'analyse du déséquilibre génétique pour affiner le pronostic du cancer colo-rectal
Des travaux publiés dans le Lancet du 19 janvier montrent que l'existence d'un déséquilibre allélique sur les chromosomes 8 et 18 est un indicateur pertinent de la survie à 5 ans dans le cancer colorectal non métastatique.
Ce résultat est rapporté par Zhou et al. Dans leur article, ces auteurs rappellent que l'existence d'anomalies chromosomiques dans les cellules tumorales est associée à un mauvais pronostic. Ces réarrangements chromosomiques peuvent se traduire par la perte de matériel génétique. Dans les tumeurs, un allèle peut être perdu dans certaines cellules, phénomène qui se traduit par un ratio anormal entre les deux allèles (celui hérité du père et celui hérité de la mère). De tels déséquilibres dans des régions bien définies des chromosomes 8 et 18 ont par exemple été liés à un mauvais pronostic dans le cancer colo-rectal.
Afin d'évaluer le caractère pronostic de ces déséquilibres, Zhou et al ont étudié 180 patients avec un cancer colo-rectal non métastatique. Le suivi médian des patients survivants était de 68 mois.
Les tumeurs prélevées lors de la chirurgie étaient utilisées pour mesurer le degré de déséquilibre allélique sur le bras court du chromosome 8 (8p) et sur le bras long du chromosome 18 (18q). Les auteurs ont développé une technique nommée "digital SNP (single-nucleotide polymorphism)" qui permet de compter chaque allèle dans chaque échantillon.
Trois groupes de tumeurs ont été définis selon le degré de déséquilibre :
- les tumeurs "L" (93 patients): déséquilibre allélique sur les chromosomes 8p et 18q
- les tumeurs "L/R" (60 patients): déséquilibre allélique sur le chromosome 8p ou 18q
- les tumeurs "R" (27 patients): absence de déséquilibre allélique sur les régions 8p et 18q.
La survie sans récidive à 5 ans était significativement différente dans ces trois groupes : 100 % (80-100) pour le groupe "R", 74 % (61-87) pour le groupe "L/R" et 58 % (47-69) pour le groupe "L".
D'après les travaux des auteurs, l'effet du déséquilibre n'était pas influencé par l'âge, le stade tumoral, le site tumoral ou encore le sexe du patient.
Le déséquilibre allélique était plus discriminant que le stade histopathologique selon la classification de Duke. Les patients étudiés présentaient des tumeurs stade A ou B.
Pour les tumeurs de stade A, la survie à 5 ans sans récidive était de 75 %. "Cependant, la survie à 5 ans sans récidive était de 100 %, 85 % et 60 % pour les patients de stade A avec respectivement des tumeurs R, L/R et L".
Pour les tumeurs de stade B, la survie à 5 ans sans récidive était de 63 %. Pour ce stade tumoral, la survie était de 100 %, 68 % et 51 % selon la classification R, L/R et L définie par le degré de déséquilibre allélique.
"Ainsi, les patients de stade A selon la classification de Duke et avec des tumeurs L avaient un risque de récidive significativement plus élevé que les patients de stade B (Duke) avec des tumeurs R", commentent Zhou et ses collaborateurs.
La recherche des déséquilibres alléliques est donc un outil pronostic fiable dans le cancer du colon non métastatique opérable. "Nos résultats montrent sans ambiguïté une relation entre le déséquilibre allélique et la récidive des cancers colo-rectaux opérés", concluent les auteurs.
Source : Lancet 2002;359:219-25
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