Tabagisme : la Commission Européenne propose de diminuer la toxicité des cigarettes
La Commission Européenne a adopté mardi une proposition pour une directive concernant la fabrication, la présentation et la vente de produits du tabac. Il y notamment question de restreindre la teneur en goudrons et nicotine des cigarettes.
Les principales caractéristiques de cette proposition sont les suivantes : abaissement de la teneur maximale en goudron des cigarettes de 12 mg à 10 mg par cigarette, fixation d'une teneur maximale de 1 mg de nicotine et de 10 mg de monoxyde de carbone par cigarette. Pour mémoire, en France, la loi Evin de 1992 a fixé pour les cigarettes le taux de goudrons à 15 mg depuis 1993 et à 12 mg à partir de 1998.
La Commission européenne a par ailleurs décidé de proposer que les fabricants déclarent les ingrédients autres que le tabac, notamment les additifs, qui entrent dans leurs produits. Le commissaire européen à la santé, David Byrne, a rappelé qu'un récent rapport de la Commission faisait état de grandes différences entre les réglementations des États membres relatives aux additifs du tabac, ce qui se traduisait par un niveau d'information et de protection insatisfaisant.
La nouvelle proposition imposera également de nouveaux avertissements " plus fermes, imprimés en caractères plus lisibles et plus grands, en noir sur un fond blanc encadré par un bord noir ". Les avertissements ont été réexaminés dans la proposition afin de tenir compte des informations scientifiques les plus récentes, l'attention étant notamment attirée sur les maladies cardiaques et le cancer du fumeur, ainsi que sur le problème de la dépendance à l'égard du tabac.
Enfin, les États membres sont invités à autoriser et à réglementer l'utilisation de termes tels "light", "mild", etc., dont il est établi qu'ils incitent le consommateur à considérer que ce type de produit est moins préjudiciable à la santé.
Cette proposition de directive est l’aboutissement d’un long processus de consultation qui a débuté en 1996 et dans lequel le Parlement et le Conseil ont pris part.
La toxicité des cigarettes dans des pays méditerranéens est très élevée
Les chiffres de teneurs maximales en goudron (10 mg) et en nicotine (1 mg) par cigarette retenus par la proposition de la Commission européenne peuvent être mis en parallèle avec la toxicité des cigarettes consommées dans les pays méditerranéens.
C’est ainsi qu’en Algérie, le taux de nicotine par cigarette se situe entre 1,2 et 1,5 mg et le taux de goudrons entre 28 et 33 mg par cigarette. En Egypte, le taux de goudrons est en moyenne de 2 mg et le taux de goudrons de 15 mg par cigarette. En Grèce, le taux de goudrons autorisé jusqu’en décembre 2000 est de 18 mg, l’objectif étant d’atteindre 12 mg.
Ces chiffres sont rapportés dans une étude menée par le Dr Jean-François Tessier (Inserm, Université Victor Segalen, Bordeaux) et des chercheurs de la Faculté de médecine de Casablanca (Maroc) et publiée dans dernier numéro de l’International Journal of Tuberculosis and Lung Disease.
Leur travail avait pour objectif de fournir les principales caractéristiques du comportement tabagique dans le Bassin Méditerranéen à partir d’informations collectées par questionnaire auprès d’un réseau de correspondants (pneumologues ou épidémiologistes). En effet, soulignent les auteurs, on ne dispose sur le tabagisme dans les pays méditerranéens que de données dispersées et le plus souvent fragmentaires. De plus, bien souvent, l’information relève de données le plus souvent non publiées.
Cette enquête coopérative porte pour les pays européens du sud de la Méditerranée, sur la Catalogne (Espagne), la Grèce et l’Italie ; pour le Maghreb sur l’Algérie, le Maroc et la Tunisie ; pour le Moyen-Orient sur l’Egypte, le Liban, la Syrie et l’Iran.
Le comportement tabagique différent des hommes et des femmes
Dans les pays étudiés, la proportion de fumeurs est différente dans les deux sexes. Ainsi, en Algérie, au Liban, en Tunisie et en Turquie, 50 % des hommes sont des fumeurs. Cette proportion de fumeurs varie en fait de 63 % en Turquie à 27 % en Iran.
On ne dispose pas de données permettant de distinguer les fumeurs quotidiens et occasionnels dans tous les pays. Cependant, parmi ceux où cette distinction est possible, il apparaît que la proportion de fumeurs quotidiens chez les hommes avoisine ou dépasse les 50 % en Grèce, Algérie, Catalogne et Syrie.
Seuls deux pays étudiés ont une proportion de fumeuses supérieure à 30 % : le Liban et la Grèce. En Turquie, Catalogne, Syrie, Italie, elle dépasse ou avoisine les 20 %. Partout ailleurs, elle ne dépasse pas les 10 %. Elle est inférieure à 5 % en Egypte et en Iran.
Globalement, l’âge moyen de début du tabagisme dans les pays étudiés se situe autour de 15 ans. Entre 15 et 25 ans, la proportion de fumeurs augmente dans les deux sexes, mais reste inégale. Chez les hommes, elle varie entre 50 % et plus (Tunisie) et 10 % (Iran). Quant aux fumeuses, elles avoisinent les 30 % dans deux pays : Grèce et Catalogne. Elles sont moins de 10 % en Algérie (Alger), en Iran, au Maroc, en Syrie et en Tunisie.
Dans tous les pays étudiés, les cigarettes industrielles sont le mode de consommation du tabac le plus courant.
Par ailleurs, les moins de 25 ans fument habituellement des cigarettes américaines, importées ou sous licence locale, à l’exception de l’Egypte et de la Tunisie. Dans ces deux pays, les jeunes fumeraient plutôt des cigarettes locales. Les plus de 60 ans fument habituellement des cigarettes du pays. Enfin, la consommation des 25-60 ans est très diversifiée : cigarettes américaines au Liban, seulement locales en Grèce, en Italie et Tunisie, locales et essentiellement américaines dans les autres pays.
Le tabagisme des médecins
Dans la plupart des pays étudiés, les médecins fument comme la population générale. Cependant, en Egypte (40 %), Grèce et Italie (40 %), les correspondants interrogés par les auteurs de l’étude ont estimé que le tabagisme des médecins était supérieur à celui du reste de la population. En Algérie (40 %), Iran et Tunisie, il est jugé identique.
Cette étude a également fait le point sur l’état de la législation anti-tabagique dans ces pays. C’est ainsi que, selon les correspondants, la publicité pour le tabac reste libre au Liban et en Tunisie. Elle est limitée en Algérie, en Catalogne, en Egypte, en Grèce, en Italie. Elle n’est interdite que dans trois pays : Iran, Maroc et Syrie.
On observe enfin une grande disparité dans le parrainage des spectacles par les fabricants de cigarettes. Il est autorisé en Catalogne, en Grèce, au Liban, en Italie, et en Tunisie, et n’est interdit qu’en Algérie, en Egypte, au Maroc et en Syrie.
Source : Commission Européenne et Int J Tuberc Lung Dis, 1999, 3 (10) : 927-37.
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