S’installer, exercer et vivre dans son territoire : un défi pour les professionnels, un enjeu pour les politiques
Le syndicat MG France nous livre un compte rendu du colloque qu'il organisait le 30 janvier dernier ainsi que deux enseignements. Si l’implication des médecins, des pharmaciens et des usagers est indispensable pour organiser une offre de soins pérenne sur les territoires, la contribution des élus locaux est plus que jamais nécessaire.
Joy Raynaud, géographe de la santé, a démoli en quelques diapositives le mythe de l’héliotropisme des médecins généralistes.
Avec 11 000 médecins généralistes de moins en dix ans, c’est la totalité de la carte de France qui affiche la catastrophe sanitaire entraînée par une démographie professionnelle défavorable.
Témoignage enthousiasmant d’un jeune qui, séduit par la pratique de ses maîtres de stage, s’est installé avec eux.
Témoignage poignant d’un médecin généraliste d’âge moyen dont le cabinet libéral a été saboté par l’initiative intempestive de création d’une maison de santé par des élus locaux mal avisés.
Témoignage combatif d’un jeune médecin généraliste qui sur un territoire de 25 000 habitants a vu l’effectif des généralistes libéraux fondre de huit à trois. Il est l’un de ces trois et se lance dans un projet de Communauté Professionnelle Territoriale de Santé (CPTS) pour fédérer tous les acteurs de santé de son territoire déficitaire. Cela se passe aujourd’hui en Île-de-France, dans une ville desservie par le RER…
Des généralistes inventifs, impliqués dans des initiatives innovantes, qui tous reconnaissent que leur passion pour leur métier ne suffit pas toujours à lever les obstacles et que le soutien institutionnel n’est pas toujours à la mesure de leurs efforts.
Des élus locaux de bonne volonté qui font état de la pression populaire à laquelle ils sont soumis du fait de la difficulté d’accès aux soins rencontrée par leurs administrés, faute de médecin généraliste traitant disponible. Élus locaux confrontés à de vrais parcours d’obstacles pour tenter de rétablir une offre de soins convenable sur leurs territoires.
Philippe Besset, président de la FSPF, réaffirme que médecin généraliste et pharmacien d’officine ont des destins indissolublement liés.
L’Ordre des médecins représenté par son président le Docteur Patrick Bouet, se veut facilitant pour les créations de CPTS, mais réclame d’être associé à leur construction dès le début.
Deux constats émergent à l’issue des débats : l’implication de tous, médecins, pharmaciens, usagers, etc. est indispensable pour organiser une offre de soins pérenne sur les territoires. Les élus locaux sont de bons connaisseurs des besoins de santé de la population ; ils doivent contribuer avec les professionnels à l’élaboration des projets et à définir la bonne maille pour le regroupement des professionnels qui permet de mutualiser les moyens indispensables au bon fonctionnement des cabinets. Celui-ci repose en effet sur un indispensable trépied : équipe de soins de proximité du médecin traitant (assistant, infirmière de santé publique, stagiaire), local adapté à la présence de ces professionnels, outils de diagnostic et de communication modernes.
Katia Julienne, directrice générale de l’offre de soins, a assuré les médecins généralistes du soutien des services du ministère.
Jean-Carles Grelier et Julien Borowczyk, tous deux députés, ont pris la mesure des difficultés actuelles liées à la démographie. Il reste à savoir jusqu’où ils iront pour accompagner les professionnels. Julien Borowczyk, lui-même généraliste, croit savoir que la ministre n’est pas hostile à l’élargissement des horaires de la permanence des soins réclamée par les médecins généralistes en grève le samedi matin à l’appel de MG France.
La médecine générale, profession clé de l’accès aux soins de la population, garantissant la prise en charge des patients dans la durée, est en effectif réduit pour soigner et protéger la santé d’une population croissante, vieillissante et dont les besoins de soins augmentent.
À cette profession on demande aujourd’hui des services nouveaux : prévention, service d’accès aux soins et maintien à domicile des personnes âgées. À cette profession on demande aussi d’assumer désormais une responsabilité populationnelle.
À ces missions nouvelles doivent répondre des moyens nouveaux :
- À propos d’attractivité de la profession, les présidentes des syndicats de jeunes médecins généralistes Marianne Cinot (ISNAR-IMG) et Laure Dominjon (ReAGJIR) nous montrent que pour franchir le pas de l’installation libérale, il est indispensable d’améliorer les conditions d’exercice des médecins généralistes.
- Accompagnement financier des porteurs de projets de CPTS, qui doivent être davantage soutenus par les administrations qu’à l’heure actuelle.
- Revalorisation significative de la visite à domicile, spécificité de la spécialité de médecine générale, à la hauteur des enjeux du maintien à domicile d’une population âgée ou dépendante de plus en plus nombreuse.
- Financement du volet ambulatoire du service d’accès aux soins pour la population, décidé par la ministre de la Santé, mais actuellement sans moyens.
Jacques Battistoni, président de MG France, a conclu ce colloque par un avertissement.
On demande toujours plus aux médecins généralistes qui veillent sur la santé de leurs concitoyens en proximité. Mais les médecins généralistes, de moins en moins nombreux, sans moyens supplémentaires substantiels, sans facilitation concrète de leur exercice, ne pourront pas répondre à ces missions nouvelles, malgré un engagement quotidien.
Sans moyens, ce serait sans MG France !
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