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Les derniers apports de la jurisprudence sur lâ'obligation d'information
Carine DURRIEU DIEBOLT, Avocate à la cour
-Un patient présentant une lipomatose pelvienne avait subi une antéroplastie d’agrandissement avec réimplantation utéro-vésicale. Souffrant de différents troubles après l’intervention, il avait recherché la responsabilité du médecin urologue.».
La question était posée de l’alternative thérapeutique. En effet, les experts ont estimé qu’il aurait été préférable de maintenir un traitement par corticothérapie pendant plusieurs mois en associant une néphrostomie et la pose d’une sonde vésicale.
Cette alternative avait bien été proposée au patient qui avait refusé la pose d’une sonde, ce qui était consigné dans un commentaire rédigé par le praticien. Ce dernier avait donc opté pour une antéroplastie.
Les juges du fond ont jugé que le refus du patient était à l’origine de son préjudice.
Le patient a saisi la cour de cassation en invoquant qu’il n’avait pas été informé des risques graves encourus en cas de refus du traitement préconisé et de recours à une antéroplastie.
En conséquence, son refus n’était pas éclairé.
La Cour de cassation a fait droit à sa demande et elle a rappelé que l’opposition aux soins de la part du patient ne peut libérer le praticien de sa responsabilité qu’à la condition que ce refus ait été éclairé.
Cet arrêt est conforme au code de déontologie médicale et à la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades :
- L’article 36 du code de déontologie médicale dispose que « lorsque le malade, en état d’exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences ... »
- L’article 1111-4 de la loi précise : « Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables... »
En pratique, le médecin doit donc informer le patient de sa situation et des conséquences de son refus. Il doit également tenter de le convaincre de se faire soigner. Il faut essayer de multiplier les entretiens.
Si le patient persiste à refuser les soins, le médecin doit s'incliner devant la volonté du malade.
Il est recommandé aux praticiens de se montrer alors très vigilant et si possible de se préconstituer une preuve de ce que l’information a bien été donnée.
* L’étendue de l’information entre confrères (Cour de cassation, 1ère civ, 29 nov 2005, n° 04-13.805) :
Un gynécologue assurait le suivi médical d’une patiente depuis plusieurs années, lui prescrivant régulièrement des examens radiologiques aux fins de dépistage d’un éventuel cancer du sein. La patiente a été atteinte d’un cancer.
Elle a mis en cause le gynécologue en invoquant un retard de diagnostic de deux ans. Celui-ci s’est retourné contre le radiologue ayant effectué les mammographies au motif qu’il n’avait pas mentionné dans le compte-rendu qu’il lui avait adressé l’ensemble des informations fournies par la mammographie et permettant le diagnostic du cancer.
La Cour d’appel a retenu la seule responsabilité du gynécologue. Par contre, la Cour de cassation a cassé l’arrêt seulement en ce qu’il a mis hors de cause le radiologue en jugeant qu’il incombe au médecin ayant réalisé un acte médical, à la demande d’un confrère, d’informer ce dernier par écrit de ses constatations, conclusions éventuelles et prescriptions.
Il en ressort que lorsque plusieurs médecins collaborent à l’examen d’un malade, ils doivent se transmettre les informations au complet.
* Sur les conséquences du défaut d’information (Cour de cassation, 1ère civ, 13 dec 2005, n° 04-14.179) :
Un patient a subi une urétrotomie, puis une urétroplastie. À la suite d’un lâchage des sutures, il a dû subir d’autres interventions.
Il a invoqué l’absence d’information sur les risques réalisés pour engager la responsabilité du médecin.
La Cour de cassation a jugé qu’aucune faute ne pouvait être reprochée, l’état du patient étant au final plus satisfaisant qu’auparavant. En conséquence, le patient ne pouvait pas invoquer un préjudice consécutif à un défaut d’information.
On peut retenir que le défaut d’information sur les risques réalisés n’engage pas la responsabilité du médecin en l’absence de préjudice causé au patient. Ce qui rejoint un adage souvent appliqué en droit français : pas d’intérêt, pas d’action .