Vers une meilleure compréhension des origines du VIH
Les travaux de l'équipe de B. Korber qui ont permis de dater l'émergence du principal groupe de VIH-1 sont publiés cette semaine dans Science. L'apparition de ces virus remonterait à 1931. Ce résultat avait déjà été présenté lors de la 7° Conférence sur les rétrovirus et les maladies opportunistes (voir dépêche du 02/02/2000). Aujourd'hui, les scientifiques discutent notamment des différents scénarios qui ont pu conduire à la transmission du virus à l'homme.
La datation de l'apparition du groupe principal de VIH-1 (groupe M) a été réalisée grâce à une analyse informatique des séquences nucléiques de l'enveloppe du virus (gène env) et du gène gag. L'alignement de ces nombreuses séquences montre que le dernier ancestre commun des VIH-1 du groupe M daterait de 1931 (IC 95 % = 1915-1941).
Deux méthodes de calcul, chacune basée sur deux postulats différents, ont conduit à la même estimation. Un des méthodes supposait l'existence d'une horloge moléculaire stricte, qui est fondée sur un taux de mutations constant au cours du temps, et l'autre méthode autorisait des variations dans cette horloge.
Les scientifiques insistent sur le fait que ces analyses ne permettent pas de connaître la date de la transmission du lentivirus initial du singe à l'animal. "Elles (ces analyses) ne fournissent pas d'information sur la façon dont l'espèce (humains ou chimpanzés, en supposant que celui-ci soit la source du HIV-1) a été infectée au moment de l'expansion du groupe M".
Si l'on suppose que l'ancêtre le plus récent du groupe M était hébergé par l'homme, alors la transmission du singe à l'homme était antérieure à 1931. De ce fait, il est impossible de déterminer la durée écoulée entre le moment de la transmission inter-espèce et l'apparition du groupe M.
Une autre éventualité est la présence de cet ancêtre chez le chimpanzé en 1931. Cette hypothèse implique l'existence de multiples transmissions inter-espèce après cette date, chacune donnant naissance à une classe différente de VIH. Cela suppose alors que les différents virus aient été transmis à l'homme en quelques décennies et que toutes les souches étaients épidémiques, ce que les scientifiques estiment peu vraisemblable.
Il se pourrait également que les sous-types du groupe M aient été présents chez des chimpanzés différents et que ces derniers aient infecté la population de manière indépendante. Ici encore, cette hypothèse est très discutable.
Ces scénarios sont également commentés par D. Hillis (Université du Texas, Austin) dans le même journal. Son avis sur la question rejoint celui de l'équipe de B. Korber (Laboratoire National de Los Alamos, USA). Selon eux, la théorie la plus plausible reste une transmission du virus à l'homme au début du siècle, le virus se stabilisant dans une petite population jusqu'en 1930. Cependant, les autres hypothèses ne peuvent être complétement écartées.
Le travail de Korber écarte également la possibilité d'une transmission par le biais du vaccin contre la polio en Afrique Centrale entre 1957 et 1960. Cette hypothèse s'appuyait sur une éventuelle contamination (par le SIV ou simian immodeficiency virus) des cellules de chimpanzés utilisées pour la production du vaccin. "Nos analyses suggèrent que l'ancêtre du groupe HIV-1 M est apparu des décennies avant les programmes de vaccination et que les différents sous types étaient bien établis en 1957", précisent les chercheurs.
"Etablir la date de l'émergence des VIHs est impérative pour découvrir de quelle manière la transmission a eu lieu et pour éviter les zoonoses dans le futur", conclut Hillis.
Source : Science 2000;288:1789-1796. Communiqué de presse de Science
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