Guides de bonne pratique médicale et conflits d'intérêt : plus de transparence ?
Une étude qui paraît aujourd'hui dans le Journal of American Medical Association met l'accent sur les relations qui existent entre l'industrie pharmaceutique et les auteurs des guides de bonne pratique. En raison de l'impact que pourraient avoir ces conflits d'intérêt sur la prise en charge des patients, les auteurs de l'étude estiment que ces relations devraient faire l'objet d'une attention et d'une surveillance particulière avant le processus de rédaction de ces recommandations.
Dans leur travail, les Drs Choudhry, Thomas Stelfox et Detsky de l'Université de Toronto ont cherché à examiner la nature des relations qui existent entre l'industrie pharmaceutiques et les auteurs des guides de bonne pratique (GBP).
Un questionnaire a été adressé à 192 auteurs de 44 GBP approuvés par des sociétés savantes européennes et nord-américaines. Ces GBP avaient été rédigés entre 1991 et 1999 et concernaient des pathologies courantes.
Plusieurs éléments faisaient l'objet d'une attention particulière : la nature des relations entre les auteurs des GBP et l'industrie pharmaceutique, leur notification dans les GBP publiés, les discussions entre les auteurs au sujet des conflits d'intérêt potentiels et leurs sentiments sur l'influence de ces relations sur les recommandations de traitement.
Seulement 100 réponses (52 %) ont pu être analysées et représentaient 37 des 44 GBP étudiés.
"Bien que les résultats de cette étude doivent être interprétés avec précaution en raison du taux de réponse assez faible, nos résultats semblent indiquer que la plupart des auteurs de GBP sont en relation avec des laboratoires pharmaceutiques et qu'une proportion significative travaille comme employés/consultant pour ces fabricants de médicaments", écrivent le Dr Choudhry et ses collaborateurs.
Selon leurs résultats, 87 % des auteurs étaient en relation avec l'industrie pharmaceutique, 58 % avaient bénéficié d'un financement de recherche et 38 % avaient été employés ou consultants pour un laboratoire pharmaceutique.
Ces interactions étaient assez étendues puisque les auteurs des GBP étaient en relation avec 10,5 différents laboratoires pharmaceutiques en moyenne. "Globalement, 81 % des auteurs par GBP étaient en relation avec l'industrie pharmaceutique", commente Choudhry.
Résultat tout aussi marquant, 59 % étaient en relation avec des sociétés dont les médicaments étaient étudiés dans les GBP qu'ils rédigeaient.
Par ailleurs, 55 % des auteurs ont déclaré qu'il n'y avait de procédure particulière dans les GBP pour déclarer les liens qui existent entre les auteurs et l'industrie du médicament.
Dans leur grande majorité, les auteurs estiment que leurs relations avec l'industrie n'ont pas d'influence sur les recommandations émises. Toutefois, 7 % pensent que leurs relations ont influencé les recommandations et 19 % pensent que les recommandations des co-auteurs l'ont également été.
Choudhry et ses confrères jugent "considerable" le lien entre l'industrie pharmaceutique et les auteurs des guides de bonne pratique. Ils proposent la mise en place d'une mesure par laquelle les auteurs des GBP seraient obligés de déclarer leur lien avec l'industrie pharmaceutique et ce avant que le processus de discussion ne soit initié. Si un conflit d'intérêt paraît évident, l'auteur devrait être exclu des discussions. Idéalement, tous les liens déclarés par les auteurs devraient être inscrits dans la forme finale des guides de recommandations.
Source : JAMA 2002;287:612-7.
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