Du nouveau sur le virus West Nile responsable de la récente épidémie d’encéphalite à New York
Deux études à paraître dans Science apportent des détails sur la caractérisation et l’origine du virus West Nile (WN) qui fut responsable, en septembre et octobre dernier, d’une épidémie d’encéphalite transmise par des moustiques dans la ville de New York et les comtés limitrophes. Les analyses génétiques révèlent aujourd’hui que cet agent pathogène est très proche de deux souches WN isolées en 1996 en Roumanie, mais beaucoup plus encore d’un virus WN isolé en Israël en 1998 avec lequel il partage une homologie de plus de 99,8 %.
Le virus West Nile (WN) est ainsi nommé car il a été isolé pour la première fois en 1937 chez une femme fébrile vivant dans une région du nord de l’Ouganda, le district West Nile. Ce virus à ARN simple brin appartient à la famille des Flavivirus.
Lors de l’épidémie d’encéphalite humaine qui frappa 59 personnes et fit 7 morts dans la région de New York à la fin de l’été dernier, on découvrit que des corneilles et des oiseaux exotiques du Zoo du Bronx avaient succombé à un mal étrange. (lire nos dépêches du 3/10/99 et du 8/10/99)
Des entomologistes et des généticiens de la Connecticut Agricultural Experimental Station et de la Faculté de médecine de l’Université de Yale (New Haven, Connecticut) rapportent avoir isolé le virus West Nile (WN) chez deux espèces de moustiques, 28 corneilles et un épervier. Une fraction du génome de ces différents virus a été séquencée.
Les analyses montrent que ces isolats viraux du Connecticut sont étroitement apparentés à deux virus WN isolés en Roumanie au cours d’une épidémie d’infections neurologiques qui sévit à Bucarest (Roumanie) et dans la basse vallée du Danube en 1996.
Selon John Anderson et ses collègues, il est possible que le virus WN ait trouvé refuge aux Etats-Unis dans la faune aviaire. Si c’est le cas, " il continuera sans doute à avoir un sérieux impact sur la santé humaine et celle des populations avaires, telles que les corneilles et les rapaces, qui n’avaient jusqu’à présent jamais été exposées à ce virus ".
Un flamant du Chili
Parmi les animaux découverts morts au zoo du Bronx (New York) se trouvait un flamant du Chili. Un flavivirus isolé du cerveau de ce volatile a été entièrement séquencé, rapporte une seconde équipe dans Science. Elle réunit 24 chercheurs appartenant à de nombreux laboratoires, notamment le National Center for Infectious Diseases (Fort Collins, Colorado), l’Institut Pasteur (Paris) et l’US Army Medical Research Institute of Infectious Diseases (USAMRIID, Fort Detrick, Maryland).
Ces chercheurs ont caractérisé sur le plan antigénique différents isolats viraux WN conservés grâce à un panel d’anticorps monoclonaux spécifiques d’une glycoprotéine d’enveloppe (glycoprotéine E). Les résultats montrent que les isolats américains sont bien des virus WN, qu’ils sont notamment distincts des virus Kunjin (KUN) qui appartiennent eux-aussi à la famille des flavivirus. (lire notre dépêche du 8/10/99)
Afin de mieux préciser la relation entre le virus WN isolé chez le flamant rose et d’autres souches virales, une analyse phylogénétique a été entreprise. Elle a consisté à comparer une séquence du gène de la glycoprotéine E dans 33 virus WN, 7 virus KUN et un virus de l’encéphalite japonaise (JE). Ce dernier virus avait été considéré comme l’agent responsable de l’épidémie d’encéphalite à New York à son début.
Les résultats de cette analyse comparative montre que le virus isolé chez le flamant du Chili appartient bien à un sous-groupe de virus WN et qu’il est étroitement apparenté à des virus WN qui ont été récemment isolés en Afrique du Nord, en Roumanie (96,9 % d’homologie), au Kenya, en Italie et au Moyen-Orient.
En particulier, ce virus a été trouvé extrêmement proche (plus de 99,8 % d’homologie) d’un virus WN isolé du cerveau d’une oie morte en Israël en 1998 et dont la séquence a été déterminée à l’institut Pasteur (Paris).
D’autre part, les analyses sur une région du génome viral montrent une homologie de séquence de 99,8 % ou 99,9 % entre des souches virales WN provenant de malades décédés d’encéphalite et les virus WN isolés chez le flamant du parc zoologique du Bronx, des corneilles du New Jersey et de l’Etat de New York, et des moustiques capturés dans la région.
Tout indique donc qu’un seul virus WN a circulé pendant l’épidémie humaine et l’épizootie à la fin de l’été dernier dans le nord-est des Etats-Unis. Elles pourraient être imputables à un virus NW qui circule dans la région méditerranéenne depuis 1998. L’absence de cas humains d’encéphalite lors de l’épizootie en Israël pourrait s’expliquer par une immunité vis-à-vis du virus WN parmi les Israéliens, notent les chercheurs.
Selon eux, le virus WN a pu rentrer aux Etats-Unis par de nombreuses voies possibles : l’arrivée de voyageurs infectés, l’importation illégale d’oiseaux ou d’animaux domestiques, des moustiques infectés, des tiques.
Dans la mesure où il n’est pas possible de prédire si le virus WN réapparaîtra en l’an 2000, les différents acteurs du système de santé publique doivent être préparés à cette éventualité, concluent-ils.
Source : Science, 17 décembre 1999, vol.286, 2331-3, 2333-6 et New York Department of Health.
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