Les Trioxaquines : une nouvelle classe de molécules pour lutter contre le paludisme
Des chercheurs toulousains du laboratoire de Chimie de Coordination du CNRS ont synthétisé une nouvelle classe de molécules actives contre le paludisme. Dénommées Trioxaquines, elles sont très actives in vitro contre des souches de Plasmodium falciparum résistantes à la chloroquine. Leur évaluation chez l'animal est en cours.
Le bilan des travaux de l'équipe de Bernard Meunier sur la synthèse des Trioxaquines vient d'être publié dans la nouvelle revue ChemBioChem. Ce résultat constitue une avancée prometteuse dans la lutte antipaludique. Comme le rappellent les auteurs dans leur publication, le paludisme est la cause de 1 à 2,5 millions de décès chaque année dans le monde.
Un problème essentiel de la lutte antipaludique est l'apparition de souches de Plasmodium multirésistantes, notamment à la chloroquine, médicament bon marché utilisé depuis 40 ans.
D'autres médicaments actifs sont disponibles, mais leur toxicité relative rend leur utilisation délicate. D'autres antipaludéens, comme les dérivés de l'artémisinine (artéméther) sont dérivés de l'Armoise amère ordinaire, une plante d'origine chinoise et vietnamienne, ce qui rend l'approvisionnement coûteux et aléatoire, souligne un communiqué du CNRS.
La lutte contre le paludisme est un réel enjeu sanitaire, qui a conduit l'OMS à engager le programme "Roll Back Malaria" en 1998.
Les Trioxaquines sont des molécules "chimériques", c'est à dire formées par l'association de deux fragments distincts : un motif trioxane lié à moitié aminoquinoline. Selon les chercheurs, "Ce concept de molécules modulaires combine une entité peroxyde agissant comme un agent alkylant potentiel et une entité aminoquinoline qui est connue pour pénétrer facilement dans les érythrocytes infectés".
Cette forme de bithérapie covalente a permis d'obtenir des composés très actifs in vitro contre des souches de P. falciparum résistantes à la chloroquine. Les IC 50 des composés testés, mesurées à 72 heures sur des souches en culture, sont comprises entre 10 et 20 nM. Ces résultats suggèrent que le trioxaquines pourraient lutter contre les formes de P. falciparum résistantes à la chloroquine.
La synthèse de ces molécules est relativement aisée et leur coût de fabrication devrait être inférieur à celui des dérivés de l'artémisinine.
Le CNRS a souligné dans un communiqué de presse que ces premiers résultats sont jugés "très prometteurs" et que "les études sur les activités biologiques des trioxaquines chez l'animal sont en cours".
Par ailleurs, cette nouvelle classe d'antipaludéens a été brevetée par le CNRS. Le développement pré-clinique des trioxaquines sera réalisé par PALUMED S.A., une nouvelle société récemment créée à Toulouse.
Source : CNRS. ChemBioChem 2000;1(4):281-283.
Descripteur MESH : Médecine , Médecine tropicale , Pharmacologie , Chloroquine , Paludisme , In vitro , Chimie , Lutte , Association , Érythrocytes