« La deuxième vague arrive plus vite que nous le redoutions » prévient le président du CNOM
Le président du Conseil National de l’Ordre des Médecins est sorti d'un long silence médiatique à l’occasion d’une interview tranchante dans le Journal du Dimanche. Il lance un avertissement clair. « Si rien ne change », la France devra affronter « une épidémie généralisée » avec « un système de santé incapable de répondre à toutes les sollicitations »
Son message se veut une critique positive, mais ferme de la politique sanitaire mise en œuvre face à l’épidémie de Coronavirus SARS COV 2.
Un système de santé structurellement carencé et largement éprouvé par la première vague du printemps
Quand il évoque la première vague, il décrit un miracle, où les professionnels de santé ont réussi à pallier les carences structurelles d’un système de santé fragile au prix d’une déprogrammation des soins pour les patients atteints d’un cancer ou souffrants de maladies chroniques. Il redoute que cette fois beaucoup de personnel ne soit plus à même de tenir le choc d’une seconde vague.
« Beaucoup sont épuisés, traumatisés. On ne sort pas indemne d’une confrontation quotidienne avec la mort. »
Il dénonce une mauvaise répartition de la demande de soins et des situations ubuesques où des médecins libéraux ont été privés d’accès à leurs patients dans certains Ehpad.
« Ce qui a manqué en mars et avril, c’est la coordination, une stratégie protocolisée et des moyens de protection pour les soignants. »
Et sans une meilleure coordination entre la ville et l’hôpital, il prophétise un nouvel embouteillage aux centres 15.
D’autant plus que pour le président du CNOM, si l’épidémie se généralise à toutes les régions, il n’y aura cette fois-ci pas de base arrière dans laquelle puiser.
Une technostructure qui manque d'anticipation
Le bilan de la première vague n’a pas été fait. « On n’a pas assez anticipé ! Le Ségur de l’hôpital a éclipsé le Covid. » S’il regrette qu’aucun processus de retour d’expérience venant du terrain n’ait été mis en œuvre, il pointe également le manque d’anticipation sur le nombre de lits non seulement en réanimation, mais également dans les services de médecine.
Pour lui le manque d’anticipation est clairement imputable à la « technostructure du ministère de la Santé et son fameux plan blanc ! ». Le Dr Bouet milite pour l’institution d’un « comité de pratique centré la logistique, le concret, et de le doter d’une déclinaison au niveau de chaque département »
Et lorsqu’il porte son analyse sur la situation actuelle, il décrit des généralistes sous tensions, submergés de demandes injustifiées de tests et de certificats, des médecins qui font de leur mieux pour apaiser l’angoisse de leurs patients eux-mêmes confrontés à des injections contradictoires et donc d’autant plus anxiogènes. Il considère que le dépistage sans ordonnance est une erreur et semble regretter la médiatisation sur les plateaux télé de controverses scientifiques usuelles pour les médecins mais troublantes pour les profanes.
« Le dépistage pour tous, sans ordonnance, a été une faute majeure. »
Enfin évoquant les questions éthiques liées à cette épidémie et notamment l’idée qu’il ne faudrait pas sacrifier l’économie ou la liberté sur l’autel sanitaire, il met clairement en garde les médecins. « Jamais un médecin ne doit accepter l’injonction de la société qui lui imposerait de ne pas prendre en charge un patient. » Car c’est bien en ces termes inacceptables que se traduirait tôt ou tard la non-maitrise de l’épidémie pour les urgentistes ou les réanimateurs.
Crédit Photo : CNOM
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