Thérapie génique : la FDA interrompt deux essais cliniques après la mort d’un patient
Après le décès d’un patient qui participait à un essai de phase I de thérapie génique à l’Université de Pennsylvanie (Philadelphie), la Food and Drug Administration a décidé l’interruption temporaire de deux autres essais de thérapie génique basés sur un protocole similaire.
C’est la première fois qu’un malade inclus dans une étude de thérapie génique décède des suites directes de l’administration du vecteur viral porteur d’un gène d’intérêt.
Jesse Gelsinger, âgé de 18 ans, est mort quatre jours après avoir reçu dans le foie un adénovirus recombinant. Il était atteint d’un déficit en ornithine transcarbamylase (OTC), grave maladie génétique liée au chromosome X dans laquelle, du fait d’une anomalie enzymatique dans le cycle de l’urée, on observe une hyperammoniémie. Le traitement standard consiste à limiter l’apport protéique et en supplémentation en arginine.
Ce jeune patient participait à une étude de phase I évaluant l’administration, via un cathéter monté en position intrahépatique artérielle, d’un adénovirus porteur du gène OTC. Les patients étaient des hommes post-adolescents et des femmes adultes porteuses du défaut génétique.
Cet essai clinique a été conduit, sous la direction du Pr James Wilson, à l’Institute for Gene Therapy de l’Université de Pennsylvanie (Philadelphie).
Essai de phase I à dose croissantes
Le patient décédé était le 18e participant volontaire d’une étude évaluant des doses croissantes de l’adénovirus recombinant. Il a donc reçu une quantité de virus génétiquement modifié plus importante que d’autres patients inclus dans cet essai.
Il avait reçu l’adénovirus recombinant le 13 septembre et avait rapidement fait un ictère avec défaillance multiviscérale. Il fut alors mis sous hémodialyse et ECMO (extra corporeal membrane oxygenation), une technique sophistiquée expérimentale permettant le support ventilatoire de sujets ne pouvant plus bénéficier des techniques habituelles. Les examens ayant montré une diminution de la perfusion cérébrale, l’équipe soignante, a arrêté toute intervention médicale chez le patient comateux, avec l’accord de la famille.
Les résultats de l’autopsie devraient être disponibles dans deux semaines, l’ensemble des conclusions sur cet accident thérapeutique étant attendu pour le mois prochain.
Réaction inflammatoire
Il est fort probable que le patient décédé a développé une violente réaction inflammatoire au vecteur viral utilisé. On sait en effet, notamment depuis les premiers essais d’adénovirus recombinants chez des patients atteints de mucoviscidose (contenant le gène de la protéine CFTR), que l’administration de vecteurs adénoviraux entraînent une réponse locale inflammatoire cellulaire dose-dépendante, légère et transitoire.
En 1993, un patient atteint de mucoviscidose avait développé une inflammation sévère après instillation intratrachéale d'une solution d'adénovirus recombinants. La définition de la fenêtre thérapeutique entre efficacité biologie et toxicité est ainsi reconnu, depuis plusieurs années, comme un aspect important du transfert de gène par adénovirus recombinant.
Aucun des 17 autres patients participants à ce même essai n’ont connu de problème clinique suite à l’administration intra-artérielle du vecteur viral recombinant.
En particulier, Jesse avait reçu la même dose que la personne qui le précédait sur la liste des patients, en l’occurrence une jeune fille de 19 ans qui, elle, n’a pas développé de symptômes et chez laquelle une diminution de 50% de sa capacité à excréter l’ammoniac à été observée, précise l’Université de Pennsylvanie dans un communiqué adressé aux familles de patients atteints de déficit en OTC.
Principe de précaution
La FDA a décidé vendredi de demander au laboratoire Schering-Plough de suspendre temporairement l’inclusion de nouveaux patients dans deux essais cliniques de thérapie génique basés sur l’utilisation d’un adénovirus génétiquement modifié. La première étude concerne des patients atteints de cancer hépatique, la seconde porte sur des malades souffrant de cancer colorectal. Tous ces patients ont un cancer métastasé.
Les vecteurs viraux recombinants employés par Schering-Plough (Madison, New Jersey) sont cependant différents de ceux utilisés à l’Université de Pennsylvanie dans la mesure où ils véhiculent le gène suppresseur de tumeur p53. Ils sont cependant également administrés par voie artérielle intrahépatique.
La firme pharmaceutique a indiqué, qu’en accord avec la FDA, que les 60 patients ayant déjà reçu les premières doses d’adénovirus recombinant continueront à recevoir la thérapeutique génétique expérimentale. Elle ajoute, qu’à ce jour, environ 200 patients ont reçu le gène p53 via un vecteur adénoviral.
La décision de la FDA ne concerne pas d’autres essais en cours de thérapie génétique qui font appel à de moindres doses d’adénovirus ou qui font appel à un autre mode d’administration.
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