La sidération myocardique reproduite chez des souris transgéniques
Des cardiologues et des biologistes moléculaires américains ont développé un modèle de souris transgénique qui reproduit les anomalies fonctionnelles et biochimiques caractéristiques de la sidération myocardique. Publiés dans Science, leurs résultats suggèrent de nouvelles approches thérapeutiques pour lutter contre cette altération prolongée, mais transitoire, de la contractilité après une agression ischémique aiguë suivie de reperfusion.
Né de l’expérimentation animale, le concept de sidération myocardique a été introduit en 1982 en clinique humaine dans le sillage des techniques de reperfusion de la phase aiguë de l’infarctus du myocarde.
Eugene Braunwald désigne alors sous le nom de sidération myocardique (‘stunned myocardium’) la persistance, malgré la restauration du flux coronaire, d’une dysfonction myocardique spontanément réversible dans un territoire du muscle cardiaque soumis à une agression ischémique aiguë.
La sévérité de la sidération myocardique dépend essentiellement de la durée et de la profondeur de l’ischémie qui précède. Elle est documentée par l’échocardiographie de stress et les méthodes isotopiques (scintigraphies, tomographie par émission de positons).
Ce trouble de la viabilité myocardique s’observe avant tout dans l’infarctus aigu du myocarde après reperfusion spontanée, thrombolyse ou angioplastie. La récupération de la contractilité du myocarde sauvé par la reperfusion est alors retardée, le myocarde restant " sidéré " pendant des heures, des jours, des semaines, voire des mois.
La sidération peut également se produire dans les suites d’une angioplastie, dans l’angor instable avec répétition de la séquence ischémie-reperfusion, dans les suites d’une épreuve d’effort (sidération post-exercice) ou d’une circulation extra-corporelle.
Les mécanismes physiopathologiques de la sidération myocardique restent mal connus. On sait cependant que l’anomalie clé est la moindre sensibilité des myofilaments au calcium et un découplage entre l’excitation cardiaque et la contraction au niveau des myofilaments. De plus, il a été récemment montré que ce dysfonctionnement myocardique s’accompagne chez l’homme d’une protéolyse partielle de la troponine 1 (Tn1), protéine contractile régulatrice des minces filaments.
Anne Murphy et ses collaborateurs de la Faculté de médecine de l’Université Johns Hopkins (Baltimore, Maryland) ont créé des souris transgéniques exprimant le principal produit issu de la dégradation de la troponine 1. Baptisé Tn1 1-193, il s’agit d’un fragment comportant 17 acides aminés de moins que la protéine native à son extrémité carboxy-terminale.
Les lignées de souris exprimant le fragment Tn1 1-193 dans leur tissu cardiaque ont présenté une dilatation ventriculaire, une contractilité myocardique diminuée et une moindre réponse des myofilaments au calcium.
La protéloyse de la troponine 1 (Tn1) apparaît ainsi sous-tendre la pathogénèse de la sidération myocardique, trouble de la contractilité myocardique qui se rencontre beaucoup plus fréquemment que dans les cardiomyopathies héréditaires.
Ces résultats renforcent le concept selon lequel " des modifications post-traductionnelles de protéines impliquées dans le couplage excitation-contraction pourraient jouer un rôle clé dans des situations comme l’ischémie ou l’insuffisance cardiaque ".
Ils suggèrent qu’un traitement de la sidération myocardique " devrait avoir pour but d’empêcher ou de compenser l’anomalie des myofilaments que l’on observe chez les souris exprimant Tn1 1-193 ", concluent les auteurs.
Source : Science, 21 janvier 2000, Vol.287, 488-90.
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