Viol et infection à VIH : l'expérience lyonnaise du traitement prophylactique antirétroviral
Des médecins lyonnais ont rapporté à la 39e ICAAC leur expérience de l’utilisation des trithérapies anti-VIH sur la plus grande cohorte mondiale de patients victimes d’agressions sexuelles, confirmant la faisabilité de la mise en oeuvre d’un tel traitement par des médecins légistes aux urgences.
Depuis le 24 juillet 1997, un traitement prophylactique antirétroviral est administré aux urgences de l’hôpital Edouard Herriot de Lyon aux victimes de viols survenus dans l’agglomération lyonnaise. La trithérapie anti-VIH utilisée dans les 48 heures suivant l’agression associe AZT, 3TC et indinavir. Une consultation est assurée par un spécialiste de l’infection à VIH dans les deux jours.
“Au total, 65 personnes victimes de viols, âgées de 18 à 50 ans, ont été reçues aux urgences entre juillet 1997 et fin septembre 1998. On a recensé 62 femmes et 3 hommes. Dans 26,6% des cas, des lésions génitales ou anales ont été observées. Cette série de 65 victimes d’agression sexuelle prises en charge par trithérapie ait à ma connaissance la plus importante au monde”, indique le Dr Jean-Michel Livrozet, spécialiste en immunologie clinique à l’hôpital Edouard Herriot (Lyon). L’an dernier, à Genève, une communication sur ce thème avait été présentée à la conférence internationale sur le sida mais n’avait porté que sur 9 patients.
Sur ces 65 victimes, 6 étaient des toxicomanes et 13 avaient déjà été violées. L’agresseur, parfois un proche de la victime, était connu dans 28 cas (43%). Trente pour cent des viols ont eu lieu au domicile de la victime, 30% chez l’agresseur, et 5% dans des voitures. Dans 8 viols, un préservatif avait été utilisé par l’agresseur dans l’intention de pas laisser d’indices à la police scientifique.
Neuf victimes se sont présentées à la police plus de 48 heures après leur agression et de ce fait n’ont donc pas reçu de traitement prophylactique antirétroviral après exposition possible au VIH.
Une trithérapie anti-VIH a finalement été administrée à 35 victimes (53,8%) dont seulement 19 (54%) se sont présentées à la consultation de suivi dans le service d’immunologie clinique où on leur propose une sérologie pour le VIH, les virus des hépatites B (VHB) et C (VHC) et la syphilis.
Ce faible taux suivi sérologique s’explique surtout par le désir des victimes d’effacer le traumatisme subi de leur mémoire. Il est néanmoins supérieur à ce qui a été observé en 1990 à Charlestown en Virginie et en 1995-97 à Seattle (Etat de Washington) avec de suivi sérologique accepté dans respectivement 31% et 26% des cas.
A Lyon, aucun des 15 patients ayant eu un suivi sérologique n’a séroverti après trois mois.
“A ce jour, nous avons recensé au total à Lyon près de 130 agressions sexuelles depuis juillet 1997. Aucune séroconversion n’a été observé chez les victimes qui ont accepté un suivi sérologique”, précise le Dr Livrozet qui ajoute qu’une trithérapie anti-VIH est maintenant “systématiquement prescrite par les médecins légistes dans les 48 heures qui suivent un viol”.
Plusieurs cas de séroconversion pour le VIH ont été rapportés après un viol dans la littérature. Le premier cas, publié dans le British Medical Journal (BMJ), remonte à 1989.
Plusieurs cas de séroconversion pour le VIH ont été rapportés après un viol dans la littérature. Le premier cas, publié dans le British Medical Journal (BMJ), remonte à 1989. Source : 39th ICAAC (Interscience Conference on Antimicrobial Agents and Chemotherapy), San Francisco, un congrès de l’American Society for Microbiology. 26-29 septembre 1999.
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