Papier versus air pulsé : une étude fait le point sur les risques de contamination bactérienne en fonction des méthodes de séchage des mains
Une nouvelle étude multicentrique dans le monde réel a mis en évidence que les sanitaires sont associés à une contamination bactérienne significativement moindre lorsqu’ils sont équipés d’essuie-mains en papier, par rapport à des sèche-mains à air pulsé.
L’étude, dirigée par le Professeur Mark Wilcox de l’Université et du Centre hospitalier universitaire de Leeds, a été menée en France, en Italie et au Royaume-Uni. Son objectif : examiner l’étendue de la contamination environnementale par des pathogènes bactériens potentiels dans des sanitaires hospitaliers, en fonction des méthodes de séchage des mains utilisées. Des bactéries antibiorésistantes – dont des SARM et des entérocoques résistants aux bêta-lactamases à spectre élargi – ont ainsi été détectées en plus grandes concentrations dans les sanitaires dotés de sèche-mains à air pulsé.
« Ces conclusions vont avoir d’importantes implications quant au choix de la méthode de séchage des mains dans les établissements hospitaliers, et devraient particulièrement interpeler les médecins et infirmiers en charge de la prévention et du contrôle des infections, les directeurs de l’approvisionnement et tous les responsables attachés à la minimisation des infections croisées, » a confié le Professeur Wilcox.
Le plan de l’étude a été conçu et exécuté de manière indépendante par des chercheurs scientifiques au sein de trois établissements différents : le Professeur Wilcox du service d’infirmerie générale de Leeds (Centre hospitalier universitaire de Leeds), Royaume-Uni ; le Professeur Frédéric Barbut du service de contrôle des infections de l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), Paris, France ; et le Professeur Silvio Brusaferro du service de médecine du centre hospitalier universitaire d’Udine, Italie.
L’étude a comparé deux sanitaires par établissement : l’un équipé d’essuie-mains en papier et l’autre, de sèche-mains à air pulsé. Pour les besoins de l’étude, une seule méthode de séchage des mains était disponible dans chaque sanitaire. Ces sanitaires étaient fréquentés à la fois par le personnel hospitalier, les patients et les visiteurs. Un plan croisé a ensuite comparé les niveaux de contamination dans chacun d’eux, sur une période de 12 semaines. Durant l’étude, 120 sessions d’échantillonnage ont été totalisées dans chacun des trois établissements. Cette étude indépendante a été conduite en 2017 et a fait l’objet d’une subvention de l’ETS.
Présence de microorganismes résistants aux antimicrobiens
L’étude a mis en évidence la présence des bactéries suivantes : Staphylococcus aureus sensibles et résistants à la méticilline (respectivement, SASM et SARM), entérocoques et entérobactéries, dont des bactéries productrices de bêta-lactamases à spectre élargi.
Principales conclusions
De manière générale, il a été constaté que la contamination bactérienne était moindre dans les sanitaires utilisant des essuie-mains en papier comparativement à ceux équipés de sèche-mains à air pulsé. Par ailleurs, sur les trois sites, les chercheurs ont détecté des taux de détection bactérienne significativement plus élevés sur la surface externe des sèche-mains à air pulsé par rapport aux essuie-mains en papier (valeur médiane : 100-300 versus 0-10 unités formant colonies (UFC) respectivement ; p < 0,0001 pour tous). Si l’étude a révélé des niveaux de contamination similaires en France et Royaume-Uni, elle a en revanche mis en évidence des taux notablement plus bas dans les sanitaires italiens. Ce résultat s’expliquerait par une plus faible fréquentation et des pratiques de nettoyage différentes.
Les trois sites ont révélé des différences. Ainsi, au Royaume-Uni et France, des taux bactériens significativement plus élevés ont été décelés sur les sols des sanitaires équipés de sèche-mains à air pulsé (valeur médiane : 24 versus 191 UFC, p < 0,00001). Au Royaume-Uni, la présence de SASM s’est par ailleurs avérée trois fois plus fréquente, avec des concentrations six fois supérieures constatées sur les surfaces des sèche-mains à air pulsé, comparativement aux surfaces des essuie-mains en papier (p < 0,0001 pour les deux).
« Dans les sanitaires britanniques, la surface des sèche-mains à air pulsé et les sols juste en dessous ont révélé la présence de bactéries SARM à une fréquence trois fois plus élevée (21 versus 7 UFC) par rapport aux sites respectifs dotés d’essuie-mains en papier, » a expliqué Mark Wilcox concernant sa partie de l’étude menée au service d’infirmerie générale de Leeds. « Une concentration significativement supérieure de bactéries productrices de bêta-lactamases à spectre élargi a également été constatée sur les sols des sanitaires utilisant des sèche-mains à air pulsé, en comparaison aux essuie-mains en papier. »
Le Professeur Frédéric Barbut a aussi fait part des résultats enregistrés à l’hôpital Saint-Antoine, AP-HP : « En France, nous avons observé des différences significatives au niveau de la contamination bactérienne entre les deux méthodes de séchage des mains. Des concentrations supérieures de bactéries ont été constatées sur les sols et les surfaces des systèmes de séchage des sanitaires équipés de sèche-mains à air pulsé, par rapport aux sanitaires dotés d’essuie-mains en papier. Nous avons notamment découvert des taux deux fois plus élevés de bactéries productrices de bêta-lactamases dans les échantillons de poussière issus des sèche-mains à air pulsé, comparativement aux essuie-mains en papier. »
Enfin, à propos de son expérience à l’hôpital italien d’Udine, Silvio Brusaferro, Professeur d’hygiène et de santé publique, a souligné l’importance de sélectionner une méthode de séchage des mains minimisant la propagation des microorganismes. « Nous avons constaté que la dispersion des microorganismes était 25 fois plus élevée avec les sèche-mains à air pulsé qu’avec les essuie-mains en papier, » a-t-il déclaré. « En Italie, le personnel de contrôle des infections tend à éviter le recours aux essuie-mains à air pulsé dans les hôpitaux. »
Des conclusions qui viennent étayer les résultats des recherches précédentes
L’hygiène des mains est un élément fondamental de la prévention des infections. C’est pourquoi plusieurs études examinant l’implication de la méthode de séchage des mains dans la dissémination de pathogènes potentiels ont été menées. Ces études antérieures, dont certaines ont été conduites par le Professeur Wilcox et Keith Redway de l’Université de Westminster, avaient déjà démontré l’impact des sèche-mains électriques sur le risque de contamination virale et bactérienne de l’air et des surfaces. [i],[ii],[iii],[iv].
« Nous disposions déjà d’éléments probants issus de résultats en laboratoire ou in situ. Désormais, avec cette étude menée dans le monde réel, nous avons des données concrètes affirmant que les sèche-mains à air pulsé sont associés à des taux bactériens plus élevés, » a conclu le Professeur Wilcox. « Cette recherche démontre que les essuie-mains en papier représentent la méthode de séchage des mains la plus hygiénique et minimisent la prolifération des bactéries, dont les SARM, les entérobactéries et les entérocoques, suite à un passage aux sanitaires. »
À propos d’ETS
ETS (European Tissue Symposium) est l’organisation européenne des fabricants de produits papier à usage unique. Les membres d’ETS représentent la majorité des producteurs de produits papier à usage unique à travers l’Europe et près de 90 % de la production européenne totale de ouate de cellulose. ETS a été fondé en 1971 et est basé à Bruxelles. Plus d’informations sur www.europeantissue.com.
[i] Microbiological comparison of hand drying methods: the potential for contamination of the environment, user and bystander. E.L. Best, 1 P. Parnell,1 M.H. Wilcox 1,2 – Département de microbiologie, Old Medical School, Infirmerie générale de Leeds, Centre hospitalier universitaire de Leeds, NHS Trust1 & Université de Leeds, 2 Leeds LS1 3EX, Royaume-Uni. Journal Hospital Infection 2014 ; 88:199-206.
[ii] Comparison of different hand-drying methods: the potential for airborne microbe dispersal and contamination, Keith Redway (Département des sciences biomédicales, Faculté des Sciences et Technologies, Université de Westminster, Londres W1W 6UW, Royaume-Uni) et E.L. Best (Département de microbiologie, Old Medical School, Infirmerie générale de Leeds, Centre hospitalier universitaire de Leeds, NHS Trust, Leeds, Royaume-Uni). Journal Hospital Infection 2015 ; 89:215-217
[iii] Evaluation of the potential for virus dispersal during hand drying: a comparison of three methods – P.T. Kimmitt et K.F. Redway. Département des sciences biomédicales, Faculté des Sciences et Technologies, Université de Westminster, Londres, Royaume-Uni. Journal of Applied Microbiology 120, 478-486 © 2015
[iv] Pilot study to determine whether microbial contamination levels in hospital washrooms are associated with hand-drying method M.H. Wilcox E.L. Best, P. Parnell, Département de microbiologie, Centre hospitalier universitaire de Leeds, NHS Trust, et Université de Leeds, Leeds, Royaume-Uni. Journal Hospital Infection 2017 ; 97:200-2003
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