Maladie de Lyme : l'académie nationale de médecine prend position
Une polémique se développe et s’amplifie actuellement en France comme aux USA sur la Maladie de Lyme (ML). A l'issue de la séance qu'elle a consacrée le 20 septembre 2016 à ce sujet, l’Académie nationale de médecine tient à formuler les remarques et propositions suivantes :
1. La ML, au sens strict du terme, est une maladie infectieuse bien individualisée sur le plan microbiologique (Borrelia), épidémiologique, clinique, sérologique, même si les tests diagnostics sont, à ce jour, imparfaits. La sensibilité des Borrelia aux antibiotiques permet un traitement efficace à la condition de respecter posologies et durée, notamment dans les formes primaires. L’érythème migrant est suffisant pour porter le diagnostic, la confirmation sérologique n’est pas nécessaire. Les formes secondaires (phase de dissémination du germe) comportent de façon variable des localisations neurologiques, articulaires, cardiaques, cutanées…
2. Les difficultés peuvent apparaître à la phase tertiaire correspondant à une forme non diagnostiquée précocement et/ou non traitée, caractérisée par des signes le plus souvent objectifs cutanés, neurologiques ou articulaires. La réponse au traitement antibiotique est plus lente et plus aléatoire en raison d’une participation immunologique à l’origine de la symptomatologie.
3. Les controverses concernent surtout ce que certains appellent « Lyme chronique », ce qui correspond à une phase tardive et qu’il vaut mieux rapprocher des phases tertiaires de l’infection. Elles sont caractérisées par des signes cliniques le plus souvent subjectifs et persistants (douleurs articulaires, musculaires, céphalées, asthénie, troubles du sommeil, perte de mémoire…). Ce sont les données sérologiques parfois positives, ailleurs incertaines, voire négatives, qui conduiraient à incriminer la ML.
4. Le débat se dégrade si l’on tente d’intégrer dans la ML des tableaux neurologiques s’apparentant à des Scléroses en Plaques (SEP) ou des Scléroses latérales amyotrophiques (SLA), ou même à la maladie d’Alzheimer…que la sérologie soit positive, douteuse, voire négative !
5. Pour répondre à la question de fond concernant la responsabilité de la ML dans les « formes chroniques » plusieurs éléments doivent être soulignés :
- Il faut reconnaître le polymorphisme de la ML, qui en fait une infection complexe, à l’instar de ce qu’était en son temps une autre spirochettose, la syphilis.
- Même si les Borrelia sont extra et intra cellulaires, susceptibles de se modifier, d’échapper partielle-ment au système immunitaire, même si des réactions immunes éventuellement excessives peuvent survenir dans ces « formes tardives », on comprend mal pourquoi cette maladie infectieuse à germe sensible serait une exception, au point de nécessiter des mois de traitement ou davantage, des cures successives, ou des associations d’anti-infectieux avec des antiparasitaires ou des antifungiques ou avec des immunomodulateurs, prescriptions que certains préconisent.
- Les tests diagnostics sont certes imparfaits, mais la communauté internationale reconnaît la validité de certains d’entre eux, recommandés dans tous les pays, en Europe, y compris en Allemagne par les organismes officiels.
- Il faut rappeler qu’une sérologie positive vis-à-vis d’un germe ne témoigne que d’un contact antérieur avec ledit agent infectieux mais qu'elle n'est pas obligatoirement le signe d’une maladie infectieuse évolutive.
- L’efficacité supposée des traitements prolongés ou associant diverses molécules n’a jamais été démontrée dans la littérature scientifique. A contrario, une récente étude néerlandaise parue dans le New England Journal of Medicine a montré l’inefficacité et même les dangers des traitements prolongés dans ces « formes chroniques ».
- La multiplicité des Borrelia et l’existence d’autres agents infectieux transmis également par les tiques est à prendre aussi en considération.
Il importe jusqu’à preuve dûment et scientifiquement établie de rester dans les limites assignées à la maladie en faisant, en cas de doute, bénéficier le malade d’un traitement antibiotique selon les bonnes règles : choix, durée et posologie. La ML pourrait être une mauvaise réponse à une question légitime de malades qui souffrent, insatisfaits par la prise en charge de leurs troubles, qui veulent être écoutés et auxquels il serait donné de faux espoirs.
Il importe de progresser en proposant :
- la poursuite des recherches sur la responsabilité d’autres agents infectieux ;
- la mise au point et l’amélioration des différents tests de diagnostic ;
- surtout, la mise en place de protocoles thérapeutiques contrôlés, s’appuyant sur des choix rationalisés de molécules, versus placebo, avec des malades volontaires sélectionnés pour constituer des groupes homogènes et comparables. Cette démarche longue et difficile est à la fois raisonnable et éthique.
Voir le Dossier caducee.net sur la maladie de Lyme
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