Les statines : un progrès majeur dans la prévention cardiovasculaire

Les résultats de la Heart Protection Study (HPS) publiés dans le Lancet du 6 juillet montrent clairement que les statines peuvent réduire d’environ un tiers le taux d’infarctus du myocarde (IDM) et d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) dans plusieurs catégories de patients à risque et pas seulement les coronariens. Ces résultats pourraient conduire à une modification marquée de la pratique médicale pour la prévention cardiovasculaire, estime Richard Horton, le rédacteur en chef du Lancet.

Les statines ou inhibiteurs de la HMG-CoA réductase réduisent les concentrations en LDL-cholestérol et sont associés à une réduction de la mortalité coronarienne chez des patients à haut-risque, expliquent les membres de l’étude HPS dans leur article. Cependant, leurs effets chez d’autres patients à risque mais qui ne sont pas forcément coronariens sont moins connus.

L’essai HPS a été conduit auprès de 20.536 adultes de 40 à 80 ans. Ces patients présentaient une coronaropathie ou une autre artériopathie oblitérante ou étaient diabétiques. Après tirage au sort, les participants ont reçu 40 mg de simvastatine par jour ou un placebo. Le traitement était prévu pour cinq ans.

La mortalité globale était plus faible (p=0,0003) dans le groupe simvastatine (12,9 %) que dans le groupe placebo (14,7 %). Cette différence était imputable à un plus faible taux de décès coronariens avec la simvastatine (5,7 % vs 6,9 %, p =0,0005).

Par rapport au placebo, la simvastatine était associée à une réduction dans la survenue d’un premier des évènements suivants : - IDM non fatal ou décès coronarien : 8,7 % (simvastatine) vs 11,8 % -(placebo) ; p<0,0001 - AVC fatal et non fatal : 4,3 % vs 5,7 % ; p<0,0001 - Procédure de recanalisation : 9,1 % vs 11,7 % ; p<0,0001

Si l’on considère l’ensemble de ces évènements, la simvastatine permet de réduire leur incidence de 24 % par rapport au placebo avec 19,8 % des individus affectés dans le groupe simvastatine comparé à 25,2 % des individus du groupe placebo.

Les auteurs de l’étude HPS notent que ces bénéfices étaient similaires dans les différentes catégories de patients quelle que soit leur pathologie initiale, leur sexe ou l’âge > ou < à 70 ans.

Par ailleurs, ces bénéfices concernaient également les participants dont le profil de cholestérol était considéré normal (LDL-cholestérol <3,0 mmol/l ou cholestérol total <5,0 mmol/L).

Enfin, les bénéfices de la simvastatine s’additionnaient à ceux d’autres traitements comme l’aspirine, les bêta-bloquants ou les IEC. Le profil de sécurité de la simvastatine n’a pas posé de problème particulier mis à part un excès annuel de risque de myopathie de 0,01 %.

Selon les commentaires de Rory Collins (Université d’Oxford) qui a coordonné cet essai : « HPS montre sans équivoque que les statines peuvent produire un bénéfice substantiel dans une gamme de patients à haut risque beaucoup plus large que ce que l’on pensait. Ces nouveaux résultats concernent le traitement de centaines de millions de personnes dans le monde. Si maintenant 10 millions de personnes à haut risque commençaient un traitement par statine, cela sauverait environ 50.000 vies par an. De plus, on éviterait un nombre comparable d’IDM ou d’AVC ‘non fatals’ ».

Richard Horton, rédacteur en chef du Lancet estime que ces données sont « les résultats les plus importants et de loin les plus aboutis que nous ayons vus dans une génération pour le traitement et la prévention des maladies cardiovasculaires et des AVC. Ils devraient aboutir à une modification marquée de la pratique médicale dans le monde entier ». Et d’ajouter que si l’on pensait jusqu’à présent que les statines étaient trop utilisées, les résultats de HPS laissent entendre qu’on pourrait dire plus tard qu’elles ne le sont pas assez.

Les conclusions marquantes de l’essai HPS font également l’objet d’un commentaire rédigé par Salim Yusuf (McMaster University, Hamilton, Canada) dans le Lancet.

Source : Lancet 2002;360:2-3, 7-22.

SR