Transmission du bacille de Koch d'un cadavre à son embaumeur
Des chercheurs américains rapportent le premier cas décrit à ce jour de transmission de Mycobactérium tuberculosis lors d'un embaumement, avec développement d’une tuberculose active chez l’embaumeur. Cette découverte devrait amener à renforcer les procédures d'hygiène en vigueur dans les établissements funéraires américains.
L'embaumeur, un homme de 45 ans vivant à Baltimore (Maryland), a pratiqué plus de 300 embaumements par an pendant 15 ans en portant toujours des gants et généralement un masque. Lors d'un contrôle de santé de routine, une radiographie thoracique a mis en évidence la présence d'adénopathies hilaire et para-trachéale droite ainsi qu'un infiltrat dans le poumon droit. La culture bactérienne sur la biopsie ganglionnaire a montré la présence de M. tuberculosis. L'IDR était positive (induration de 34 mm avec vésicules).
L'interrogatoire du patient a révélé qu'il souffrait de dyspnée depuis déjà six mois, mais n’avait pas de fièvre, frissons, sueurs nocturnes, toux, hémoptysie, perte de poids ou fatigue. Un traitement associant l'isoniazide, la rifampicine, le pyrazinamide et l'éthambutol a mis en route dès les résultats des examens bactériologiques.
Le cadavre était celui d'un patient de 35 ans atteint de sida et qui avait développé une tuberculose. La radiographie pulmonaire de l’embaumeur avait été réalisée 31 mois après le décès du patient VIH+.
L'enquête épidémiologique indique que ces deux patients n'ont pas été en contact avant la procédure d'embaumement. Il ne semble pas non plus avoir été exposé à une même source infectieuse de M. tuberculosis.
Surtout, l'analyse par biologie moléculaire du profil de restriction (RFLP) des souches de M. tuberculosis isolées chez ces deux individus montre clairement qu’elles sont identiques entre elles, et qu’elles différent de celles rencontrées dans la majorité des cas de tuberculose recensés à Baltimore. Ces résultats épidémiologiques et moléculaires indiquent donc que la transmission de la bactérie a très probablement eu lieu lors de la procédure d'embaumement.
Des études antérieures ont montré que le personnel chargé de l’embaumement présente une IDR positive deux fois plus souvent que les autres employés funéraires. Cette réaction à la tuberculine s'explique par le fait que le bacille tuberculeux peut rester infectieux jusqu'à 48 heures après embaumement du cadavre.
Des cas de transmission de M. tuberculosis avaient déjà été décrits après autopsie, un acte plus invasif que l'embaumement, mais la transmission de ce germe lors d'un embaumement n’avait jamais été rapportée dans la littérature.
Selon les auteurs, la contamination tient à la procédure même de l’embaumement. Ainsi, l'aspiration des fluides corporels et l'injection de produits conservateurs et désinfectants généreraient des aérosols potentiellement infectieux, susceptibles d’être inhalés par le personnel.
Les procédures d'hygiène et de prévention des maladies nosocomiales édictées par le Centre de contrôle de maladies d’Altlanta (CDC) et l'OSHA (Occupational Safety and Health Administration) ne s'appliquent pas de façon spécifique aux établissements funéraires. Des efforts y doivent être entrepris afin de prévenir la transmission de M. tuberculosis, concluent le Dr Timothy Sterling et ses collègues de la Division des maladies infectieuses de la Faculté de médecine Johns Hopkins de Baltimore.
Source : The New England Journal of Medecine, 27 janvier 2000, Vol.342, 246-8.
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