Tuberculose : découverte du mécanisme de dissémination du bacille de Koch
Des chercheurs de l'Institut Pasteur de Lille ont découvert le mécanisme utilisé par la bactérie Mycobacterium tuberculosis pour traverser le poumon et gagner d'autres organes. Cette étape met en jeu une protéine de surface de la bactérie, l'HBHA (mycobacterial heparin-binding haemagglutinin adhesin), et les pneumocytes, les cellules épithéliales présentent à la surface des poumons. Ce résultat ouvrirait la voie à de nouveaux traitements contre la maladie.
"C'est la première fois que des chercheurs élucident le mécanisme de dissémination de l'agent pathogène responsable de la tuberculose", ont fait savoir L'Inserm et l'Institut Pasteur dans un communiqué commun. Aujourd'hui encore, la tuberculose tue chaque année environ trois millions de personnes et en infecte dix millions.
Lorsqu'une personne inhale la bactérie Mycobacterium tuberculosis, les germes infectieux viennent se loger dans les alvéoles pulmonaires. A ce stade, ils sont phagocytés par les macrophages où ils se multiplient. On pensait jusqu'à présent que Mycobacterium tuberculosis utilisait les macrophages pour atteindre les autres organes, les coloniser et ainsi aboutir à une tuberculose extra-pulmonaire.
Les travaux menés par l'équipe de Camille Locht (Unité Inserm 447 – Institut Pasteur de Lille) montrent que la bactérie utilise les pneumocytes pour franchir le poumon et se disséminer dans le corps. Ce groupe de recherche publie ces résultats dans la revue scientifique Nature du 12 juillet.
Cette équipe avait déjà montré que la protéine HBHA de Mycobacterium tuberculosis permettait l'adhésion de la bactérie aux cellules épithéliales, dont les pneumocytes.
Aujourd'hui, ces chercheurs apportent la preuve que la protéine HBHA est nécessaire à la dissémination extrapulmonaire. Il semblerait que cette protéine soit utilisée par la bactérie pour ce fixer sur les cellules épithéliales du poumon et les franchir. Néanmoins, les chercheurs n'excluent pas l'intervention d'autres cellules épithéliales dans le mécanisme de dissémination, comme les cellules épithéliales de la paroi des trachées.
Pour arriver à cette conclusion, le groupe de Camille Locht a utilisé des souches de Mycobacterium tuberculosis dépourvues de la protéine de surface HBHA. Ces souches adhèrent autant aux macrophages mais se fixent trois moins aux cellules épithéliales de poumon.
Une fois inoculées à des souris, ces bactéries sans HBHA éprouvent certaines difficultés à coloniser la rate mais pas le poumon : il y a 200 fois moins de bactéries dans la rate qu'avec les souches de Mycobacterium tuberculosis porteuses de HBHA. Les chercheurs ont montré que cette efficacité réduite était due à un problème de franchissement du poumon et non pas à une incapacité à coloniser la rate.
Il était donc tentant d'étudier l'effet d'anticorps dirigés contre HBHA. Les chercheurs ont injecté des anticorps monoclonaux dirigés contre cette protéine de surface à des souris infectées par une souche virulente. Les résultats étaient clairs : en bloquant l'interaction entre HBHA et les pneumocytes, ces anticorps ont empêché la dissémination. Seul le poumon était colonisé, pas la rate ni le foie.
Dans ce contexte, un blocage de la protéine HBHA constitue une alternative élégante pour la mise au point de traitements prophylactiques destinés à confiner l'infection au poumon. Par ailleurs, les chercheurs soulignent que Mycobacterium leprae, responsable de lèpre, porte elle aussi la protéine HBHA.
Source : Nature 2001;412:190-4. Institut Pasteur et Inserm.
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