Des cornées issues de la culture cellulaire permettent de redonner la vue à certains patients
Une nouvelle technique de culture de tissu biologique permet de restaurer la vue à des patients qui ne pouvaient être traités par une greffe conventionnelle de cornée. Cette technique consiste à construire un épithélium cornéen à partir de cellules souches limbiques cultivées sur une membrane amniotique. L'ensemble de ce nouveau tissu est alors greffé sur l'œil endommagé. Deux groupes de recherche viennent de publier leurs résultats sur ce nouveau type de tissu cornéen.
Une de ces études, menée par l'équipe du Dr Tsai (Chang Gung University, Taiwan), vient de paraître dans le New England Journal of Medicine (NEJM). Des travaux similaires conduits par les Drs I. Schwab et E. Isseroff (Université de Californie) ont été publiés dans la revue Cornea.
Les Drs R. Schwab E. Isseroff rappellent dans un éditorial du NEJM que l'opacification de la cornée est particulièrement handicapante et peut conduire sous certaines conditions à une cécité.
Cette opacification persistante peut être due à une perte des cellules souches responsables des processus de réparations des lésions de l'épithélium cornéen. Dans ce cas, la transplantation de cornée conventionnelle n'est pas efficace car elle ne permet pas de restaurer ces cellules souches indispensables au renouvellement continu de l'épithélium cornéen. Le Dr Schwab ajoute que "l'épithélium cornéen est entretenu par la réplication ordonnée de cellules souches situées dans la couche basale du limbe". L'absence de ces cellules souches conduit à une surface cornéenne anormale, qui ne peut pas être restaurée sans l'introduction de nouvelles cellules souches.
Une des approches développées consiste à "transplanter un segment du limbe chargé en cellules souches, soit par une autogreffe controlatérale ou plus récemment par une allogreffe…", souligne Schwab. Cependant cette technique nécessite le prélèvement de la moitié du limbe, ce qui peut léser le donneur.
Le Dr Tsai (Chang Gung University, Taiwan) et ses collègues décrivent justement dans le NEJM une nouvelle technique efficace qui permet de contourner ce problème. Ces auteurs ont prélevé des cellules épithéliales limbiques (seulement 2 mm2, ce qui préserve l'œil donneur) sur l'œil sain de 6 patients atteints d'une maladie cornéenne sévère. Ces cellules ont été mises en cultures sur une membrane amniotique (facilite l'épithélialisation), ce qui a permis de générer suffisamment de tissu pour autoriser une transplantation. Selon les résultats, l'épithélialisation a été un succès chez les 6 patients et la vision a été améliorée chez 5 d'entre eux.
La technique développée par R. Schwab E. Isseroff diffère légèrement. Ces auteurs ont procédé à une première culture cellulaire avant l'étape de multiplication sur la membrane amniotique. Cette première étape autorisait un stockage en vue d'une éventuelle utilisation ultérieure.
Au total 14 personnes ont été traitées : 4 ont reçu une allogreffe et 10 une autogreffe. La vision a été améliorée ou restaurée dans tous les cas d'allogreffe. Pour les 10 autres patients, l'évolution a été favorable pour 6 d'entre eux.
Néanmoins, R. Schwab E. Isseroff soulignent dans leur éditorial du NEJM que deux limitations essentielles subsistent. L'identification des cellules souches pose encore quelques difficultés et il faut de plus s'assurer qu'elles sont présentes en un nombre suffisant dans le tissu cellulaire cultivé pour pouvoir repeupler la surface oculaire. Ils ajoutent enfin que "la persistance des cellules souches du donneur et leur réintégration dans le limbe de l'œil receveur, reste à démontrer chez les patients qui ont reçu ce type de greffe".
Source : Communiqué de presse de l'University of California, Davis, Sacramentao. NEJM 2000;343:136-138
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