DIU : déconseillé en cas de risque accru de MST De récentes études suggèrent cependent que certaines femmes à risque d'infection puissent utiliser les DIU.
Les dispositifs intra-utérins (DIU) sont contre-indiqués ou peu souhaitables chez les femmes infectées par une maladie sexuellement transmissible (MST), notamment par le VIH, ou exposées au risque d'une telle maladie.
Le principal souci concerne les risques pour la santé de la femme et de son partenaire. Dans certains cas cependant, les DIU peuvent être efficaces, sans danger et souhaitables tant que la femme a accès aux examens et aux services médicaux indispensables.
A l'inverse des méthodes de barrière, les DIU ne protègent ni la femme ni l'homme contre les MST. Il faut donc toujours encou-rager les hommes ou les femmes atteintes du VIH à prévenir leurs partenaires de leur condition et à utiliser systématiquement le préservatif.
Selon les critères de recevabilité médicale établis par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour un emploi sans danger des contraceptifs, la pose d'un DIU au cuivre en forme de T n'est habituellement pas conseillée chez les femmes infectées par le VIH ou exposées à un grand risque d'infection.1 Si une femme séropositive utilise un DIU, on peut craindre que son système immunitaire soit affaibli et incapable de combattre d'autres infections comme une MST pouvant conduire à une maladie inflammatoire pelvienne (MIP). Cette inflammation de la partie supérieure du tractus génital féminin, très souvent causée par les bactéries Neisseria gonorrhoeae ou Chlamydia trachomatis, peut résulter en une douleur pelvienne chronique, une grossesse ectopique, l'infertilité et parfois même entraîner le décès de la femme.
Une récente étude menée au Kenya par des chercheurs de FHI et de l'université de Nairobi a cependant montré que les taux de complications à 1 mois, 4 mois ou 24 mois après la pose du DIU étaient comparables chez 156 femmes infectées par le VIH (y compris des sujets dont le système immunitaire était déprimé au moment de l'insertion) et chez 493 femmes non infectées.2 Par complications, les chercheurs entendaient MIP, retrait du DIU (à la suite d'une infection, de saignements ou de douleurs), expulsion du DIU ou encore grossesse.
«Les résultats n'ont suggéré qu'une faible augmentation des complications d'origine infectieuse (MIP, douleurs pelviennes ou retraits suite à une infection ou à des douleurs) avec une période d'utilisation du DIU supérieure à cinq mois», dit M. Charles Morrison, un épidémiologiste de FHI qui a conçu cette étude. «Les MIP étaient rares aussi bien chez les utilisatrices infectées par le VIH que chez les autres. Ces résultats suggèrent que le DIU puisse être un contraceptif sans risque pour certaines femmes atteintes du virus et bénéficiant constamment d'un accès à des services médicaux. Ils suggèrent également qu'on puisse continuer à proposer les DIU dans des régions où la prévalence du VIH est élevée.»
Les critères de l'OMS ont été publiés en 1996, antérieurement à cette étude menée au Kenya. Cependant, en attendant des travaux complémentaires pour clarifier ce point, l'OMS ne devrait pas changer de position à ce sujet et continuera à déconseiller l'emploi du DIU au cuivre chez les femmes infectées par le VIH, comme le souligne le docteur Patrick Rowe, responsable des affaires médicales au sein du département de la santé génésique et de la recherche de l'OMS.
Si l'on estime que les utilisatrices d'un DIU infectées par le VIH posent un risque particulier pour la santé de leurs partenaires sexuels, c'est parce que les dispositifs intra-utérins peuvent augmenter le flux menstruel (saignements abondants ou irréguliers). Et, théoriquement, un contact plus fréquent avec du sang infecté s'accompagne d'un risque plus élevé de contamination du partenaire. Il est aussi possible, toujours théoriquement, que les DIU favorisent la desquamation de cellules du col utérin infectées par le VIH, en exposant ainsi le partenaire sexuel à un risque accru.
Pourtant, selon l'étude menée au Kenya chez les femmes atteintes du VIH, quatre mois après l'insertion du DIU il n'y avait pas d'accélération de la desquamation des cellules cervicales par rapport à ce qui avait été observé avant l'insertion.3 Et, d'après les résultats d'une autre étude, -- la seule à évaluer les effets du DIU sur la transmission du VIH de la femme à l'homme, l'utilisation du dispositif intra-utérin ne semble pas favoriser la contamination par le virus. Parmi les 563 couples étudiés par les chercheurs, seul un homme sur 10 dont la partenaire habituelle était infectée par le VIH a été contaminé par le virus. Ce taux de transmission était similaire à celui relevé chez 86 hommes dont la partenaire atteinte du VIH n'employait ni le DIU ni aucun autre contraceptif.4 «Les données de ces études suggèrent que l'emploi du DIU par les femmes atteintes du VIH ne les rende pas plus contagieuses pour leur partenaire sexuel», dit Morrison.
Des études conduites auprès de quelque 1.400 femmes dans des centres de planification familiale en Tanzanie et d'environ 800 prostituées fréquentant un dispensaire pour MST au Kenya, suggèrent que, chez les femmes en bonne santé, l'emploi du DIU n'accroisse pas le risque de contraction du VIH par un partenaire sexuel infecté,5 -- bien que certains résultats de ces travaux demeurent contradictoires.
Pourcentage de femmes ayant développé une MIP après la pose d'un DIU | ||
Pays | Présence d'infection cervicale au moment de l'insertion | Absence d'infection cervicale au moment de l'insertion |
Kenya1 | 4,3% parmi 117 femmes |
1,3% parmi 670 femmes |
Kenya2 * | 3,1% parmi 32 femmes |
0,4% parmi 548 femmes |
Brésil3 | 5,2% parmi 19 femmes |
0,0% parmi 308 femmes |
* Infection cervicale diagnostiquée un mois après l'insertion du DIU. Notes
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Autres MST
Les femmes atteintes d'une infection cervicale, notamment d'une gonorrhée ou d'une chlamydiose, ont toujours un risque de MIP supérieur à celui des femmes non infectées, qu'elles soient utilisatrices ou non d'un DIU. Au nombre des femmes à haut risque d'infection cervicale figurent celles qui habitent dans une région où la prévalence de ces maladies est forte ainsi que celles dont les comportements sexuels sont dangereux. Il s'agit là, par exemple, de femmes ayant des partenaires multiples ou des relations avec un seul homme qui a lui-même des partenaires multiples.
«Chez les femmes recevant un DIU, celles présentant une infection cervicale semblent plus susceptibles de développer une MIP», dit Morrison. Comment expliquer cette légère augmentation du risque de MIP ? On pense que l'insertion du DIU peut disséminer dans l'utérus et dans les trompes les bactéries responsables de la MST cervicale, qui peuvent causer ultérieurement une MIP. Des études de l'OMS ayant porté sur quelque 23.000 poses de DIU ont montré que les utilisatrices de ce contraceptif ne contractent que rarement une MIP au-delà des 20 premiers jours suivant l'insertion. Le taux de MIP relevé peu après la pose était de 9,7 par 1.000 années-femmes. Ensuite, et jusqu'à huit ans après l'insertion, ce taux n'était que de 1,4 par 1.000 années-femmes d'utilisation.6 Le risque de MIP chez les femmes n'employant pas de DIU varie, surtout en fonction du degré de prévalence des MST dans la région.
De récentes études ont montré qu'environ 95 % des femmes ayant une infection cervicale ne développaient pas de MIP dans les mois suivant la pose d'un DIU. Il est néamoins souhaitable d'identifier les femmes présentant une telle infection ou un risque supérieur, car leur probabilité de contracter une MIP est plus élevé.
L'emploi du DIU est habituellement refusé aux femmes ayant une infection connue du col utérin. Selon les critères de recevabilité médicale de l'OMS en faveur d'une utilisation sans danger des contraceptifs, toute infection par une MST constitue une contre-indication à l'emploi du DIU. Il en est de même en cas d'antécédent de MST guérie depuis moins de trois mois. Et le DIU est en général considéré comme peu souhaitable chez une femme présentant un risque accru d'infection par les MST.7
Pourtant, comme le précise le docteur David Grimes, vice-président du département biomédical de FHI, la recherche actuelle indique que, pour certaines femmes, l'utilisation du DIU est peut-être inutilement proscrite. Par exemple, après la pose du DIU, la plupart des maladies inflammatoires pelviennes qui apparaissent chez les utilisatrices sont vraisemblablement transmises ultérieurement par des hommes porteurs de MST. «Si les critères internationaux recommandent aux utilisatrices d'autres moyens contraceptifs, qu'il s'agisse des pilules, des injectables, des implants ou de la stérilisation, de se protéger contre les MST grâce au préservatif masculin en latex, ces mêmes critères ne suggèrent pas cette double protection aux femmes porteuses d'un DIU», dit-il. «Ils proscrivent simplement l'usage des DIU et conseillent aux femmes d'opter pour un autre contraceptif.» Le docteur Grimes suggère de recommander aussi cet emploi simultané de deux méthodes contraceptives pour certaines utilisatrices du DIU.
Si certains prestataires ont pris conscience des questions soulevées par ces nouvelles études, ils continuent par prudence à appliquer les critères établis. «Au Kenya, la formation sur les DIU que nous dispensons aux étudiants et les pratiques actuelles reposent toujours sur les recommandations de l'OMS», indique le docteur Boaz Otieno-Nyunya, ancien chercheur invité de FHI aujourd'hui attaché à la Moi University d'Eldoret (Kenya). «Nous demeurons prudents.»
Network, 2000, Volume 20, Numéro 1 .
© Copyright 2000, Family Health International (FHI)
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