Comment améliorer la contraception d’urgence ?

La prolongation du délai et la prescription d’une dose unique figurent parmi les options actuellement à l’étude.  Afin d’améliorer la contraception d’urgence, les chercheurs s’efforcent de faciliter l’emploi des pilules en éliminant la nécessité d’une deuxième prise, de réduire les effets secondaires et de déterminer s’il ne serait pas possible de prolonger le délai de 72 heures qui est fixé à la mise en route de cette thérapie.

En contraception d’urgence, le traitement aux pilules progestatives est plus efficace et mieux toléré que celui qui fait appel aux pilules combinées.1 En outre, la mise sur le marché récente d’emballages spécifiquement conçus pour la contraception d’urgence facilite la prise des pilules progestatives. Les pilules progestatives destinées à la contraception d’urgence consistent en un comprimé contenant 0,75 mg de lévonorgestrel à prendre le plus rapidement possible après une relation non protégée, suivi 12 heures plus tard d’un second comprimé à teneur égale en lévonorgestrel.

Cette présentation, qui repose sur la prise de deux comprimés seulement, constitue une nette amélioration par rapport à l’utilisation de pilules progestatives formulées pour la contraception ordinaire. Pour absorber la dose nécessaire à la contraception d’urgence, il faut en effet avaler un grand nombre de pilules progestatives faiblement dosées. Une femme devrait ainsi prendre 20 comprimés progestatifs faiblement dosés (à raison de 0,0375 mg de lévonorgestrel par comprimé), puis répéter cette posologie 12 heures plus tard.

Peut-être pourrait-on encore améliorer le schéma posologique qui repose sur la prise d’une double dose. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) effectue actuellement une étude portant sur 4.000 femmes environ et qui vise à comparer l’efficacité contraceptive de l’administration d’une dose unique de 1,5 mg de lévonorgestrel à celle de deux doses de 0,75 mg chacune, prises à 12 heures d’intervalle, ainsi qu’à l’administration de 10 mg de mifépristone. Cette étude est actuellement en cours en Chine, en Finlande, en Géorgie, à Hong-Kong, en Hongrie, en Inde, en Mongolie, au Royaume-Uni, en Slovénie et en Suède.

Une autre étude en cours cherche à déterminer si la prise de deux doses de 0,75 mg de lévonorgestrel à 24 heures d’intervalle a une efficacité comparable à celle de deux doses espacées de 12 heures, conformément à la posologie classique. L’OMS réalise cette étude, censée prendre fin en 2002, en liaison avec l’association de planification familiale de Hong-Kong.

Par ailleurs, une étude effectuée récemment par le Population Council, dont le siège se trouve à New-York, a révélé que l’administration d’une dose unique de pilules combinées entraînait moins d’effets secondaires que la double dose normalement prescrite. (Cette étude, faite auprès d’environ 2.000 femmes, visait en outre à déterminer si le moment choisi pour administrer la première dose et l’emploi d’un progestatif différent, en l’occurrence le noréthistérone, affectaient l’efficacité du schéma posologique des pilules combinées.)2

Il était important d’étudier l’efficacité des pilules hormonales combinées ayant le noréthistérone comme progestatif, à la place du lévonorgestrel, parce que les contraceptifs oraux qui contiennent ce produit sont d’emploi très répandu dans le monde entier, et ils pourraient être utilisés aux fins de contraception d’urgence si le traitement hormonal combiné type ou la thérapie à base du seul lévonorgestrel n’étaient pas disponibles.

Lorsqu’il a étudié les modifications du traitement hormonal combiné, le Population Council a constaté que le taux d’échec contraceptif des pilules à base de noréthistérone était légèrement supérieur à celui des pilules contenant du lévonorgestrel. « Les résultats indiquent que les femmes devraient prendre les pilules combinées classiques ou les comprimés contenant uniquement du lévonorgestrel si elles le peuvent », souligne Kelly Blanchard, la directrice de l’étude.

« Mais si elles n’ont pas accès à ces comprimés, il est clair que les contraceptifs oraux à base de noréthistérone sont eux aussi efficaces dans le contexte de la contraception d’urgence. Leur emploi pourrait représenter un gain de temps et d’argent pour les femmes. Parmi celles qui ont besoin d’une contraception d’urgence, beaucoup pourraient être en mesure d’utiliser les contraceptifs oraux qu’elles ont sous la main. »

Effets secondaires et moment d’intervention

Effets secondaires et moment d’intervention

La diminution des nausées et des vomissements, qui sont les effets secondaires les plus courants dont se plaignent les utilisatrices des pilules combinées, constitue un objectif important. En 1998, l’OMS a effectué parmi près de 2.000 femmes une étude comparative des pilules hormonales combinées et des pilules progestatives utilisées pour les besoins de la contraception d’urgence. Dans cette étude qui fait date, la moitié des utilisatrices des pilules combinées ont signalé nausées ou vomissements, contre le quart seulement des femmes sous progestatifs seuls. En outre, 19 % parmi les premières ont eu des vomissements, contre 6 % chez les secondes.3

Dans bien des pays, les pilules hormonales combinées demeurent la seule option en matière de contraception d’urgence par voie orale ; heureusement, un médicament couramment utilisé pour combattre le mal des transports, la méclizine, pourrait sans doute atténuer les effets secondaires de ce traitement. Une étude effectuée par FHI a révélé que la prise de méclizine une heure avant le début du traitement aux pilules combinées réduisait considérablement l’incidence des nausées (47 % des femmes qui avaient pris de la méclizine avaient souffert de nausées, contre 64 % de celles qui n’en avaient pas pris). En outre, la sévérité des nausées et l’incidence des vomissements étaient nettement plus faibles chez les sujets à qui l’on avait administré de la méclizine avant de commencer le traitement hormonal.4

L’étude faite par l’OMS en 1998 (la plus ambitieuse étude contrôlée randomisée de la contraception d’urgence qui ait jamais été faite au monde) a montré que plus les pilules étaient prises rapidement après une relation non protégée, plus elles étaient efficaces.

Dans cette étude, la prise de pilules progestatives dans les 24 heures suivant un rapport non protégé avait évité 95 % des grossesses attendues. Prises dans un délai de 49 à 72 heures, ces pilules empêchaient 58 % seulement des grossesses anticipées. La baisse de l’efficacité observée proportionnellement à l’adoption tardive de la contraception d’urgence était encore plus marquée dans le cas des pilules hormonales combinées, qui étaient moins efficaces que les pilules progestatives même si elles étaient prises peu après une relation non protégée. L’utilisation de pilules combinées évitait 77 % des grossesses attendues lorsqu’elles étaient prises dans un délai de 24 heures et 31 % seulement dans un délai de 49 à 72 heures après un rapport non protégé.5

Presque toutes les études sur l’efficacité de ces pilules ont été faites auprès de femmes qui les avaient prises dans un délai de 72 heures (3 jours), puisque c’est ce qu’on recommande actuellement. Il convient d’avertir les femmes qui adoptent cette méthode après plus de 72 heures que son efficacité pourrait être moindre.

De l’avis de certains chercheurs, toutefois, la première dose de pilules pourrait être prise jusqu’à quatre à cinq jours après une relation non protégée, en fonction de la date prévue de l’ovulation.6

L’étude que vient de terminer le Population Council a établi que l’utilisation des pilules hormonales combinées quatre à cinq jours après un rapport sexuel avait réduit le risque de grossesse de 50 % parmi les 108 femmes traitées. (L’efficacité de ce schéma posologique, indépendamment du moment de son adoption, était supérieure à celle qui avait été observée dans l’étude de l’OMS.)7

« Ces données nous portent à croire que la recommandation selon laquelle il convient de commencer la contraception d’urgence sous 72 heures impose des restrictions inutiles », fait observer Kelly Blanchard, la directrice de l’étude du Population Council.

« Certes, le traitement perd de son efficacité après 72 heures, mais il faudrait quand même le proposer aux femmes jusqu’à cinq jours après un rapport non protégé puisque le risque de grossesse pourrait encore être réduit de moitié. » On pense que les pilules pourraient prévenir la grossesse dans ce laps de temps en supprimant ou en retardant l’ovulation (la libération d’un ovule contenu dans l’ovaire) pendant que des spermatozoïdes viables sont encore présents.

Dans une étude connexe, des chercheurs canadiens ont constaté récemment que le taux de grossesse était nettement plus faible chez les femmes traitées jusqu’à cinq jours après un rapport non protégé que chez celles qui n’avaient pas bénéficié du tout de la contraception d’urgence. L’efficacité de la méthode oscillait entre 72 % et 87 % chez les quelque 170 femmes qui avaient été traitées dans un délai de trois à cinq jours après une relation non protégée.8

Les traitements dont on dispose permettent de prévenir en toute sécurité un grand nombre de grossesses inattendues. Mais d’autres produits pourraient tout aussi bien assurer une contraception d’urgence efficace. En tête de liste figure le médicament mifépristone, qui peut retarder l’ovulation quand il est administré pendant la phase pré-ovulatoire du cycle menstruel. Pris postérieurement à cette phase, il peut également bloquer la production de progestérone, hormone essentielle à la nidation.

Dans deux études conduites au Royaume-Uni et qui comparaient la prise d’une dose de 600 mg de mifépristone à la posologie typique des pilules combinées, dans un délai de 72 heures après une relation sexuelle, pas une grossesse n’a été enregistrée parmi les 550 sujets sous mifépristone. En revanche, neuf ont été dénombrées parmi les 550 femmes traitées aux œstroprogestatifs.9

Selon une étude multicentrique randomisée réalisée par l’OMS auprès d’environ 1.700 femmes, les taux de grossesse étaient comparables dans les trois groupes de femmes à qui l’on avait administré 600 mg, 50 mg et 10 mg de mifépristone dans les cinq jours suivant une relation sexuelle.10 Un consortium américain, le Consortium for Industrial Collaboration in Contraceptive Research, procède actuellement à l’analyse d’une étude pilote faite auprès de 400 Chinoises en vue de comparer l’efficacité contraceptive de la prise exclusive de 10 mg de mifépristone à l’administration de ce médicament, à posologie égale, en association avec l’anti-œstrogène tamoxifène, jusqu’à cinq jours après un rapport non protégé. On devrait connaître bientôt les résultats de l’étude de l’OMS faite auprès de 4.000 femmes et qui vise à comparer l’efficacité de trois méthodes de contraception d’urgence, en l’occurrence l’administration de 10 mg de mifépristone, l’administration de deux doses de lévonorgestrel de 0,75 mg chacune selon la posologie classique et l’administration d’une dose unique de 1,5 mg de lévonorgestrel.

-- Kim Best

Notes

  1. Task Force on Postovulatory Methods of Fertility Regulation. Randomised controlled trial of levonorgestrel versus the Yuzpe regimen of combined oral contraceptives for emergency contraception. Lancet 1998;352(9126):428-33.
  2. Ellertson C, Webb A, Blanchard K, et al. Three simplifications of the Yuzpe regimen of emergency contraception: results from a randomized, controlled, multicenter clinical trial. Unpublished paper. Population Council, 2000.
  3. Task Force on Postovulatory Methods of Fertility Regulation.
  4. Raymond EG, Creinin MD, Barnhart KT, et al. Meclizine for prevention of nausea associated with use of emergency contraceptive pills: a randomized trial. Obstet Gynecol 2000;95(2):271-77.
  5. Task Force on Postovulatory Methods of Fertility Regulation; Piaggio G, von Hertzen H, Grimes DA, et al. Timing of emergency contraception with levonorgestrel or the Yuzpe regimen. Lancet 1999;353(9154):721.
  6. Trussell J, Ellertson C, Rodriguez G. The Yuzpe regimen of emergency contraception: how long after the morning after? Obstet Gynecol 1996;88(1):150-54; Grou F, Rodrigues I. The morning-after pill -- how long after? Am J Obstet Gynecol 1994;171(6):1529-34.
  7. Ellertson.
  8. Rodrigues I, Grou R, Joly J. Effectiveness of emergency contraceptive pills between 72 and 120 hours after unprotected sexual intercourse. Am J Obstet Gynecol 2001;184(4):531-37.
  9. Glasier A, Thong KJ, Dewar M, et al. Mifepristone (RU 486) compared with high-dose estrogen and progestogen for emergency postcoital contraception. N Engl J Med 1992;327(15):1041-44; Webb AM, Russell J, Elstein M. Comparison of Yuzpe regimen, danazol and mifepristone (RU 486) in oral postcoital contraception. BMJ 1992;305(6859):927-31.
  10. Task Force on Postovulatory Methods of Fertility Regulation. Comparison of three single doses of mifepristone as emergency contraception: a randomised trial. Lancet 1999;353(9154):697-702.


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