Sexologie en Europe : une profession, des pratiques
Qui sont les professionnels qui travaillent dans le champ de la sexologie, en France et en Europe ? Quelle est leur formation et leur champ de compétence ? Pratiquent-ils le même métier en France, en Italie ou en Norvège ? Les résultats de l'enquête "Euro-Sexo" dirigée par Alain Giami de l'unité 569 Inserm et réalisée dans sept pays européens montrent des différences notables dans les pratiques et les formations, selon les pays. Ainsi, le nombre de sexologues par habitants est très élevé en Finlande et faible en Europe du Sud ; la majorité des sexologues travaillant en Europe sont des femmes non-médecins, sauf en France où la profession est plutôt masculine et médicale. Globalement ces derniers consacrent moins de 25% de leur activité professionnelle à la sexologie.
De nombreux changements sont en cours dans le champ de la sexologie, avec notamment l'arrivée sur le marché de traitements des dysfonctions érectiles prescrits uniquement sur ordonnance. De même, au niveau européen on connaît mal le profil et les qualifications des professionnels travaillant dans le champ de la sexologie et de la « sexualité humaine ». Qui sont ces professionnels désignés dans le langage courant sous le terme de « sexologues » et quelle est leur qualification ?
L'enquête Euro-Sexo a été menée dans 7 pays européens (Danemark, Finlande, France, Italie, Norvège, Royaume-Uni et Suède) à partir du protocole développé en France en 1999. Elle avait comme objectifs de décrire les sexologues et l'exercice de la sexologie, en analysant les caractéristiques socio-démographiques de ces professionnels, leur niveau de formation en sexologie, les conditions de leur exercice et leur identité professionnelle.
- Une densité forte dans le Nord de l'Europe, faible au Sud
Les résultats de l'enquête ont montré que le nombre de sexologues par million d'habitants varie fortement selon les pays, avec une densité beaucoup plus forte au nord de l'Europe qu'au sud. Soit de 13 sexologues par million d'habitants en France à 109 par million en Finlande.
- Des femmes, issues des professions de santé
La majorité des sexologues européens sont des femmes, issues des professions de santé (sauf médecins) : infirmières, sages-femmes, psychologues, conseillers conjugaux… La France représente une double exception puisque 62,7% des sexologues sont des médecins et 60% d'entre eux des hommes.
- Les deux tiers ont suivi une formation spécifique
Plus des deux tiers des sexologues (et surtout les non-médecins) ont suivi au moins une formation en sexologie et/ou en sexualité humaine. Au Danemark, en Finlande et en France cette proportion atteint 90%.
- Moins d'un quart de leur activité professionnelle consacrée à la sexologie
La majorité des sexologues exerçant en Europe consacrent en moyenne moins de 25% de leur activité à la sexologie. En revanche les non-médecins peuvent consacrer jusqu'à 75% de leur temps à la sexologie. Pour la plupart des répondants de l'enquête, la sexologie correspond à une formation complémentaire à leur activité principale dans le champ de la santé, souvent entreprise après plusieurs années d'exercice professionnel.
- Une identité professionnelle floue
Pour l'ensemble des pays étudiés, la majorité des sexologues ne se reconnaissent pas en premier lieu comme « sexologues » ou « sexothérapeutes », même si les non-médecins se décrivent ainsi plus volontiers que les médecins. 77% des non-médecins en France reconnaissent leur identité première de sexologue contre 65% des médecins. Pourtant les chiffres sont très hétérogènes entre les pays d'Europe, le titre de "sexologue" ne semblant pas apporter le même bénéfice selon les professions et les pays.
- Conclusion
L'usage du titre de "sexologue" n'est pas encore réglementé dans les pays étudiés ni en Europe de façon globale, en revanche des procédures d'habilitation, de validation de la formation et d'autorisation de pratiquer la sexologie ont été mises place récemment en France et dans les pays nordiques. L'exercice actuel de la sexologie en Europe repose donc sur des équilibres instables qui sont liés à sa diversité. « On peut donc se demander si à terme cette diversité pourra être préservée ou si les représentants des différentes professions s'organiseront pour développer leur propre structure de formation et de légitimation » précise Alain Giami, directeur de recherche à l'Inserm et coordonnateur de l'enquête.
- Source
« La profession de sexologue en Europe : diversités et perspectives communes ».
A. Giami, P. de Colomby*, groupe Euro-Sexo. * Inserm, U 569, Le Kremlin-Bicêtre, France
Sexologies : Revue Européenne de Santé Sexuelle 15 (2006)7-13, 29 mars 2006
( Numéro spécial : L'exercice de la sexologie en Europe , coordonné par Alain Giami)
- Annexes
Profil professionnel des sexologues, en France
Part de leur activité consacrée à la sexologie, en France
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