Une nouvelle stratégie de thérapie génique pour traiter les hémoglobinopathies
Une nouvelle technique de thérapie génique évaluée avec succès chez la souris pourrait permettre de traiter les hémoglobinopathies (drépanocytose, thalassémies) en introduisant l'allèle sauvage du gène directement dans les cellules hématopoïétiques. Cette technique fait appel à une présélection des cellules transfectées avant leur greffe chez le receveur.
Cette technique permet d'éliminer les problèmes d'expression des gènes transfectés dans les cellules hématopoïétiques. En effet, les gènes introduits dans les cellules souches sont généralement soumis à un phénomène d'inhibition de la transcription ou "silencing" : ces gènes restent muets et la synthèse de la protéine normale n'a donc pas lieu. Ce phénomène de silencing n'est pas toujours complet mais on note une diminution progressive de la synthèse de la protéine correspondante au cours du vieillissement. Ces deux phénomènes constituent deux handicaps majeurs pour l'application de la thérapie génique aux cellules souches.
Des chercheurs canadiens et américains rapportent dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences avoir mis au point un système capable d'éviter ces deux écueils. Leurs travaux ont permis l'expression durable de bêta-globine humaine dans les hématies des souris.
Les chercheurs ont développé un vecteur rétroviral complexe porteur de deux gènes particuliers : un gène codant pour la bêta-globine humaine et un gène codant pour la GFP (green fluorescent protein) qui servira de gène rapporteur.
Après avoir isolé des cellules hématopoïétiques, les chercheurs ont introduit le vecteur rétroviral dans ces cellules mises en culture. Les cellules transfectées de façon efficace ont été facilement repérées grâce à l'expression de la GFP (émission de fluorescence). Les auteurs ont alors sélectionné ces cellules transfectées en vue de les greffer chez des souris.
Ils ont ainsi montré que 100 % des souris greffées (n = 7) exprimaient la GFP et la bêta-globine humaine dans 20 à 95 % de leurs hématies. Cette expression a duré pendant plus de 9 mois après la transplantation, moment qui correspond à la dernière analyse réalisée. Les chercheurs précisent que ni la proportion d'hématies positives ni le niveau global d'expression n'ont diminué durant cette période.
Les niveaux d'expression étaient cependant très variables chez ces animaux et restaient en dessous d'un seuil optimum.
Ces recherches ont permis néanmoins de montrer que les phénomènes de silencing et de déclin de l'expression dans des cellules souches pouvaient être évités. Selon les auteurs, l'optimisation du vecteur rétroviral utilisé devrait permettre d'améliorer l'expression des gènes introduits. Des recherches basées sur ce type de vecteur devraient être particulièrement intéressantes pour le traitement des hémoglobinopathies par thérapie génique.
Les deux principaux auteurs de ces travaux sont le Dr Kalberer (British Columbia Cancer Agency, Vancouver) et le Dr Pawliuk (MIT, Cambridge). Les autres auteurs sont affiliés à l'Albert Einstein College of Medicine, à l'University of British Columbia et à l'Harvard Medical School Brigham & Women's Hospital de Boston.
Source : PNAS early edition "online before print" Vol.1 N°15 du 2 Mai 2000. L'article sera publié le 9 mai 2000 (PNAS. 2000;97(10):5411-15)
Descripteur MESH : Cellules , Hémoglobinopathies , Drépanocytose , Gènes , Cellules souches , Expression des gènes , Animaux , Boston , Fluorescence , Transplantation , Vieillissement