Les flavonoïdes pourraient induire des leucémies chez le nouveau-né
Une consommation élevée de flavonoïdes pendant la grossesse pourrait entraîner des leucémies aiguës chez l'enfant. Des chercheurs américains ont démontré que certains de ces composés naturels étaient des inhibiteurs de la topoisomérase II capables de conduire à des translocations retrouvées dans 80 % des cas de leucémies aiguës de l'enfant.
Ces travaux, publiés en avance sur le site du journal Proceedings of the National Academy of Sciences, ont été conduits par l'équipe les Drs Strick et Strissel et leurs collègues du Département de Médecine de l'Université de Chicago.
Les auteurs rappellent qu'environ 80 % des enfants de moins d'un an atteints de leucémie aiguë myéloïde (LAM) ou de leucémie aiguë lymphoblastique (LAL) présentent une translocation chromosomique impliquant le gène MLL. De plus, 5 à 15 % des patients cancéreux traités avec l'etoposide ou la doxorubicine développeraient une leucémie liée à la thérapie. En effet, ces anticancéreux sont des inhibiteurs de la topoisomérase II. Ils stabilisent les coupures de l'ADN générées normalement de façon transitoire par la topoisomérase II. Ce phénomène induit alors une translocation impliquant le gène MLL.
Le fait que les leucémies aiguës chez l'enfant et les leucémies induites quelquefois par des anticancéreux soient reliées à une translocation impliquant une même région de l'ADN semblait indiquer que les mécanismes biochimiques sous-jacents étaient identiques.
"Il est largement admis que les leucémies de l'enfant apparaissent in utero", précisent les chercheurs. La consommation de flavonoïdes naturels ou synthétiques a été évoquée comme une cause éventuelle de cette affection. De plus, on sait que "les flavonoïdes naturels traversent le placenta et sont retrouvés dans les tissus du fœtus".
Les scientifiques ont donc évalué l'effet de 20 flavonoïdes sur la topoisomérase II, sur le clivage de l'ADN et sur la translocation de la région chromosomique portant le gène MLL.
Ils ont ainsi montré que "10 flavonoïdes induisaient in vivo un clivage de l'ADN dans la région du gène MLL grâce à une inhibition de la topoisomérase II et selon un mécanisme similaire à celui de certains agents anticancéreux". Ce résultat a été confirmé par des mesures de l'activité catalytique de la topoisomérase II in vitro et par des expériences de clivages de l'ADN dans le noyau cellulaire.
Les chercheurs proposent un mécanisme d'action en 2 étapes. La première étape correspond à la formation d'un complexe [drogue : topoisomérase II : ADN]. Cette étape est réversible par une nouvelle ligation de l'ADN ou par un processus de réparation. Si la réparation n'a pas lieu, commence alors la deuxième étape, irréversible, qui correspond à l'accumulation de ces structures tertiaires qui déclenche l'apoptose.
Selon les auteurs, seule l'étape réversible du clivage de l'ADN de la région MLL conduit à une translocation chromosomique qui induit une leucémie.
Néanmoins, ces chercheurs rappellent que les bénéfices des flavonoïdes sont également largement documentés. "Par exemple, le Japon et d'autres pays de l'Asie montrent un faible taux de mortalité du cancer de la prostate comparé aux pays occidentaux". Ceci pourrait être le résultat d'une alimentation riche en flavonoïdes qui agiraient "comme des agents anticancéreux naturels".
Les auteurs concluent leurs travaux en précisant que "Bien que les flavonoïdes pourraient avoir un effet bénéfique dans certaines circonstances, notre étude suggère qu'une consommation importante de flavonoïdes pourrait causer des cassures de l'ADN dans la région MLL […] en inhibant la topoisomérase II". "Cet évènement conduirait à une translocation chromosomique induisant une leucémie chez l'adulte, l'enfant et surtout chez le nourrisson".
Source : PNAS early edition published online before print. "Dietary bioflavonoids induce cleavage in MLL gene and may contribute to infant leukemia". Strick, R., Strissel, P. L., Borgers, S., Smith, S. L. & Rowley, J. D.
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