L'analyse des liquides corporels permettrait de détecter certains cancers
Des chercheurs de la John Hopkins University School of Medicine viennent de démontrer qu'il est possible de détecter certains cancers en analysant l'ADN mitochondrial contenu dans les urines, la salive ou dans un lavage alvéolaire. Leur travaux viennent d'être publiés dans le numéro de Science daté du 17 mars.
Les mitochondries sont, avec le noyau, les seuls organites cellulaires à posséder un génome. Les mitochondries sont présentes en nombre dans la cellule et chacune possède plusieurs copies d'ADN mitochondrial (ADNmt) : on estime qu'il existe dans chaque cellule 1000 à 10.000 copies d'ADNmt. Cet ADNmt est théoriquement identique à la naissance quelque soit le génome mitochondrial considéré.
La séquence entière du génome mitochondrial doit être exprimée pour assurer les fonctions biologiques de la mitochondrie telle que la synthèse de l'ATP ou adénosine triphosphate. Cette propriété suggère que des mutations de l'ADNmt pourraient avoir de profonds effets sur le métabolisme cellulaire. En effet, des mutations de l'ADNmt ont été impliquées dans certains cancers comme le cancer du colon.
L'équipe de D. Sidransky a séquencé l'ADNmt provenant de 14 tumeurs de la vessie, 13 tumeurs du cou et de la tête et de 14 tumeurs pulmonaires. Les auteurs rapportent la caractérisation de 292 variations de séquences au total dont 39 ne relevaient pas du polymorphisme allélique. Ces mutations somatiques ont été trouvées chez 64 % des tumeurs de la vessie, 46 % des tumeurs du cou et de la tête et 43 % des tumeurs pulmonaires.
Parallélement, les chercheurs ont recueilli des échantillons d'urines, de salive et de lavage alvéolaire afin de rechercher et séquencer l'ADNmt présent dans ces prélèvements.
Les séquences d'ADNmt issues des tumeurs et des liquides biologiques ont été comparées.
Les ADNmt mutés issus des tumeurs ont été détectés dans les 3 échantillons d'urines provenant des patients avec une cancer de la vessie, dans 6 des 9 échantillons de salive provenant des patients avec des tumeurs du cou ou de la tête et dans 8 des 10 lavages alvéolaires des patients avec un cancer du poumon.
La plupart des mutations observés concernaient une région de l'ADNmt nommée D-loop : cette région constitue l'origine de réplication du génome et est un promoteur majeur de la transcription.
Il est important de souligner que les ANDmt identifiés dans les prélèvements de liquides corporels étaient tous quasiment "purs" dans le sens ou de l'ADNmt non muté n'a pas été mis en évidence. Cette pureté est ADNmt muté est vraisemblablement liée au fait que seules les cellules cancéreuses pourraient se détacher et gagner les liquides corporels.
Les auteurs indiquent que l'ADNmt détectable dans les liquides biologiques était 20 à 200 fois plus abondant que l'ADN muté du gène nucléaire p53 que l'on sait impliqué dans les processus de tumorisation. Le nombre important de copies d'ADNmt dans les cellules et sa faible longueur (16 kb) assure une détection très efficace d'éventuelles mutations.
L'analyse des séquences d'ADNmt dans les liquides biologiques possède 2 atouts majeurs: elle permettrait la détection de cancer de manière non invasive et la mise en évidence de corrélations entre mutations mitochondriales et cancers.
Source : Science 2000; 287 : 2017-2019
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