La thérapie génique s’attaque à l’albinisme
Des chercheurs américains ont réussi à corriger, in vivo chez la souris, la mutation responsable de l’albinisme. Leur protocole de thérapie génique a permis la production temporaire de poils normalement pigmentés.
Kyonggeun Yoon et ses collègues du Jefferson Medical College et de l’Université de Pennsylvanie de Philadelphie ont utilisé un oligonucléotide chimérique ARN-ADN pour corriger la mutation ponctuelle du gène de la tyrosinase, enzyme impliquée dans la synthèse de la mélanine. Ces oligonucléotides chimériques corrigent les mutations ponctuelles en utilisant la machinerie cellulaire de recombinaison homologue et de réparation de mésappariement d’ADN.
La transcription du gène tyrosinase ne se produit que dans certains mélanocytes, les cellules mélanogènes uniquement présentes dans les bulbes pileux. De plus, elle n’a lieu durant la croissance du cheveu que pendant la phase de prolifération cellulaire (stade anagène). Ces cellules produisent et distribuent la mélanine aux cellules médullaires et corticales du cheveu et aux kératinocytes avoisinants. Au cours du développement du cheveu, les kératinocytes migrent vers le haut, se différencient et sont incorporés dans le cheveu, véhiculant avec eux la mélanine.
Ces chercheurs avaient déjà montré que cet oligonucléotide chimérique permettait de restaurer, in vitro, de façon stable et permanente l’activité enzymatique tyrosinase et d’induire des changements de pigmentation dans des mélanocytes en culture. Ils rapportent aujourd’hui dans Nature Biotechnology avoir administré, in vivo, un oligonucléotide chimérique dans la peau de souris albinos en utilisant soit des liposomes en application locale, soit des injections intradermiques.
L’activité enzymatique tyrosinase a été détectée dans les biopsies cutanées réalisées trois mois après le dernier traitement avec l’oligonucléotide chimérique, ce qui correspond à un délai supérieur à un cycle. Cette expression prolongée de cette activité tyrosinase semble indiquer que la correction du défaut génétique a eu lieu dans les précurseurs des mélanocytes qui, après maturation, migrent dans le bulbe pileux et produisent la mélanine lors des cycles ultérieurs du poil.
Elle a entraîné la pigmentation noire de plusieurs poils dans des zones localisées pendant trois mois, l’injection intradermique ayant donné de meilleurs résultats que l’application topique.
Dans un éditorial associé, Robert Hoffman (AntiCancer, San Diego, Californie) fait remarquer que cette efficacité partielle observée chez l’animal pose à l’évidence un problème sur le plan cosmétique. Il importe en effet qu’un nombre minimal de mélanocytes localisés profondément dans le bulbe soient pigmentés pour conférer une couleur normale au poil.
Le chemin vers une correction génétique de la pigmentation in vivo sera donc difficile. " Le succès à long terme de la thérapie génique cutanée dépendra de la correction du gène dans les cellules souches épidermiques ", reconnaissent les auteurs dont l’étude montre néanmoins qu’il devrait être possible d’utiliser des oligonucléotides chimériques dans le traitement de maladies cutanées héréditaires imputable à des mutations ponctuelles.
Nature Biotechnology, janvier 2000, Vol.18, 43-7, 20-1.
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