La lèpre
Définition
La lèpre ou maladie de Hansen est une affection (maladie
infectieuse) chronique de la peau, affectant les nerfs
périphériques et de la muqueuse des voies aériennes
supérieures, provoquée par la bactérie Mycobacterium
leprae ou bacille de Hansen.
Sa gravité tient à sa propension à produire des invalidités
chez les patients non traités ou traités trop
tardivement.
La classification de Madrid distingue deux formes principales
:
- la lèpre lépromateuse
- la lèpre tuberculoïde
Epidémiologie
La lèpre est endémique dans toute la zone intertropical.
En 2000, 120 pays ont signalé 593 526 cas de lèpre (1,2 pour 10 000) et 717 728 cas ont été détectés (14,7 pour 100 000).
Sur les pays d'endémie dont on estimait le nombre 122 en 1985, 107 sont parvenus au stade de l'élimination au niveau national.
A la fin 2000, la lèpre n'est plus qu'"un problème de santé publique" dans 15 pays (taux de prévalence > 1 pour 10 000 et population > 1 million d'habitants) d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. L'Inde est de loin le pays le plus touché.
Les derniers chiffres de l'OMS traduisent une amélioration très nette depuis 1985. La prévalence a diminué régulièrement depuis 1985, la réduction atteignant 89% au niveau mondial au début 2001.
La plus forte diminution a été enregistrée dans la région OMS du Pacifique occidental (95%) et dans la Région africaine (94%) et la plus faible dans celle des Amériques (72%). La réduction de la prévalence s'explique en partie par l'intensification des activités en particulier les campagnes pour l'élimination de la lèpre (CEL).
Les foyers épidémiques persistants se répartissent principalement dans six pays qui regroupent 83 % de la prévalence mondiale. Par ordre décroissant d'importance, ces pays sont l'Inde, le Brésil, le Myanmar, Madagascar, le Népal et le Mozambique.
A elle seule, l'Inde porte 64 % de la prévalence et 78 % des nouveaux cas dans le monde.
L'OMS estime à 2 500 000 le nombre de cas qui devront être dépistés et soignés entre 2000 et 2005.
(Source : Relevé épidémiologique hebdomadaire No.1, 2002, 77, 1-8.)
La biologie du Bacille
La bactérieMycobacterium lepraeest un bacille acido-alcoolorésistant à développement intracellulaire qui n'a jamais pu être cultivé in vitro.
L'infection se propage parr voie aérienne (sécrétions
nasales et la salive des malades lépromatueux
multibacillaires) et peut-être cutanée mais la voie de
pénétration est mal identifiée.
En avril 2000, les équipes de Stewart Cole à l'Institut
Pasteur et le Pathogen Genome Sequencing Unit du Sanger
Centre (Royaume-Uni) ont annoncé avoir séquencé le génome du
bacille de la lèpre. Sa comparaison avec celui du bacille de
la tuberculose devrait fournir de précieuses informations sur
les deux pathologies. Les patrimoines génétiques des deux
mycobactéries sont en effet très proches : certains groupes
de gènes ont jusqu'à 93% d'homologie.
Mais le génome deM. lepraeest plus petit que celui deM. tuberculosis: 3,2 Mb contre 4,4 Mb. Le bacille de la lèpre semble s'être "débarrassé" de gènes qui ne sont pas essentiels. Ce séquençage apporte de grands espoirs, notamment, pour le dépistage précoce de la maladie et la mise au point de nouveaux traitements. L'approche comparative devrait permettre d'identifier de nouvelles cibles thérapeutiques et être utile à la création rationnelle de médicaments pour le traitement de la lèpre. En effet, le traitement actuel, s'il est efficace, est un traitement extrêmement lourd - impliquant entre 6 mois (pour les formes les moins graves) et plus de 12 mois de prise quotidienne d'une combinaison d'antibiotiques - difficile à mettre en oeuvre dans des pays souvent insuffisamment équipés en centres de soins.
Transmission
- La lèpre est une maladie bactérienne peu contagieuse
qui se transmet par des goutelettes buccales ou nasales
émises par un sujet malade infecté non traité. Elle peut
aussi être transmise par contact direct avec la peau
endommagée.
- L'incubation est très longue : de 2 à 10 ans voir 20
ans de sorte que la plupart des cas se révèlent chez les
adultes jeunes alors que la contamination s'effectue
vraissemblablement surtout dans l'enfance.
- Après 3 mois de traitement, une personne ne peut plus
transmettre l'infection car le malade n'est plus
contagieux.
- Pour être contaminé, il faut de plus être réceptif au
bacille de Hansen ce qui représente moins de 5% des
européens.
Manifestations cliniques
Une phase de début, dite indéterminée, est inconstante. Le
diagnostic à ce stade est du reste difficile. La plupart des
malades sont donc vus à un stade plus avancé qui est
caractérisé par deux formes cliniques opposées entre
lesquelles existent de nombreuses formes intermédiaires
(formes interpolaires ou borderline).
Cliniquement, on distinguera donc deux "grands" types de
lèpre :
- La lèpre tuberculoïde qui est non contagieuse d'évolution
relativement bénigne,
- Et la lèpre lépromateuse, grave évolutive et contagieuse.
1. La lèpre tuberculoïde
- Cette forme de lèpre est aussi appelée lèpre
paucibacillaire car le bacille n'est pas retrouvé dans la
muqueuse pituitaire et les lésions cutanées lors du
diagnostic.
- Dans cette forme, le sujet présente de 1 à 5 lésions
cutanées insensibles.
- Ces lésions cutanées sont soient de grandes tâches
hypochromiques (ou chamois sur peau claire) à bords nets
parfois infiltrés, soient de grands placards infiltrés en
relief. Les plaques plus étendues à bord net sont appelées
les léprides. Les lésions sont peu nombreuses et surtout
insensibles.
- Les signes neurologiques sont au 1er plan (la lèpre reste
la première cause de neuropathie infectieuse dans le monde)
et doivent être recherchés devant l'apparition des lésions
cutanées dans un contexte d'endémie lépreuse.
L'atteinte neurologique périphérique débute par une
hypertrophie des troncs nerveux à rechercher au niveau des
membres supérieurs (cubital & médian) et des membres
inférieurs (sciatique poplité externe et tibial postérieur)
mais aussi au niveau du cou (plexus cervical
superficiel).
Il y'a un déficit de la sensibilité avec une absence ou
disparition de plusieurs types de sensibilité : hypoesthésie,
anesthésie voir paralysie, et des troubles trophiques
(ulcérations & maux perforants).
Il en résulte des handicaps divers et des mutilations.
2. La lèpre lépromateuse
- Elle est appelée lèpre multibacillaire (plus de 5 lésions
cutanées) car le bacille de Hansen est retrouvé en quantités
importantes dans les examens cutanés et nasaux lors du
diagnostic.
- Au stade de début, elle est caractérisée par de discrètes
lésions cutanéomuqueuses diffuses, mal limitées à type de
tâches, infiltrées pour les plus typiques et sensibles.
Hypochromiques, les lésions peuvent cependant passer
inaperçues malgré leurs teintes cuivrées luisantes. Elles
sont appelées "lépromes".
- Elles siègent sur le visage principalement et
s'accompagnent d'une rhinite chronique pouvant entrainer à
terme des perforations de la cloison. Une alopécie de la
queue du sourcil peut être concomitante.
- La rhinite lépreuse réalise un écoulement chronique, avec à
la longue, une ulcération (rhinite sanglante), de possibles
perforations et au final une mutilation.
- On note une possible atteinte viscérale qui se manifeste
par des adénopathies, une hépato-splénomégalie, une
orchiépididymite ou une ostéite.
- L'atteint nerveuse périphérique est bilatérale et
symétrique. Elle est du même type que dans les formes
tuberculoïdes mais souvent plus discrète sur le plan
déficitaire, du moins au début.
3. Les lèpres interpolaires ou "borderline"
- Dans cet ensemble "fourre-tout", la catégorisation précise des formes est une affaire de "grand spécialiste prudent" tellement leurs présentations peuvent revêtir des aspects cliniques variés. La classification dans l'une ou l'autre des formes principales dépendra de la prépondérance des aspects tuberculoïdes ou lépromateux.
Diagnostic
Dans la plupart des cas, la maladie est diagnostiquée à un stade avancé.
Le diagnostic repose sur :
- l'intradermo réaction (IDR) à la lépromine (ou test de
Mitsuda) lue entre 21 et 28 jours. (réalisation abandonnée de
nos jours).
--> Dans le cas de la lèpre tuberculoïde, l'IDR à la
lépromine est positive. La charge bacillaire est nulle ou
faible. Ainsi on ne trouve pas de bacille dans le suc
dermique du lobule des oreilles ni dans le frottis
nasal.
--> Dans le cas de la lèpre lépromateuse, l'IDR à la
lépromine est négative. La charge bacillaire est forte. On
retrouve des bacilles dans le suc dermique et dans le frottis
nasal.
- sur la recherche de bacilles sur frottis cutané ou nasal ou
dans les biopsies cutanées par la coloration de Ziehl-Neelsen
qui montre "un infiltrat tuberculoïde sans nécrose".
Le bilan bactériologique comportera donc :
- une coloration de Ziehl-Neelsen sur prélèvement de
l'écoulement nasal et le "suc dermique" d'écoulement des
lobules des oreilles et d'une lésion cutanée.
- Une évaluation de la charge bacillaire est un préalable à
la mise en route du traitement. Elle permettra de
différencier les patients paucibacillaires des patients
multibacillaires.
Tout malade chez qui des bacilles sont mis en évidence devra
être considéré comme multibacillaire et traité en
conséquence.
Traitement / Prévention
Il n'existe pas de vaccin contre la lèpre ni aucun traitement
préventif de type vaccination ou chimioprophylaxie.
Cependant la vaccination par le BCG assurerait une protection
temporaire de quelques années.
La lèpre reste une maladie guérissable qui n'engage pas le
pronostique vital (mort) à elle seule et dont le contrôle
repose sur le dépistage et le traitement précoce des patients
multibacillaires.
L'éradication est toutefois possible si la polychimiothérapie est très largement apliquée et parfaitement surveillée.
Reste qu'elle expose à des invalidités dont les conséquences
peuvent être considérables.
Le traitement recommandé notamment par l'OMS est la
polychimiothérapie (PCT) qui est une association
médicamenteuse : Dapsone - Rifampicine - Clofazimine qui
évitera la sélection des souches résistantes.
Grâce à Novartis, la PCT a été mise à disposition
gratuitement à tous les malades du monde dès 1981 et est
maintenat bien standardisée.
Les formes paucibacillaires sont guéries en 6 mois par
dapsone (DISULONE) auto-administrée et rifampicine (RIFADINE
ou RIMACTAN) en prise supervisée mensuelle, alors que la
lèpre multibacillaire demande 2 ans de traitement avec la
même combinaison que précédemment auquelle on aura adjoint la
clofazimine (LAMPRENE) en prise auto-administrée avec une
prise complémentaire mensuelle supervisée.
L'inconvénient de ce traitement est qu'il est trop long et
son utilisation pose des problèmes logistiques en terme
d'utilisation dans la plupart des pays en voie de
développement. L'OMS a ainsi récemment préconisé de ramener à
12 mois la durée de la PCT de 24 mois dans les formes
multibacillaires. Peu après, c'était au tour du traitement de
la lèpre paucibacillaire à lésion unique d'être simplifié,
avec la recommandation d'une dose unique des trois produits
de la PCT pour les formes précoces.
Posologie
Dapsone (ou Sulfone mère ou DISULONE) en traitement de la
lèpre : 100 mg/jour
- < 50 Kg : 75 mg/jour
- < 25 Kg : 50 mg/jour
- < 12 Kg : 25 mg/jour
Dapsone en chimioprophylaxie des sujets-contact des lépreux :
50 mg/jour
- > 12 ans : 50 mg/jour
- > 6 ans : 25 mg/jour
- > 2 ans : 25 mg x 1 jour/2
- > 6 mois : 12 mg x 1 jour/2
- > 6 mois : 6 mg x 1 jour/2
Clofazimine (LAMPRENE) en traitement curatif : 50 mg tous les jours et une prise de supplémentaire mensuelle de 300 mg
Clofazimine en chimioprophylaxie des réactions lépreuses à récidives fréquentes : 300 mg/jour x 1 mois puis à dose dégressive jusqu'à dose habituelle.
Rifampicine (RIFADINE ou RIMACTAN): 1500 mg en prise unique ou 900 mg/jour en une prise pendant 15 jours, associée avec les autres antilépreux.
Pour en savoir plus
Dossiers de fond
Diagnostic clinique et biologique d'une
lèpre
Définition - Intérêt - Physiopathologie - Diagnostic -
Traitement.
Fiche de Medinfos, 04/02/2001.
Voir le document
La Lèpre
Agent de la maladie - Répartition géographique dans le monde
- Au Canada - Symptômes - Période de contagion - Transmission
- Prévention.
Par la Direction générale de la santé de la population et de
la santé publique - Santé Canada, 1996.
La lèpre
Causes de la maladie, symptômes, historique, traitement
actuel, efficacité de la polychimiothérapie, historique du
traitement, élimination de la lèpre en tant que problème de
santé publique, quelques chiffres sur la situation actuelle,
mesures et ressources nécessaires, la stratégie de
lélimination de la lèpre,
Aide mémoire n°101 révisé en janvier 2001 et publié par
lOMS.
Infolep
Service d'information sur la lèpre du Netherlands Leprosy
Relief (NSL) situé à Amsterdam. Infolep est un centre de
documentation et d'information offrant ses services à toutes
les personnes qui ont besoin de se renseigner sur la maladie.
Site en anglais.
Cours en ligne
Par Professeur Mohamed Denguezli, Faculté de médecine Ibn El
Jazzar, Sousse (Tunisie).
Voir le
document
Epidémiologie
La lèpre ou maladie de Hansen
La situation de la lèpre dans le monde, septembre 1999 - La
lèpre dans la collectivité territoriale de Mayotte (Océan
Indien).
Bulletin épidémiologique hebdomadaire N° 44/1999.
Voir le
document
Le point sur la lèpre
Quelle est lépidémiologie de la lèpre dans le monde ?
Qu'a-t-on appris de nouveau sur la lèpre durant les dernières
années (en dehors des traitements) ? Quelles sont les grandes
avancées thérapeutiques de ces dernières années et les
perspectives d'avenir ?
Par le Dr Pierre Bobin, dermatologue et secrétaire général de
l'Association des Léprologues de Langue Française.
La lèpre dans le monde : régression de plus de
85%
En dépit de la très grande réussite du traitement contre la
lèpre (polychimiothérapie), plus de 2 millions de cas
resteraient à dépister et à traiter.
Communiqué OMS/79 31 octobre 1997.
Un pas de plus dans l'élimination de la
lèpre : l'OMS concentre son attention sur
les quelques pays d'endémie qui restent
La lèpre est sur le point d'être éliminée des problèmes de
santé publique dans le Monde
Communiqué OMS/99/25 19 avril 1999.
Atlas
Atlas tunisien de dermatologie on line :
Lèpre
Professeur Mohamed Denguezli, Faculté de médecine Ibn El
Jazzar, Sousse (Tunisie).
Voir le
document
Traitement
Indication des spécialités : Lèpre
Par la BIAM.
Voir le
document
Indications des substances : Lèpre
Par la BIAM.
Voir le
document
Un traitement de la lèpre plus simple
La polychimiothérapie qui associe trois médicaments
antilépreux puissants s'avère très efficace : déjà 8,4
millions de personnes ont été guéries depuis 1981. La lèpre
paucibacillaire (une seule lésion cutanée) est guérie avec
une seule prise alors que la lèpre multibacillaire demande 24
mois de traitement.
Communiqué OMS/45 3 juin 1997.
Lèpre : plus de deux millions de
guérisons
A cette date, 10 millions de personnes ont guéri de la lèpre
grâce à la polychimiothérapie.
Communiqué OMS/43 26 mai 1998.
Biologie du Bacille
Lèpre : le séquençage du génome du bacille arrive à
son terme
Les méthodes classiques de bactériologie ne peuvent être
utilisées pour le bacille de Hansen, c'est pourquoi le
séquençage du génome de Mycobacterium Leprae, mené par un
collaboratif entre des chercheurs de l'Institut Pasteur de
Paris et du Sanger Center britannique, ouvre de nouvelles
possiblilités de traitement, en particulier l'élaboration
d'un vaccin qui n'a pas encore pu être développé.
Le Quotidien du Médecin, n°6232 du 27 janv. 2000.
Tapez le mot clé : lèpre
Voir le
document
Microbiology of Leprosy (en
anglais)
Biologie du Mycobacterium
leprae, facteurs déterminant l'expression clinique après
infection, culture in vitro, culture in vivo, transmission,
mortalité.
Les Instituts - missions - fondations - associations
ILEP
Présentation de la fédération internationale des associations
antilèpres qui compte 19 organisations non gouvernementales
et basée dans 14 pays : les membres, publications,
documentation...
http://www.ilep.org.uk/
Fondation Raoul Follereau
Association française de lutte contre la lèpre : présentation
de l'association, du combat mené contre la maladie,
description de la lèpre, informations pour en savoir plus,
Quiz, nouveautés.
http://www.raoul-follereau.org/
La mission évangélique contre la
lèpre
Aujourd'hui encore, 1500 personnes par jour attrapent la
lèpre. Et pourtant... nous avons des médicaments efficaces
pour la vaincre.
Voir le
document
Institut de lèprologie apliquée
Institut de la fondation de l'odre de Malte (Dakar - Sénégal)
: historique, soins spécialisés apportés aux malades lépreux,
enseignement et formation pour le personnel médical et
paramédical impliqué dans la lutte contre la lèpre, recherche
et mission.
American Leprosy Missions
Informations sur la lèpre : action du traitement, examen
médical de la lèpre, analyse de quelques cas, les différentes
missions américaines.
Voir le
document
#COVID-19 : le point de situation épidémiologique sur le coronavirus SARS-CoV-2
Descripteur MESH : Lèpre , Muqueuse , Peau , Maladie , Classification , Patients