Se protéger contre les radicaux libres par l'alimentation : les preuves sont là !
Les radicaux libres sont responsables d'altérations moléculaires et cellulaires qui sont fortement impliqués - personne n'en doute plus - dans les pathologies cardio-vasculaires et les cancers. Ces composés hautement réactifs ne manquent pas d'imagination pour endommager les cellules et les tissus. Ils s'attaquent aux constituants cellulaires et aux molécules biologiques, créent toutes sortes de produits toxiques, altèrent l'expression des gènes et l'activité des enzymes, empêchent les processus de réparation cellulaire… bref, ils font des dégâts !
Une alimentation plus ou moins protectrice
L'alimentation peut largement influencer l'action des radicaux libres sur l'organisme. Elle forme, en effet, un ensemble complexe combinant à la fois des antioxydants, comme les vitamines C et E pour ne citer que les plus célèbres, des composés fortement oxydables, comme les acides gras polyinsaturés, le tout associé à des métaux de transition pro-oxydants comme le cuivre et le fer. On comprend que, selon sa richesse en composés protecteurs ou oxydants, l'alimentation peut exercer des effets positifs ou négatifs. Ainsi, depuis quelques années, les preuves s'accumulent pour affirmer qu'une augmentation de la consommation de fruits et de légumes, associée ou non à une réduction des graisses alimentaires, est un bon moyen de se protéger contre l'infarctus et le cancer. Reste à savoir dans quelle mesure ces effets protecteurs reposent sur des mécanismes anti oxydants… la question reste posée.
Les études d'observation de population se contentent de mettre en relation un statut en antioxydants alimentaires et des pathologies, sans pouvoir établir de relation de cause à effet. C'est ce qui fait leur limite. Les essais d'intervention étudient le plus souvent l'effet d'une supplémentation en tel ou tel antioxydant, qui est bien loin de refléter la complexité d'un aliment ou, à plus forte raison, d'un mode alimentaire…
Ce qui est plus intéressant, mais plus difficile à réaliser, c'est d'observer les effets de diverses modifications du régime sur le statut antioxydant de l'organisme. Les résultats d'une telle étude (1) viennent d'être récemment rapportés et commentés (2) et sont particulièrement instructifs.
Les marqueurs de la peroxydation lipidique
Principe de cette étude : tester les effets de différents niveaux d'apports en fruits, légumes et graisses sur les marqueurs de peroxydation lipidique chez 123 sujets sains. Ces volontaires ont été soumis à trois types de régimes. Un régime contrôle, pauvre en fruits et légumes (4 portions par jour, tout de même) et apportant 36% de calories lipidiques. Un régime riche en fruits et légumes (9 portions par jour) et par ailleurs similaire au précédent. Enfin, un régime combiné, à la fois riche en fruits et légumes (10 par jour) et pauvre en lipides (26% des calories) avec une prédominance de graisses polyinsaturées (P/S = 1,3). Dans les trois cas, l'apport calorique a été ajusté aux besoins énergétiques pour maintenir le poids stable tout au long de l'étude. Les 123 sujets ont d'abord consommé le régime contrôle pendant 3 semaines. Ils ont été ensuite randomisés en 3 groupes comparables, soumis chacun pendant 8 semaines à l'un des trois régimes. Divers dosages sanguins ont permis d'apprécier le statut oxydatif de l'organisme, avant et après intervention diététique : malonedialdéhyde (MDA), lipides plasmatiques, caroténoïdes, rétinol, tocophérol. On a également dosé la capacité d'absorption du radical oxygène (ORAC), reflet de la capacité antioxydante globale du plasma et on a mesuré le taux d'éthane expiré, traduisant le degré de lipoperoxydation in vivo.
Examinons les résultats : de puissants effets antiradicalaires
Dans le groupe contrôle pauvre en fruits et en légumes, l'excrétion respiratoire d'éthane a significativement augmenté, traduisant une plus forte peroxydation lipidique. En revanche elle n'a pas été modifiée dans le groupe fruits-légumes et a même diminué dans le groupe régime combiné (10 fruits et légumes et seulement 26% de lipides) ce qui reflète une réduction de la lipoperoxydation. La capacité antioxydante du plasma (ORAC) a été réduite dans le groupe contrôle et augmentée de façon très significative dans les deux autres groupes, ainsi que les concentrations plasmatiques en caroténoïdes. Si l'attention était focalisée sur ces derniers composés, d'autres antioxydants, comme les flavonoïdes et la vitamine C, largement représentés dans les fruits et les légumes, ont vraisemblablement contribué à accroître la capacité antioxydante du plasma. A titre d'exemple, le simple fait d'ajouter 5 ou 6 portions de fruits et légumes par jour aux 4 du régime contrôle, a pour effet d'augmenter l'apport en vitamine C de 200 mg. Il aurait par ailleurs été intéressant d'évaluer le statut en folates et les taux d'homocystéine dans les trois groupes d'intervention quand on sait l'importance qu'ont les fruits et légumes pour réduire l'excès d'homocystéine qui est, comme on le sait aujourd'hui, un facteur de risque cardio-vasculaire.
Une action bénéfique sur la tension artérielle
Autre fait particulièrement instructif : l'effet sur la tension artérielle. Les 123 participants ont été recrutés dans l'étude DASH (Dietary Approch to Stop Hypertension) (3) destinée à évaluer l'impact de l'alimentation sur la pression artérielle de 354 sujets normo et hypertendus (29%). Ceux qui ont suivis le régime fruits et légumes, et surtout le régime combiné, ont vu leur tension artérielle baisser de manière significative au bout des 8 semaines d'intervention, et ce d'autant plus qu'il s'agissait de sujets hypertendus.
La réduction des graisses alimentaires est, depuis de nombreuses années, le cheval de bataille des cardiologues ; gageons que l'augmentation de la consommation de fruits et de légumes sera celui du nouveau millénaire : "10 fruits et légumes par jour" a démontré sa supériorité en terme de prévention.
Références bibliographiques
1 - Miller ER et al, Effect of dietary patterns on measures of lipid peroxydation ; results from a clinical trial, Circulation, 1998 ;98 :2390-5
2 - Jacob R, Evidence that diet modification reduces in vivo oxydant damage, Nutrition review, Vol 57, N° 8, August 1999, pp 255-258
3 - Moore TJ et al, effect of dietary patterns on ambulatory blood pressure, Hypertension, sept 99, pp 472-477
Dr Thierry Gibault
- Janvier 2000 - Source APRIFEL (Flash 2000 - Santé News)
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