La distinction entre les aliments génétiquement modifiés et les aliments traditionnels
Les préoccupations nées en Europe du manque de choix laissé au consommateur entre un aliment génétiquement modifié et un aliment traditionnel pourraient être atténuées par la mise en place d'une législation claire et de nouvelles méthodes de détection.
Le premier aliment génétiquement modifié introduit en Europe fut commercialisé en Grande-Bretagne. Il s'agissait d'un concentré de tomates à base de tomates génétiquement modifiées. L'étiquetage faisait clairement apparaître (c'était alors une décision volontaire du commerçant) l'utilisation de tomates génétiquement modifiées ; un concentré de tomate traditionnel était également vendu sur le même rayon, laissant ainsi au consommateur la possibilité de choisir entre les deux produits. Il est facile de séparer le concentré de tomates génétiquement modifiées des autres produits car les tomates sont cultivées en petites quantités et traitées dans une seule usine. Le concentré de tomate est mis en boite sur site, étiqueté et livré aux distributeurs.
Par la suite, l'Union Européenne a autorisé la commercialisation de soja et de maïs génétiquement modifiés. Dans la mesure où il n'existe, dans les pays producteurs, aucune législation précise qui leur impose de traiter à part les variétés génétiquement modifiées des variétés issues de cultures traditionnelles, il est fort probable que le soja et le maïs importés des Etats-Unis, du Canada, du Brésil ou d'Argentine, contiennent des produits génétiquement modifiés.
Le soja et le maïs étant utilisés dans l'élaboration de nombreux produits alimentaires, l'identification de ces végétaux génétiquement modifiés et de leurs dérivés constitue un défi, bien différent de l'identification du concentré de tomates.
Néanmoins, une législation européenne récente, instaurée pour fournir des informations précises et transparentes au consommateur, dispose que des tests doivent démontrer l'absence de matériel génétiquement modifié (qu'il s'agisse de l'introduction de protéines étrangères au produit ou de modifications de l'ADN) dans les denrées. Les sociétés de biotechnologie ont donc dû élaborer et commercialiser des méthodes d'évaluation et des kits de détection appropriés.
Ces tests sont actuellement disponibles pour le maïs et le soja. Il n'existe à ce jour pas de seuil limite et la détection d'une quelconque quantité de protéine ou d'ADN étrangère au produit impose qu'il en soit fait mention sur l'emballage. L'absence de seuil limite de détection empêche de faire la distinction entre un produit vraiment génétiquement modifié et un produit qui aurait été contaminé accidentellement par une pollinisation croisée des cultures ou lors du transport ou du traitement du produit fini. Les scientifiques et les industriels sont donc actuellement en pourparlers pour déterminer un seuil limite raisonnable de 1 à 2%, aligné sur les normes GATT, concernant les taux de blé tendre présents dans le blé dur.
Les tests effectués pour déterminer " la préservation de l'identité " du produit (IP), autrement dit un traitement différencié des produits, ont, bien évidemment, un coût. Ces coûts supplémentaires peuvent varier en fonction des spécifications et des seuils de tolérance fixés, des différents produits finis dérivés des matières premières ou de leur utilisation dans les aliments.
Ces coûts supplémentaires ne sont pas toujours sensibles au niveau du produit fini. Il arrive néanmoins qu'ils augmentent de façon significative le prix de l'un des composants alimentaires utilisés dans une préparation. Il est probable que le coût de préservation de l'identité sera amené à diminuer. On pourra par exemple trouver des solutions permettant de réaliser des économies d'échelle sur le traitement et la manutention, alors même que l'expérience acquise engendrera une évolution de l'efficacité des opérateurs IP.
Quel qu'en soit le coût, la préservation de l'identification représente une dépense supplémentaire mal accueillie par les agriculteurs qui cherchent à économiser sur les frais d'achat de pesticides et d'herbicides en cultivant des produits génétiquement modifiés comme le soja et le maïs. Par ailleurs, les associations européennes de consommateurs exigent de plus en plus fermement que l'on puisse reconnaître clairement les produits génétiquement modifiés afin de permettre au consommateur de choisir librement entre un produit alimentaire génétiquement modifié et un produit cultivé de manière traditionnelle.
Aujourd'hui, le débat sur la biotechnologie est tourné d'une part autour du droit du citoyen à l'information (sur les méthodes utilisées pour produire les aliments qu'il consomme) et d'autre part autour des droits de l'industrie biotechnologique de proposer des produits conformes à la législation.
La préservation de l'identité est un élément important du débat qu'engendre l'introduction d'une nouvelle technologie majeure.
"EUFIC, Le Conseil Européen de l'Information Alimentaire",Avril 1998
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