Rapport Salamon : Analyse des données sanitaires relatives aux anciens combattants français de la guerre du Golfe

Présentation

Le ministère de la Défense et le Secrétariat d'Etat à la santé et aux Handicapés ont chargé un groupe de travail " de faire des propositions au Gouvernement sur les modalités permettant d'améliorer les connaissances sur les conséquences de l'engagement dans le conflit du Golfe de 25 000 soldats français"

Il a été demandé au groupe de travail de répondre aux deux questions suivantes :

- Existe-t-il un syndrome spécifique lié à la guerre du Golfe ?

- Quelles études convient-il de mener en France ?

Composition du groupe de travail

- M. Roger Salamon : Président
- Mme Annick Alperovitch
- Mme Françoise Conso
- Mme Marthe-Aline Jutand
- M Jean-Paul Boutin
- M. Yves Coquin
- M. Roland Laroche
- M. Christophe Paquet
- M. Frédéric Rouillon
- M. Pierre Weinbreck

Résumé

I -L'analyse de la littératureconcernant les aspects médicaux de la guerre du Golfe (350 articles publiés entre 1991 et décembre 2000) fait ressortir les éléments suivants concernant les populations étudiées ( essentiellement américaines et britanniques ).

- Aucun article ne fait état d'un excès de mortalité chez les militaires ayant participé à la guerre du Golfe par rapport à des militaires non déployés, à l'exception d'un excès de mortalité par accident de la route.
- Aucun effet délétère sur la descendance n'a été relevé.
- Aucune maladie connue n'est présentée en excès chez les militaires de la guerre du Golfe. Un travail met en évidence une augmentation du cancer du testicule dans la période immédiatement après la guerre (fin 91) mais cet excès n'est plus retrouvé lorsque le recul devient plus important (fin 95).
- Les hospitalisations sont légèrement plus fréquentes pour le personnel déplo~.é dans le Golfe que pour un groupe témoin de militaires non déployés suivis sur la même période. Cette légère augmentation concerne "des signes et symptômes non spécifiques" et pourrait être expliquée par l' offre s).stématique d'un bilan hospitalier aux militaires déployés dans le Golfe.
- Des signes et symptômes divers, le plus souvent fonctionnels, sont retrouvés dans toutes les études avec une fréquence nettement supérieure chez les militaires ayant participé à la guerre du Golfe que chez les militaires témoins non déployés ou déployés en Bosnie Herzegovine. Ces signes et symptômes correspondent le plus souvent à une fatigue chronique, une symptomatologie dépressive, mais aussi à des arthralgies, des troubles de l'humeur ou de la mémoire.
- L'analyse de ces signes ne fait pas apparaître de manière é\'idente la notion d'un syndrome unique spécifique de la guerre du Golfe. C'est pourquoi une anal)"se statistique (analyse factorielle) a été réalisée par plusieurs auteurs; elle montre une "construction" de ces signes selon des facteurs qui pourraient s'apparenter à des syndromes. ~1ais ces facteurs se retrouvent aussi (quoique quantitativement plus faible) chez les militaires non déployés lors de la guerre du Golfe. Cela a conduit quatre auteurs (sur 5) à réfuter la notion de syndrome spécifique de la guerre du Golfe.
- Aucune cause unique pou\"ant expliquer l'excès de signes et symptômes constatés n'est formellement mise en évidence.
- Les auteurs ne retiennent pas en particulier le rôle de l'uranium appau\Ti, des fumées des puits de pétrole en feu ou de l'agent neurotoxique Sarin.
- Aucune publication ne permet d'établir un lien entre la pyridostigmine et les signes et symptômes constatés, même si l'hypothèse d'une relation causale ne peut être totalement exclue,
- Une incertitude et des controverses existent sur les possibles effets à long terme des expositions prolongées à des faibles doses d'insecticides organophosphorés, surtout lorsqu'ils sont associés à d'autres facteurs ( stress, chaleur, , .).
- Les vaccinations multiples pratiquées pendant le déploiement, et particulièrement celles visant à la protection contre des armes bactériologiques ( charbon, botulisme, peste, ..) semblent associées à un excès de certains signes et symptômes.

II - Analyse des dossiers de demande de pension d'invalidité

Le Groupe de travail a analysé les 200 fiches d'informations, fournies par la DirectIon aes Statuts, des Pensions et de la Réinsertion Sociale du Ministère de la Défense, relatives à une demande de pension d'invalidité consécutive à une participation aux opérations du Golfe. Les informations médicales relevées sont souvent bien pauvres. On retient cependant les données suivantes: 55 % des affections déclarées sont de nature traumatologique et 23 % de nature neuro-psychologique ; 36 % des demandes déjà instruites ont été rejetées (29 % parmi les affections traumatologiques et 55 % parmi les affections neuro-psychologiques). Treize pour cent ont entraîné un contentieux.

III -Conclusion

La littérature scientifique internationale constitue la seule source d'information disponible sur l'état de santé des Anciens Combattants de la guerre du Golfe. On n'y retrou\'e, pour ces Anciens Combattants, ni de notion de mortalité anormale, ni d'excès de maladies connues. Comparé à d'autres vétérans, il existe cependant dans cette population une fréquence plus élevée de signes et plaintes fonctionnels, sans que l'on puisse vraisemblablement parler d'un « syndrome » spécifique à la guerre du Golfe. Les données sanitaires relatives aux Anciens Combattants français ne sont pas exploitables en l'état. Elles ne permettent donc ni de confirmer, ni d'infirmer les conclusions tirées de la littérature internationale.

IV -Recommandations

Pour apporter des réponses fiables et transparentes aux questions soulevées par le débat public, et à l'inquiétude des militaires déployés dans le Golfe, nouS proposons avec une certaine fermeté quelques projets que nous avons classé en études épidémiologiques, autres recherches et surveillance à moyen et long terme. . Il nous paraît indispensable de mener une étude exhaustive par autoquestionnaire sur l'ensemble des vétérans qui ont participé à la guerre du Golfe, c'est-à-dire près de 25 000 personnes.

Etudes épidémiologiques

Il nous paraît indispensable de mener une étude exhaustive par autoquestionnaire sur l'ensemble des vétérans qui ont participé à la guerre du Golfe, c'est-à-dire près de 25 000 personnes.

Cette étude permettrait :
- de dresser un bilan objectif des plaintes et des maux ressentis, pour tous les vétérans répondant à un autoquestionnaire,
- de mesurer les troubles objectifs (cliniques et paracliniques) présentés par les veterans qui consulteront,
- de proposer un éventuel suivi dans le temps de tout ou partie des vétérans,
- de préparer une possible enquête chez certains militaires déployés dans le Golfe en comparant ceux qui présentent des signes ou symptômes et ceux qui n'en présentent pas, à la recherche d'éventuelles différences dans les comportements ou les expositions,
- de rassurer les vétérans en mettant en place, pour l'ensemble des personnels déployés dans le Golfe, une offre de soins en consultations hospitalières spécialisées, civiles ou militaires,
- de rassurer la population sur le désir de transparence des autorités.

Il est de plus indispensable de réaliser une analyse de la mortalité des militaires déployés dans le Golfe. Elle permettra d'estimer la mortalité globale et la mortalité pour différentes causes de décès (notamment cancers et accidents). Les taux de mortalité pourraient être comparés à ceux de la population générale, et éventuellement à ceux d'autres populations militaires déployées dans d'autres régions ou non déployées.

Autres recherches

Le Groupe de travail souligne l'intérêt d'effectuer des recherches sur les effets des stimulations antigéniques répétées chez l' adulte.

Surveillance

Les questions posées au sujet de la guerre du Golfe ont révélé ou confinné aux membres du Groupe de travail la très grande insuffisance française en matière de surveillance épidémiologique des anciens combattants.

La guerre du Golfe s'inscrit dans un cadre de conflits modernes qui font appel à des technologies nouvelles (par exemple, les munitions à l'uranium appauvri) et s'inscrivent souvent dans des zones particulières (milieu urbain ou suburbain avec environnement industriel ou milieu désertique tel le Golfe). Les participants à ces conflits (militaires mais aussi civils) se trouvent ainsi confrontés à des risques non ou mal identifiés, parfois nouveaux.

Or, les troubles de santé qui pourraient être consécutifs à ces expositions peuvent n'apparaître qu'à moyen voire à long tenne chez les anciens combattants dont une proportion croissante avec le temps n'est plus militaire et n'est donc plus assujettie au système de surveillance épidémiologique en vigueur dans les armées. Il importe donc de mettre en reuvre un véritable système pennettant la surveillance de la santé des anciens combattants (y compris au-delà de leur service actif) et la mesure des risques sanitaires liés aux opérations.

Cela nécessite
une identification exhaustive des risques et leur évaluation,
une grande traçabilité de ces expositions par des équipes travaillant en parfaite indépendance,
un suivi médical, adapté et accessible à tous,
une réflexion permanente sur la prévention et la réparation, une indispensable veille scientifique.

Cela requiert une volonté politique, claire et affichée, pour qu'un tel « observatoire » de la santé des anciens combattants puisse être mis en place, avec des moyens adaptés.

Bref historique

D'août 1990 à avril 1991, le conflit contre l'Irak a regroupé des troupes d'une coalition de près de 40 pays, dont majoritairement les Etats-Unis (avec 700 000 hommes), la Grande Bretagne (50000 hommes) et la France (25000 hommes).

A partir de 1993, d'abord aux Etats-Unis puis en Grande Bretagne, des plaintes et déclarations de symptômes ont été enregistrées de la part de militaires ayant servi dans le Golfe. Une grande variété de problèmes de santé a été présentée par un nombre non négligeable de « vétérans » (près de 10% de soldats américains en auraient été victimes). De nombreuses causes sont évoquées en relation avec la guerre du Golfe (fumées de puits de pétrole en feu, maladies infectieuses, effets secondaires de médicaments utilisés comme antidotes d'armes chimiques (pyridostigmine), insecticides, uranium appauvri, vaccinations, armes de guerre chimiques ou biologiques, climat et conditions de vie, stress psychologique. ..) et la notion médiatique de syndrome de la guerre du Golfe est alors évoquée. Dès janvier 1994, le Ministère de la Défense Américain a mis en place un Comité chargé de coordonner les efforts pour répondre aux problèmes de santé des vétérans de la guerre du Golfe et a débloqué une somme considérable ( 155 millions de dollars) pour encourager des recherches nationales et internationales sur le sujet. Ces travaux, dont certains sont terminés et d'autres encore en cours, ont conduit à de très nombreuses publications scientifiques dont 350 ont été analysées par notre groupe. Des milliers d'autres publications (revues générales, journaux, rapports. ..) ont été réalisées Outre-Atlantique.

En France, chez les combattants de la guerre du Golfe qui semblent avoir bénéficié sur le terrain d'un encadrement médical de proximité (généralistes et psychiatres), il n'a pas été relevé de phénomènes pathologiques aigus atypiques. Au décours du conflit le réseau de santé militaire (médecins d'unité, experts, hôpitaux...) n'a pas observé, chez les militaires d'active (visite médicale annuelle et surveillance épidémiologique) de signes ou symptômes en faveur d'une pathologie inhabituelle et significative. Par contre les anciens du Golfe rendus à la vie civile n'ont pas bénéficié de ce type de suivi personnalisé. Devant la non-émergence de pathologies nouvelles et/ou inexpliquées de 1991 à 2000, le service de santé des armées n'a pas mis en place de surveillance spécifique ni mené d'enquête ciblée chez les anciens combattants du Golfe (ce qui traduit l'absence de publications référencées sur ce thème par des auteurs français). La forte médiatisation du conflit du Golfe n'a pas entraîné non plus de très sensible augmentation du nombre des « plaignants », ni demandeurs de bilan de santé ou de réparation auprès du secrétariat des anciens combattants et 200 demandes de pension militaire d'invalidité ont été enregistrées.

Une association de défense des soldats victimes de la guerre du Golfe (A VIGOLFE) est créée en juin 2000. Parallèlement, le Ministère de la Défense a créé un groupe d'experts militaires en juin 2000, puis a sollicité, en octobre, avec le Secrétariat d'Etat à la Santé, la mise en place d'un groupe de travail indépendant. Une Mission d'Information Parlementaire présidée par le Député Bernard Cazeneuve a été mise en place en octobre 2000.

Difficultés méthodologique

Les scientifiques travaillant sur les conséquences sanitaires de la guerre du Golfe, en dehors des conséquences directes d'opérations militaires, sont confrontés à de nombreuses difficultés dont l'exposé résumé nous semble nécessaire.
1 - Pour bien décrire la situation sanitaire d'une population, il faut :
-soit disposer de la totalité de la population,
-soit en extraire un échantillon représentatif.

En-dehors de certains indicateurs (mortalité, hospitalisations), les plaintes présentées par les vétérans américains n'ont jamais été analysées dans leur exhaustivité et les échantillons étudiés, et décrits dans l'abondante littérature que nous avons analysée, sont rarement représentatifs de l'ensemble des soldats présents sur les sites de la guerre du Golfe.

2- Pour apprécier la fréquence d'événements pathologiques, il faut pouvoir les dénombrer selon une classification claire et acceptée. Dans le cas des conséquences de la guerre du Golfe, nous verrons que les symptômes sont très divers, difficiles à classer et d'une certaine manière à comptabiliser .

3- Pour imputer des événements pathologiques à la guerre du Golfe, il faut démontrer que ces événements sont plus fréquemment rencontrés chez les militaires ayant participé à la guerre du Golfe que chez ces mêmes militaires « s'ils n'avaient pas participé à la guerre du Golfe ». Il est donc indispensable que les études soient comparatives (on parle d'études « exposés-non exposés » ) et que l'on puisse apprécier les événements pathologiques présentés depuis 1991 dans une population témoin la plus comparable possible à celle des vétérans de la guerre du Golfe (à l'exception de leur présence sur ce site). Il n'est pas simple de trouver de « tels témoins » et on peut comprendre que ce choix, s'il est mal fait, peut induire des conclusions biaisées. Nous y reviendrons dans l'analyse bibliographique.

4- Pour rechercher une cause précise à un événement pathologique, il est indispensable de mesurer l'exposition à cette cause et de comparer des militaires atteints de l'événement pathologique à des militaires qui étaient aussi présents dans le Golfe mais qui n'ont pas présenté cet événement (on parle d'études « cas-témoins »). Dans le contexte de la guerre du Golfe, il n'est pas simple de documenter rétrospectivement des différences d'exposition entre les militaires.

Bien d'autres difficultés, qu'il est facile de comprendre, sont oftèrtes aux chercheurs (subjectivité des plaintes avec la possible influence des media ou des avocats; au contraire refoulement des plaintes face à des refus d'être entendu; recul sou\'ent très long, plusieurs années, entre les plaintes et les causes possibles, ...).

Nous voulons ici insister tout particulièrement sur une des plus grosses difficultés qui explique assez souvent l'incompréhension qui peut régner entre l'expert et le décideur: il s'agit de ce que nous pourrions nommer « l'impossible réfutation ». Les études épidémiologiques évoquées plus haut (qu'elles soient de type exposés-non exposés ou de type cas-témoins) sont toutes comparatives et les résultats s'appuient sur une analyse statistique à la recherche d'une différence entre un groupe étudié et le groupe témoin. Si une telle différence existe, la méthode statistique peut la mettre en évidence ( on parle de différence significative) avec un certain risque d'erreur contrôlé. Si par contre cette différence n'existe pas,le statisticien ne pourra jamais démontrer cette inexistence. Tout au plus pourra-t-il conclure qu' «il n'a pu mettre en évidence une différence», ce qui n'est en rien synonyme de « une non -différence est démontrée».

Là est toute l'ambiguïté et la difficulté du problème, et partant des relations entre experts et décideurs, on peut la présenter de la manière suivante :
- si quelque chose existe, on le prouve (si l'on peut).
- si quelque chose n' existe pas, on dit que cela « reste possible » et ce doute peut devenir alors, dans un contexte de principe de précaution et d'inflation médiatique, un début de preuve !

Nous avons retrouvé souvent cette difficulté dans nos lectures concernant le syndrome de la guerre du Golfe.
Nous essaierons dans la mesure du possible d'éviter ce piège, assez douillet pour l'expert, et d'apporter autant que possible des réponses nettes (dussions-nous prendre un risque) aux questions qui nous sont posées.

Notion de syndrome

Une des questions, la principale, qui nous est posée concerne l'existence d'un syndrome spécifique. C'est d'ailleurs cette notion de syndrome qui a soulevé le plus de débats Outre- Atlantique.
A la maladie, état morbide souvent bien délimité et dont on a identifié le facteur causal et/ou le(s) facteur(s) de risque, les cliniciens opposent le syndrome, assemblage ou construction de symptômes et de signes le plus souvent hétérogènes, dont la constatation reconnue par le clinicien sur un certain nombre de cas conduit celui-ci à considérer que cet assemblage constitue une entité à laquelle doit être associée une cause.
Souvent un syndrome est associé à un processus physiopathologique (syndrome inflammatoire) ou biologique (syndrome d'immunodépression) parfois à une localisation particulière.
La notion de syndrome, pour habituelle qu'elle soit dans le langage médical recouvre finalement de multiples situations et n'est pas si simple à définir .

On peut par ailleurs s'interroger sur la finalité de cette question en tant que telle. En effet, il nous paraît tout aussi important de tenter de répondre à la question simplement posée comme suit: les soldats de la guerre du Golfe présentent-ils des troubles (symptômes, plaintes, signes,etc.) qui auraient pu être occasionnés par cette guerre? Sans nier l'intérêt politico- médiatique, scientifique et éventuellement juridique de savoir si ces troubles constituent ou non un « syndrome », ou s'ils sont spécifiques de la guerre du Golfe (par rapport à d'autre guerre), il ne nous paraît pas convenable de limiter nos interrogations à cette dimension de la question. En effet, les plaintes et les souffrances exprimées par les vétérans représentent une réalité à prendre en compte, et ce indépendamment de l'existence ou non d'un syndrome spécifique.

Analyse de la littérature

Ce qui suit rend compte de l'analyse de la littérature scientifique publiée et référencée, soit 350 articles entre 1991 et décembre 2000.
Tous ces articles ont été lus et analysés. En outre, deux membres de notre Groupe de travail ont participé au colloque organisé en janvier 2001 à Washington par le Comité mis en place par le Ministère de la Défense américain, pendant lequel des présentations orales et des discussions ont permis d'éclairer un certain nombre de points.

Nous présenterons cette analyse de la manière suivante
1) Publications concernant les indicateurs sanitaires classiques,
2) Publications concernant des signes et symptômes divers,
3) Publications concernant le Syndrome de la guerre du Golfe
4) Publications concernant les risques supposés,

Indicateurs sanitaires classiques

Par indicateurs sanitaires classiques nous entendons :
-la mortalité
-les effets sur la descendance,
-les maladies connues
-les hospitalisations

Pour ces indicateurs classiques, les publications s'appuient sur deux caractéristiques qui fiables :
- d'une part, la plupart des études reposent sur des registres exhaustifs (mortalité, motifs d'hospitalisations) ce qui exclut les biais de sélection qui peuvent entâcher les études par sondage,
- d'autre part, les variables obser\'ées (maladies connues, mortalité, hospitalisations) sont objectives, clairement définies et facilement dénombrables.

III.1.1. Publications concernant la mortalité

Deux importantes études (quasi exhaustives) ont été publiées sur la mortalité- .
L'une a porté sur les soldats américains et a été publiée dans le New England Journal of Medicine en 1996. (Kang, 1996)
.L'autre a porté sur des soldats anglais et a été publiée dans le Lancet, en 2000. (Macfarlane, 2000)

Ces deux études, bien conduites, avec des groupes témoins stratifiés (militaires n'ayant pas participé à la guerre du Golfe, de même âge, rang, sexe. , .) portaient sur toute la population concernée (695 516 soldats pour l'étude américaine et 53412 pour l'étude anglaise). Il apparaît très clairement dans ces deux études qu'il n'y a aucun excès de mortalitéchez les militaires exposés à la guerre du Golfe par rapport à des militaires non exposés à la guerre du Golfe,saufen ce qui concerne la mortalité par accident(essentiellement accidents de la route) où l'on retrouve un léger excédent chez les militaires de la guerre du Golfe dans les deux études. Cette légère surmortalité par accident dont témoigne l' analyse statistique (la différence est significative) est partiellement expliquée par un excès de conduites à risque rencontré dans les suites d'opérations militaires et ne témoignent, selon les auteurs,d'aucune spécificité pour la guerre du Golfe, De plus une enquête américaine, publiée en octobre 2000 dans Military Medicine étudiant les caractéristiques associées au déploiement dans le Golfe souligne le fait que les militaires déployés avaient des comportements, antérieurs à la guerre du Golfe, plus à risque que les militaires non déployés (Bell, 2000).

III.1.2. Publications concernant l'effet sur la descendance

Aucun effet délétère sur la descendance(diminution de la natalité, morbidité ou mortalité néonatale et infantile) n'a été publié.
Trois études américaines ont porté sur les conséquences de la guerre du Golfe sur la descendance. Une première étude a porté sur les naissances chez les vétérans du Golfe du Mississipi et dans la population générale (Penman, 1996). Une seconde a étudié toutes les naissances de 135 hôpitaux militaires de 1991 à 1993 chez les vétérans du Golfe et chez les témoins militaires (Cowan, 1997). Enfin, la troisième étude a porté sur l' ensemble des enfants du personnel militaire d 'Hawaï nés entre le 1 er janvier 1989 et le 31 décembre 1993 en comparant à la fois les naissances de personnel stationné ou non dans le Golfe et les conceptions et naissances avant et après la guerre (Araneta, 2000). Cette étude a porté sur 48 anomalies congénitales.
Ces études ont montré des fréquences de prématurité, de faible poids de naissance ou d'anomalies congénitales identiques chez les enfants de vétérans de la guelTe du Golfe et chez les sujets témoins.
Aucune différence dans la fécondité n ' a été publiée.

III.1.3. Publications concernant des maladies connues

De nombreux travaux ont porté sur des pathologies connues, à la recherche d'une fréquence en excès chez des vétérans de la guerre du Golfe. Ces travaux ont été soit le résultat d'études directement orientées sur une pathologie, soit issus de l'analyse des hospitalisations et causes de décès.
Rien d'anormal n'apparaît sauf peut-être un travail sur les cancers du testicule. Un travail publié en 1998 dans Epidemiology a montré, chez les militaires du Golfe, comparés à des militaires non déployés dans le Golfe, une augmentation dans la période irnrnédiatement après la guerre (fin 1991) (Knoke, 1998). Mais cet excès n'existe plus lorsque la période considérée dans l'analyse est prolongée jusqu'à fin 1995. Les auteurs suggèrent que cet excès immédiatement après la guerre est expliqué par un biais de sélection.

A l'exception de cet élément, aucune pathologie « référencée » n'apparaît comme plus fréquente chez les militaires exposés à la guerre du Golfe.

III.1.4. Publications concernant les hospitalisations

Trois publications importantes issues de la même équipe (Naval Health Research Center, San Diego, Californie) traitent de ce sujet (Gray, 1996; Knoke, 1998; Gray, 2000).

Ces trois publications estiment les taux d'hospitalisations et déterminent les causes pour le personnel déployé dans le Golfe (552 III personnes incluses), comparativement à un groupe témoin de militaires non déployés (I 479 751 personnes incluses).Elles montrent une très légère augmentation de causes d'hospitalisations désignées par « signes, symptômes non spécifiques »ce que les auteurs expliquent par le fait que les militaires déployés ont été systématiquement conviés à une hospitalisation pour bilan.

Il faut noter que ces études, qui portent sur un très grand échantillon, confinnent les infonnations du paragraphe précédent (maladies référencées) puisqu'aucune différence dans ces hospitalisations n'est relevée pour ce type de causes (maladies infectieuses et parasitaires, tumeurs, maladies des systèmes nerveux, respiratoire ou circulatoire, de l'appareil digestif, etc).

Signes et symptômes divers

Le plus grand nombre d'études a été réalisé auprès d'échantillons de militaires ayant participé à la guerre du Golfe avec comme mode de recueil de l'information un questionnaire par voié postale ou téléphonique.
Il s'agit essentiellement de militaires américains et anglais, mais aussi (plus modérément) canadiens, australiens et danois.

Toutes ces études, inspirées par la problématique d'un éventuel syndrome de la guerre du Golfe et presque toutes financées, très largement, par le Ministère de la Défense Américain, ont été confrontées à certaines difficultés méthodologiques déjà é\.oquées dans le préambule de notre rapport. En particulier les échantillons étudiés ne sont généralement pas représentatifs et bien souvent les études ne comportent pas de groupe témoin. A ces difficultés s'ajoutent des imprécisions quant à la mesure de l'information dues à la quasi-impossibilité de recueillir valablement par auto-questionnaire des signes fonctionnels, à l'influence des questions sur les réponses, à la différence entre les plaintes ressenties et les plaintes exprimées, ou celle entre les plaintes exprimées et les signes cliniques obser\.és, etc.
On peut facilement se douter de toutes les difficultés de ces études et biais des résultats qui ont d'ailleurs été en soi une source de recherche et de publications.

Néanmoins, il est difficile d'imaginer d'autres voies d'étude pour réaliser ce bilan et c'est avec beaucoup de précautions que le Groupe de travail a examiné les très nombreuses publications en ce domaine. En particulier, nous n'avons ici retenu que les études les plus récentes, donc avec le plus grand recul, comparant les militaires de la guerre du Golfe à un échantillon témoin de militaires n'ayant pas fait la guelTe du Golfe ou, pour une étude, de militaires impliqués dans la guerre de Bosnie Herzegovine.

Trois études majeures ont été menées aux Etats-Unis et une en Grande-Bretagne.
La première a été réalisée en 1995 par les Centers for Disease Control (CDC) et a inclu des soldats de 4 unités de l'année de l'air de Pennsylvanie (1 164 vétérans de la guerre du Golfe et 2 763 témoins) (Kizer, 1995). Les auteurs ont décrit la pré\.alence de 13 maladies ou symptômes pré-définis évoluant depuis plus de 6 mois.
La seconde étude a également été réalisée en 1995 par le Iowa Persian Gulf Stud)' Group et a inclu un échantillon de soldats domiciliés en Iowa et en activité durant la période de la guerre du Golfe (1 896 vétérans de la guerre du Golfe et I 799 témoins) (Schwartz, 199ï). Cette étude a porté sur 78 symptômes récurrents associés à 59 symptômes ou maladies survenus après la guerre du Golfe.
La dernière étude américaine a été menée entre 1994 et 1995 par l'équipe de Gray, incluant des soldats appartenant à 14 unités navales ayant servi de 1990 à 1994 (527 vétérans du Golfe et 970 témoins)(Gray, 1999). Les auteurs ont utilisé les 58 symptômes de la Hopkins Symptom Checklist.
L'étude britannique de l'équipe d'Unwin, réalisée en 1997, a comparé un échantillon de 3284 vétérans de la guerre du Golfe avec deux types de témoins: un échantillon de 1 815 vétérans ayant servi spécifiquement en Bosnie Herzegovine et un échantillon de 2 408 militaires témoins (Unwin, 1999). Cette étude a porté sur plus d'une cinquantaine de symptômes et maladies.

De ces travaux il ressort le constat suivant :

Toutes les études concluent que les soldats ayant participé à la guerre du golfe ont présenté des signes et symptômes très divers, de nature essentiellemnt fonctionnelle, avec une fréquence notablement (et statistiquement significative) plus grande que celle des témoins.


Ces signes très divers (plus d'une cinquantaine de signes sont notés) sont souvent relatifs à une fatigue chronique, une symptomatologie dépressive et à ce qu'il est parfois convenu d'appeler les symptômes de « stress post-traumatique ».
Cependant, les divers auteurs ont étudié les principaux symptômes des différents appareils, allant de la douleur thoracique aux troubles visuels en passant par les différents troubles cognitifs ou psychologiques. Dans la plupart des cas, les vétérans de la guerre du Golfe présentaient une fréquence de signes plus élevée que les sujets témoins.
Ces nombreux signes et symptômes ont été regroupés par différents auteurs selon des catégories variées.
Dans le cadre des CDC, Fukuda a proposé une approche clinique, en retenant la présence de fatigue, de troubles mnésiques ou de concentration, des troubles de 1 'humeur, des troubles du sommeil, des arthralgies ou des raideurs articulaires (Fukuda, 1998). Dans un second temps, ce même auteur a proposé un regroupement différent, en ne retenant que :
fatigue,
troubles cognitifs, troubles de mémoire ou de concentration et troubles de l'humeur (vécu dépressif, anxiété, insomnie),
troubles musculosquelettiques (arthralgies, myalgies et raideurs articulaires).

Une autre définition, élaborée par le Département de la Défense Américain, a été utilisée par Haley (Haley, 1997). Pour cette définition, un vétéran devait avoir été sur le théâtre des opérations entre le 8 août 1990 et le 31 juillet 1991, présenter un s)mptôme ne répondant pas à une maladie connue et présenter au moins 5 des 8 signes ou symptômes suivants :
fatigue, arthralgies, maux de tête, diarrhée intermittente non sanglante, plaintes neuropsychiques à type de perte de mémoire, difficulté de concentration, dépression ou irritabilité, troubles du sommeil, fébricule, amaigrissement.

Syndrome de la guerre du Golfe

Existe-t-il un syndrome de la guerre du Golfe ?

Il existe à l'évidence une augmentation nette et significative de « plaintes » chez les militaires ayant participé à la guerre du Golfe, mais il semble que ces plaintes soient très diverses, que leurs causes ne soient pas toujours precisees, et en tout cas certamement pas uniques.
Ainsi, les auteurs s'accordent généralement pour reconnaître que n'apparaît pas clairement la notion d'un syndrome évident.
Peut-être existe-t-il une spécificité dans la « combinaison » des signes présentés par les vétérans qui serait la possible expression d'un syndrome.
La recherche d'une telle spécificité combinatoire doit reposer sur des méthodes statistiques multivariées de type « analyse factorielle » qui sont des méthodes classiques bien qu'assez sophistiquées.

L'analyse factorielle est une technique appropriée pour chercher un nombre minimum de « facteurs » pouvant représenter une part importante de l'information contenue dans un ensemble de données mesurées de manière quantitative ou binaire. Il s'agit de réduire un nombre important d'informations à quelques grandes dimensions. Les informations recueillies pour un individu sont résumées en un nombre limité de « facteurs » construits comme combinaisons linéaires des variables initiales et traduisant leurs associations. On utilise le terme de variables latentes pour parler de ces facteurs, qui existent au plan conceptuel seul et qui ne sont pas mesurées directement.

Cinq équipes ont tenté de répondre à la question en utilisant de telles méthodes statistiques sur les symptômes recueillis par autoquestionnaires. Les cinq travaux cités ici sont considérés Outre-Atlantique comme des références importantes.

Haley a recherché les regroupements de symptômes uniquement chez un groupe de 249 vétérans américains (Haley, 1997). Les 4 autres articles comparent les regroupements obtenus par une analyse factorielle à partir d'un échantillon de militaires déployés sur le Golfe à ceux obtenus sur un groupe de militaires non déployés (Fukuda, 1998 ; Ismaïl, 1999 ; Doebbeling,2000 ; Knoke, 2000). Ces différents auteurs utilisent le même outil statistique pour répondre à la question et prennent des critères identiques de construction du modèle.

III.3.1. Résultats de l'enquête de Haley

Haleyauthentifie à partir du recueil effectué chez 249 militaires issus d'un même bataillon six syndromes distincts; les trois premiers sont dits majeurs, les trois suivants mineurs.
S1: « Troubles Cognitifs » (distraction, dépression. insomnie, fatigue, bredouillement: migraine). Ce syndrome correspond à près de 5 % des vétérans interrogés.
S2 : « Confusion -Ataxie » (troubles du raisonnement, de la pensée, de la lecture, confusion). Ce syndrome correspond à plus de 8 % des vétérans interrogés.
S3: « Signes Articulaires -Musculaires -Neurologiques périphériques » (douleurs fatigue, ...). Ce syndrome correspond à plus de 8 % des vétérans interrogés.
S4 : « Phobie -Apraxie » (nausées, sensations bizarres, ...). Ce syndrome correspond à près de 5 % des vétérans interrogés
S5 : « Fièvre. Adénopathie ». Ce syndrome correspond à plus de 6 % des vétérans interrogés
S6 : « Faiblesse -Incontinence ». Ce syndrome correspond à moins de 4 % des vétérans interrogés.

Au total, autour de 25 % des 249 vétérans interrogés présentent un de ces facteurs.
L'auteur conclut à l'existence de 6 syndromes et suggère que chacun est associé à des expositions différentes mais tous dans un cadre essentiellement neuro-toxique.

III.3.2. Résultats de l'enquête de Fukuda

Fukuda étudie 3723 militaires (1 163 militaires déployés lors de la guerre du Golfe et 2560 non présents) issus de quatre unités de l'armée de l'air .Deux facteurs sont obtenus par une analyse factorielle exploratoire :
1) fatigue; troubles de l'humeur; troubles cognitifs
2) problèmes musculo-squelettiques.

A partir de ces facteurs, l' auteur calcule des scores partiels et un score total ( sornrne des scores partiels), chaque sujet ayant un score dans le quart supérieur des valeurs est considéré comme un cas. A partir de cette définition de cas, l'auteur peut classer l'ensemble des individus de l' échantillon en « cas » ou « non cas » et ainsi comparer la fréquence des « cas » entre les militaires déployés dans le Golfe et les non déployés. Il trouve que 45 % des militaires déployés dans le Golfe sont des « cas » et 15 % des militaires non déployés. L'existence de 15 % de « cas » chez des militaires non déployés fait que l'auteur conclut à l'inexistence d'un syndrome spécifique de la guerre du Golfe, ce d'autant qu'il n'est pas retrouvé chez les militaires déployés de relation entre la fréquence des « cas » et les caractéristiques du déploiement (durée et saison du déploiement, occupation militaire, participation directe au combat, lieu du déploiement). Néanmoins il con\'ient de relever l'importance de l'écart entre la fréquence des « cas » (45 % !) chez les militaires déployés et celle (15 %) chez les militaires non déployés.

III.3.3. Résultats de l'enquête de Ismail

Ismail compare trois groupes de soldats britanniques: un groupe de militaires ayant participé à la guerre du Golfe (3 225 personnes), d'autres ayant participé à la guerre de Bosnie Herzegovine (I 770 personnes) et un groupe de militaires témoins n'ayant pas été déployés (2384 personnes).

L'analyse met en évidence trois facteurs :
1) troubles cognitifs,
2) troubles de la sphère respiratoire,
3) troubles du système nerveux périphérique

Bien que les fréquences des plaintes rapportées par les militaires déployés sur le Golfe soient très nettement plus élevées que dans les deux autres groupes, l'analyse factorielle montre que les trois facteurs qui sous-tendraient (structureraient !) ces plaintes se retrouvent de la même manière dans les trois groupes étudiés.
L'auteur ne conclut pas à l'existence d'un syndrome spécifique à la guerre du Golfe. En outre, l'auteur ne parvient pas sur ses données à reproduire le modèle de Haley (111.3.1.)

Ill.3.4. Résultats de l'enquête de Knoke

Knoke réalise une étude à partir des soldats issus de 14 unités na\'ales ayant ser\'i de 1990 à 1994 (524 vétérans du Golfe et 935 témoins). Cinq facteurs sont obtenus à partir des analyses factorielles :
1) insécurité et dépression mmeure
2) somatisation,
3) dépression,
4) troubles de type obsessionnel,
5) malaise.
L'auteur a effectué des analyses factorielles séparément sur le groupe de vétérans ayant participé à la guerre du Golfe, le groupe de témoins puis sur la totalité de l'échantillon. Les facteurs sont approximativement les mêmes,ce qui le conduit à conclure à l'inexistence d'un syndrome spécifique à la guerre du Golfe.

III.3.5. Résultats de l'enquête de Doebbeling

Doebbeling réalise un travail au sein de la Garde Nationale de l'Iowa et retrouve trois facteurs :
1) désordre somatique (raideur des articulations, myalgie, polyarthragie, engourdissement ou paresthésies, maux de tête et nausée),
2) désordre psychologique (sentiment de nervosité, tracasserie, sentiment d'isolement, dépression),
3) panique.
L'analyse factorielle a été effectuée dans le groupe déployé et non déployé, les facteurs obtenus sont très comparables.
Doebbeling conclut à l'inexistence d'un syndrome spécifique de la guerre du Golfe.

III.3.6. Discussion

L'étude des publications concernant directement la question de l'existence du syndrome de la guerre du Golfe mérite bien sûr une attention particulière.
Ce qui apparaît en premier est qu 'il existe un excès significatif de plaintes chez les militaires déployés pendant la guerre du Golfe par rapport à des témoins militaires non déployés ou déployés en Bosnie Herzegovine.
Cela est très nettement mis en évidence par les quatre auteurs qui ont utilisé un groupe témoin.
En ce qui concerne le syndrome proprement dit, les cinq auteurs utilisent des méthodes statistiques voisines et concluent que les signes dont se plaignent les militaires se structurent selon des facteurs. Ces facteurs, en nombre différent selon les auteurs (2 pour Fukuda, 3 pour Ismail et Doebbeling, 5 pour Knoke et 6 pour Haley) ont de fortes intersections et l'on retrouve quasi unanimement deux facteurs communs :
un facteur de nature psychologique (dépression, sentiment d'insécurité, nervosité, troubles du sommeil, angoisse, etc.),
un facteur de nature somatique touchant essentiellement les articulations et les muscles.
Un seul auteur (Haley) conclut à l'existence de syndromes de la guerre du Golfe de nature essentiellement neuro-toxique.
Les quatre autres auteurs concluent à l'inexistence d'un syndrome spécifique à la guerre du Golfe en s'appu)'ant essentiellement sur le fait que la structure factorielle qu'ils mettent en évidence se retrouve aussi bien chez les militaires déployés que chez les militaires non déployés ou déployés en Bosnie Herzegovine.

Il faut néanmoins noter que toutes ces études ont des limites. D'abord elles s'appuient toutes sur une définition statistique de la notion de syndrome qui repose sur l'idée que la structuration corrélative des signes traduit une notion syndromique. Cela est discutable et, s'il est vrai que ces méthodes d'analyse factorielle ont pu parfois être très instructives pour rechercher des liaisons entre signes ( dans le champ de la psychologie en particulier), il faut rester prudent dans leur interprétation.

Par ailleurs
Haley n'utilise dans son étude que des militaires encore en activité et dans les unités de l'armée de l'air
Ismaïl a utilisé un modèle à trois factuers qui n'explique que 20% de la variance des données
Knoke comme Fukuda n'inclut dans son étude que des militaires encore en activité.
Doebbeling utilise un échantillon de militaires de l'Iowa qui ont certaines spécificités, en particulier un taux plus faible de soldats de race caucasienne.

Publications concernant les risques incriminés

Les recherches et publications concernant les causes possibles d'un éventuel syndrome du Golfe sont extrêmement nombreuses et variées. Elles associent des études de nature fondamentale et des analyses épidémiologiques.

Ces dernières, qui pourraient être d'un grand apport, sont malheureusement soumises à de grandes difficultés et entâchées de nombreux biais. En effet, comme nous l'avons déjà évoqué (voir préambule) la recherche rétrospective des expositions est très difficile surtout lorsqu'il s'agit de les distinguer entre les combattants (ce qui est nécessaire pour démontrer une relation de causalité entre une exposition chez des plaignants comparativement à une moindre exposition chez des non plaignants).

III.4.1. Uranium appauvri

A côté de travaux de laboratoire (techniques d'analyse, implantation de fragments d'uranium dans le tissu musculaire chez le rat) deux articles ont retenu notre attention.

 

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Une étude de McDiarmid, portant sur 67 vétérans de la guerre du Golfe, a montré une corrélation entre l'excrétion d'uranium dans les urines des vétérans criblés de fragments d'uranium et la diminution de leurs performances dans des tests psycho-métrique (McDiam1id, 2000). L'étiologie de ces effets n'est pas claire, peut-être en relation avec une toxicité des métaux lourds (plomb -mercure) au niveau du système nerveux central.

Un travail, publié par Durakovic, dont on parle beaucoup actuellement en raison de son application aux opérations des Balkans, qui est une revue sur les conséquences de l'uranium, la guerre du Golfe étant indirectement évoquée (Durakovic, 1999). Les travaux de cet auteur sont controversés par la communauté scientifique mais un certain nombre de ses affirmations sont considérées comme exactes (le stress augmente l'absorption et la toxicité de l'uranium; une proportion non négligeable, de l'ordre de 50 %, des poussières produites lors de l'impact d'un obus sont respirables ; l'uranium inhalé chroniquement peut provoquer expérimentalement des cancers du poumon chez des animaux).
Néanmoins, aucun élément de cette publication ne se rapporte directement à des conséquences constatées chez des vétérans de la guerre du Golfe.

Au total, rien ne permet de considérer l'uranium appauvri comme responsable d'un présumé syndrome de la guerre du Golfe.

III.4.2. Toxiques atmosphériques

On a évoqué les fumées des puits de pétrole en feu mais il apparaît peu vraisemblable qu'elles puissent être la cause des signes présentés.

En effet, les substances toxiques semblent généralement être en dessous des doses limites acceptées et le niveau mesuré des marqueurs d'hydrocarbures polyclycliques aromatiques est faible, comme le montre un article de Poirier (Poirier, 1999).

IlI 4.3. Pyridostigmine

Cet inhibiteur de l'acétyl-cholinesterase dont on a beaucoup parlé (tant en France qu'aux Etats-Unis) a une toxicité aiguë en surdosage connue mais aucun signe grave d'une telle toxicité à court tenue n'a, semble-t-il, été observé (Sharabi, 1991 ; Keeler, 1991 ). En ce qui concerne les effets à moyen ou long terme, il n 'y a aucun élément publié qui puisse étayer cette hypothèse.

Au contraire, certains travaux semblent l'écarter. Ainsi un travail portant sur des troupes canadiennes impliquées dans le conflit ne montre aucune différence selon que les militaires aient ou non reçus de la pyridostigmine (Canadian Department ofNational Defense, 1998). On peut aussi citer une étude concernant les soldats danois qui présentent des signes et symptômes proches de ceux présentés par les vétérans américains alors que ces soldats danois ont été envoyés en temps de paix et n'ont pas reçu de prophylaxie par la pyridostigmine (Ishoy, 1999).

Néanmoins, trois études doivent être notées :
L'une suggère que le bromure de pyridostigmine qui nonnalement ne pénètre pas la barrière sanguine cérébrale, peut le faire dans des conditions de stress chez la souris (Friedman, 1996).
Les deux autres montrent les possibles interactions de la pyridostigmine avec d'autres facteurs tels que la pennethrine (insecticide) et le DEET (insectifuge) chez les poulets et les rats (Abou-Donia, 1996 ; Hoy, 2000).

L'hypothèse d'une relation ne peut être totalement exclue.
Néanmoins, l'expérience cumulée sur les effets retardés de la pyridostigmine en utilisation civile, en particulier dans la fatigue post-poliomyélite, va à l' encontre de cette hypothèse (Trojan, 1995).

III.4.4. Pesticides

Le rôle des pesticides, en particulier des organophosphorés, a été très discuté. S'il existe un consensus sur leurs effets toxiques aigus il reste une incertitude et des controverses sur les possibles effets, à long terme, des expositions prolongées à faibles dosessurtout lorsque d'autres facteurs (stress, chaleur, etc.) sont associés (Kurt 1998).
Il faut noter dans ce domaine un article qui confirme la possibilité de passage cutané d'insecticides (les uniformes des soldats américains étaient imprégnés de permethrine) (Wester 1996).

III.4.5. Autres risques chimiques

Un risque lié à l'agent neurotoxique Sarin a été évoqué aux Etats-Unis (en particulier suite à la destruction des armes iraquiennes à Khamisiayah).
Rien de très évident n'a été montré dans une étude exposés-non exposés publiée dans l' American Jounal of Epidemiology (Gray, 1999).
Notons aussi qu'un tra\'ail a porté sur la possible imprégnation des substances chimiques (gaz de combat) du sable saoudien qui secondairement pourrait induire des manifestations irritatives pulmonaires ( « maladie d'Al Eskan » ) et des manifestations dysimmunitaires (Korenyi-Both, 1997).
Pour intéressante que soit cette hypothèse, elle n' est le fruit que d'une seule équipe et ne peut aucunement être la seule explication des plaintes présentées par les vétérans.

III.4.6. Vaccinations

L'un des facteurs de risque les plus fréquemment évoqués Outre-Atlantique est le programme de vaccination mis en place pour protéger les forces armées contre la menace d'armes biologiques.

En effet, à côté des vaccinations usuelles, le programme américain intégrait des vaccinations contre le botulisme et le charbon, tandis que le programme anglais avait choisi de protéger ses troupes contre la peste et le charbon avec comme adjuvant un vaccin contre la coqueluche. Une importante étude a montré une relation entre les vaccinations multiples et rapprochées et un certain nombre des signes retrouvés chez les anciens militaires (Hotopf, 2000). Cette relation est d'autant plus forte que ces vaccinations sont réalisées pendant le déploiement et les auteurs considèrent que ces effets secondaires sont induits ou augmentés par une association au stress. L'association aux organophosphorés a aussi été évoquée. Ce travail rejoint une hypothèse émise trois années plus tôt par Rook et Zumla selon laquelle les vaccinations multiples pourraient induire des effets néfastes pour la santé par le biais d'une réponse des cytokines de type Th 2 (Rook et Zumla, 1997).

Néanmoins, des critiques ont été apportées au travail de Hotopf car les possibles facteurs de confusion sont nombreux, des biais de mémorisation sont possibles, moins de 30 % des militaires interrogés ont répondu et ce travail ne porte que sur des militaires en possession de leur dossier vaccinal. Il faut donc rester prudent sur ce sujet.

A ces résultats il faut ajouter une hypothèse intéressante émise par un chercheur français (Gherardi -rapport d'étude en cours de publication) concernant le rôle possible de l'alumine, adjuvant des vaccins.

III.4.7. Stress

Il y a bien sûr dans tout acte de guerre des pathologies qui peuvent être induites par le stress. Cela n' est pas propre à la guerre du Golfe mais on peut accepter l'idée que cette guerre pouvait apporter en ce domaine un certain nombre de spécificités (rôle des media, crainte des annes chimiques, conditions climatiques, éloignement, etc). C'est pourquoi le stress a pu être , évoqué comme une cause d'un possible syndrome du Golfe.

Parmi les très nombreuses publications sur ce sujet aucune n'est réellement concluante sur le rôle spécifique du stress. On comprend d'ailleurs aisément la difficulté de mesurer rétrospectivement l'importance d'un stress pour l'associer à des plaintes émises des années plus tard.

Les seuls travaux intéressants associent le stress à d'autres facteurs (pyridostigmine chez l'animal, multivaccinations) et ont été évoqués plus haut.

III.4.8. Autres risques

Rien de concluant n'a été publié concernant le rôle d'autres facteurs tels que des facteurs infectieux ou climatiques.

III.4.9. Conclusion

En résumé, en ce qui concerne les risques incriminés
Les vaccinations multiples sont considérées aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne comme un facteur crédible d'un certain nombre de signes ou de symptômes dont se plaignent les militaires de la guerre du Golfe.
L'hypothèse d'une relation avec la pyridostigmine ne peut être totalement exclue.
Enfin, il existe une incertitude sur les possibles effets à long terme des expositions prolongées à de faibles doses de pesticides organophosphorés.
A part cela, aucune publication ne met sérieusement en évidence un rôle possible de l'uranium appauvri, des fumées de puits de pétrole en feu ou d'autres risques chimiques.

Analyse des dossiers de demande de pension

L'analyse ci-jointe concerne ces fiches. Trois d'entre elles ont été retirées de l'analyse car leurs dates de présence sur le site du Golfe ont été considérées en dehors de la période d'intérêt (séjours effectués durant les années 1988 ou 1989). L'analyse a donc portée sur 197 fiches. Par ailleurs le nombre de données diffère selon les questions car de nombreuses informations sont incomplètes.

IV .1. Description des demandeurs de pension

Parmi les 194 militaires pour lesquels on connaît l'année de naissance l'âge moyen en 1991, donc lors de leur séjour dans le Golfe, est égal à 28,8 ans avec un écart-type de 7,8 ans. L'âge minimum est de 16 ans et le maximum de 55 ans. Quarante et un pour cent de ces militaires avaient entre 25 et 35 ans

Parmi les 157 sujets dont on connaît la situation militaire actuelle, la moitié est encore en activité. Pour l'autre moitié la durée moyenne d'activité militaire est de 12,7 ans avec un écart type de 9,4. Quarante cinq pour cent d'entre eux sont restés moins de dix ans dans l'armée. La grande majorité (89 %) des demandes de pensions est effectuée par des militaires appartenant ou ayant appartenu à l'armée de terre , cette infonnation n'est connue que pour 178 des militaires, demandant ou ayant demandé une pension.

La durée de séjour dans le Golfe n'est transmjse que pour 91 demandes, en moyenne elle est de 3,5 mois (écart-type = 1,8) variant entre 12 jours et 7 mois et demi.

IV .2. Description des demandes de pension

Parmi les 197 demandes de pension étudiées, les dates de dépôt sont connues pour 194 d'entre elles. La répartition de ces demandes est représentée sur le graphique I. Quarante huit pour cent des demandes ont été effectués durant la période de la guerre (années 1990 et 1991). Trente quatre demandes ont été renouvelées, pour des raisons de nouvelle affection ou d'aggravation ressentie.

Les affections ont été précisées pour 191 demandes et codées en fonction de la CIM lOème (lOème révision de la Classification Internationale des maladies). En tout, 168 affections différentes ont été citées. Quatre vingt treize affections sont de type traumatologique, 38 neurologiques, 30 des affections auditives, 7 sont des cancers et 45 ont été classés dans un autre groupe .

IV .3. Description du suivi des demandes de pensions

Parmi les 191 dossiers pour lesquels on connaît l'avancée de la prise en charge du dossier: 69 ont été rejetés, 97 ont débouché sur une pension définitive, 26 sont en attente, 3 sujets ont obtenu une pension temporaire et n'ont pas renouvelé leur demande pour une pension définitive et 1 était déjà pensionné.
Parmi les 93 demandes associées à des affections traumatiques, 67 % ont obtenu une pension. D'autre part 21% (8 demandes sur 38) des demandes associées à des troubles neuropsychologiques ont obtenu une pension.
Cent soixante et une demandes ont impliqué des expertises médicales, 100 ont fait l'objet d'une demande d'avis de la Commission Consultative Médicale.
Parmi les 168 demandes a)'ant abouti, il y a à ce jour 22 contentieux, dont 2 pour taux de pension jugés non satisfaisant, et 20 pour rejet. A ce jour, 7 demandes ont été déboutées, 3 acceptées et 9 sont en attente, l'information n'est pas connue pour les autres dossiers.

IV .4. Devenir des demandeurs

Six décès ont été répertoriés parmi les 197 demandeurs de pension. Les affections déclarées pour ces 6 demandes étaient les suivantes: schwannome malin de la cuisse droite avec métastases pulmonaires, hépatite chronique, carcinome gastrique, lobectomie temporale droite, glioblastome frontal et lymphome non hodgkinien. Les 6 demandes de pension avaient été rejetées. Trois d'entre elles ont entraîné un contentieux, 2 ont été déboutées au tribunal des pensions.

IV .5. Synthèse des résultats

La littérature scientifique internationale constitue la seule force d'information disponible sur l'état de santé des anciens combattants de la guerre du Golfe. Elle ne fait état ni de mortalité anormale, ni d'excés de maladies connues. Comparés à d'autres vétérans, il existe cependant dans cette population une fréquence plus élevée de signes et plaintes fonctionnels, sans que l'on puisse vraisemblablement parler d'un syndrome spécifique à la guerre du Golfe. Les données sanitaires relatives aux anciens combattants français ne sont pas exploitables en l'état. Elles ne permettent donc ni de confirmer, ni d'infirmer, les conclusions tirées de la littérature internationale

Recommandations

Il nous a été demandé, dans le cadre de notre mission, de proposer les études qui devraient être réalisées en France.
Les options étaient nombreuses et il est toujours facile et parfois attrayant pour des experts de proposer des kyrielles d'études et de recherches lorsque pèsent des incertitudes sur le domaine de leur investigation.
Nous n'avons pas souhaité nous prêter à une telle habitude et avons limité nos recommandations pour en renforcer la crédibilité et insister sur leur caractère prioritaire. En outre, nous avons souhaité nous appuyer sur l'expérience étrangère, qu'il n'est pas nécessaire de totalement dupliquer .

Il n'est cependant pas scientifiquement possible d'extrapoler les résultats obtenus auprès des militaires américains ou britanniques aux combattants français, dans la mesure, en particulier, où les conditions dans lesquelles les militaires français étaient engagés dans la guerre du Golfe avaient probablement un certain nombre de spécificités. Aussi, pour apporter des réponses fiables et transparentes aux questions soulevées par le débat public, et à l'inquiétude des militaires déployés dans le Golfe, nous proposons avec une certaine fenneté quelques projets que nous avons classé en :
études épidémiologiques,
autres recherches,
surveillance à moyen et long tenne.

V.1. Etudes épidémiologiques

V.1.1. Enquête exhaustive

Il nous paraît indispensable de mener une étude exhaustive par auto questionnaire sur l'ensemble des vétérans qui ont participé à la guerre du Golfe, c'est-à-dire près de 25 000 personnes.

Les objectifsde cette enquête sont les suivants
- dresser un bilan objectif des plaintes et des maux ressentis, pour tous les vétérans répondant à un autoquestionnaire,
- mesurer les troubles objectifs (cliniques et paracliniques) présentés par les vétérans qui consulteront,
- proposer un éventuel suivi dans le temps de tout ou partie des vétérans,
- préparer une possible enquête chez certains militaires déployés dans le Golfe en comparant ceux qui présentent des signes ou symptômes et ceux qui n ' en présentent pas, à la recherche d' éventuelles différences dans les comportements ou les expositions,
- rassurer les vétérans en mettant en place, pour l' ensemble des personnels déployés dans le Golfe, une offre de soins en consultations hospitalières spécialisées, civiles ou militaires,
- rassurer la population sur le désir de transparence des autorités

Une telle étude devrait obéir à un certain nombre de règles
protection de la confidentialité des données
caractère indépendant indiscutable de l'équipe chargée de la réaliser,
examens cliniques et paracliniques pris en charge par les pouvoirs publics et non bie sûr à la charge des militaires.

L'organisation de l'étudedevrait être la suivante
courrier à tous les personnels déployés avec autoquestionnaire standardisé et proposition d'un bilan médical dans un centre militaire ou civil de leur choix,
protocole standardisé pour les examens cliniques et paracliniques réalisés en consultations hospitalières spécialisées civiles ou militaires.

V.1.2. Etude des causes de décès

Il est indispensable de réaliser une analyse de la mortalité des militaires déployés dans le Golfe. Elle permettra d'estimer la mortalité globale et la mortalité pour différentes causes de décès (notamment cancers et accidents). Les taux de mortalité pourraient être comparés à ceux de la population générale, et éventuellement à ceux d'autres populations militaires déployés dans d'autres régions, ou non déployés.

V.2. Autres recherches

Un certain nombre de sujets de recherche, plus fondamentale, sont apparus et méritent à nos yeux un effort particulier; il s'agit des thèmes suivants :

V.2.1 Vaccinations

Dans le domaine civil, comme dans le domaine militaire, un certain nombre de questions sont aujourd 'hui posées dans le domaine vaccinai et particulièrement lorsque les vaccinations sont multiples. Nous avons vu d'ailleurs que dans l'esprit de certains auteurs ces vaccinations multiples pendant le déploiement et en présence de cofacteurs (stress, pesticides organosphosphorés, etc) étaient responsables d'un certain nombre de signes ou symptômes. Il nous semble nécessaire de soutenir des recherches en ce domaine.

En France, les travaux du Pr. Gherardi (INSERM, Créteil) ont permis d'identifier une pathologie qui reflète la persistance au site d'injection d'un composé aluminique immunostimulant présent dans de nombreux vaccins (hépatites A et B, charbon). Des études cliniques spécialisées pourraient être entreprises pour éclaircir une telle hypothèse.

V.2.2 Stress -immunité

Il est bien évident que l'étude des signes et symptômes relatifs à la guerre du Golfe soulèvent la question déjà classique de la relation stress .-immunité sur laquelle travaillent déjà un certain nombre d'équipes.

V .3. Surveillance

Les questions posées au sujet de la guerre du Golfe ont révélé ou confirmé aux membres du Groupe de travail la très grande insuffisance française en matière de surveillance épidémiologique des anciens combattants.

La guerre du Golfe s'inscrit dans un cadre de conflits modernes qui font appel à des technologies nouvelles (par exemple, munitions à l'uranium appauvri) et se déroulent souvent dans des zones particulières (milieu urbain ou suburbain avec environnement industriel ou milieu désertique telle Golfe). Les participants à ces conflits (militaires mais aussi civils) se trouvent ainsi confrontés à des risques non ou mal identifiés, parfois nouveaux.

Or, les troubles de santé qui pourraient être consécutifs à ces expositions peuvent n'apparaître qu'à moyen voire à long terme chez les anciens combattants dont une proportion croissante avec le temps n'est plus militaire et n' est donc plus assujettie au système de surveillance épidémiologique en vigueur dans les armées.

Il importe donc de mettre en reU\Te un véritable système permettant la surveillance de la santé des anciens combattants (y compris au-delà de leur sef\'ice actif) et la mesure des risques sanitaires liés aux opérations.

Cela nécessite :
une identification exhaustive des risques et leur évaluation,
une grande traçabilité de ces expositions par des équipes travaillant en parfaite indépendance,
un suivi médical adapté et accessible à tous,
une réflexion permanente sur la prévention et la réparation,
une indispensable veille scientifique.

Cela requiert une volonté politique claire et affichée pour qu'un tel « observatoire » de la santé des anciens combattants puisse être mis en place, avec des moyens adaptés.

V .4. Résumé des recommandations

Le Groupe de travail recommande que soit mis en place prioritairement :
- une étude exhaustive sur l'ensemble des vétérans ayant participé à la guerre du Golfe avec une possibilité d'examen clinique et biologique offert dans un cadre civil ou militaire,

- une étude des causes de décès des anciens militaires déployés dans le Golfe

Le Groupe de travail souligne l'intérêt d'effectuer des recherches sur les effets des stimulations antigéniques répétées chez l'adulte.

Le Groupe de travail insiste particulièrement sur la nécessaire mise en place d'un Observatoire de la Santé des anciens combattants permettant un véritable suivi épidémiologique à moyen et long terme.


Remerciements

Le Groupe de travail remercie sincèrement
- Le Docteur Catherine Verret, assitante hospitalo-universitaire, pour son aide dans le travail de synthèse bibliographique,
- Madame Evelyne Mouillet, bibliothcaire, pour la recherche documentaire,
- Mesdames Marlyse Labouyrie et Jacqueline Mie pour le secrétariat

#COVID-19 : le point de situation épidémiologique sur le coronavirus SARS-CoV-2

Descripteur MESH : Anciens combattants , Guerre , Guerre du Golfe

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