VIH/SIDA : des interruptions structurées du traitement améliorent le contrôle de l'infection
Les bénéfices d'interruptions programmées des antirétroviraux ont déjà été abordés dans certaines études. Des chercheurs viennent pour la première fois d'évaluer un schéma thérapeutique de ce type au sein d'un essai randomisé conduit chez des macaques. Leurs résultats montrent clairement que des interruptions structurées constituent une alternative efficace aux traitements continus.
Cet essai a été conduit par Franco Lori, Julianna Lisziewicz et plusieurs collaborateurs américains et italiens. Leurs travaux sont publiés dans l'édition de Science du 24 novembre.
L'introduction des multithérapies dans le traitement du VIH a permis de réduire la mortalité associée au VIH de 70 à 80 %. Franco Lori et ses confrères rappellent que les trithérapies permettent de diminuer considérablement la charge virale. Cependant, cette suppression "n'est pas associée à l'apparition de réponses immunitaires spécifiques du VIH, et l'arrêt de la multithérapie est généralement suivi par une augmentation rapide des particules virales dans le sang ou rebond virologique, et par une perte de lymphocytes T CD4 +".
Les trithérapies présentent également des inconvénients en termes de toxicité, d'observance du traitement et de coût.
Ces auteurs ont étudié l'efficacité d'interruptions régulières du traitement chez le singe en espérant que ces arrêts pouvaient exposer le virus au système immunitaire assez longtemps pour induire une réponse spécifique, sans nuire au nombre de CD4.
Leur essai a été réalisé chez des macaques infectés par le SIV (simian immunodeficiency virus), l'homologue du VIH chez le singe.
Trois groupes de singes, tous infectés par le VIH, ont été étudiés : des macaques non traités, des macaques qui ont reçu 3 antirétroviraux en continu et des macaques qui ont reçu le même traitement mais avec des interruptions régulières. Dans ce dernier groupe, le schéma thérapeutique était constitué de cycles de 3 semaines de traitement suivies par 3 semaines d'arrêt.
Les traitements ont débuté après la séroconversion et ont duré 21 semaines. Les traitements étaient définitivement interrompus après cette date.
Les traitements en continu et en alternance ont conduit tous les deux à une suppression de la charge virale.
Des différences sont apparues 14 jours après l'arrêt définitif du traitement. Un rebond virologique rapide a été observé chez tous les singes qui avaient bénéficié d'un traitement continu et leur charge virale a progressé jusqu'aux valeurs observées avant l'initiation de la thérapie.
Par contre, tous les macaques traités avec des interruptions régulières du traitement arrivaient à contrôler leur charge virale. Durant les 6 mois de suivi après l'interruption définitive des antirétroviraux, la virémie a peu varié dans ce groupe. "La virémie était toujours indétectable et le taux de CD4 était inchangé chez tous les animaux", précisent les auteurs.
Les auteurs ont également observé une forte réponse des lymphocytes T CD8 + contre le virus et ce même 6 mois après l'interruption définitive du traitement.
Selon les chercheurs, le programme d'interruptions programmées "est largement responsable de l'induction d'une immunité médiée par les lymphocytes T et du contrôle du virus après l'arrêt de la thérapie".
Si ces résultats sont reproductibles chez les patients infectés par le VIH, ces interruptions programmées, initiées rapidement après la séroconversion, "pourraient aider à induire un contrôle immunitaire du VIH".
Ce schéma thérapeutique peut améliorer la tolérance au traitement et réduire son coût, en plus de son effet potentiel sur le contrôle à long terme de la réplication virale. Selon les auteurs, des essais cliniques doivent être rapidement mis en place afin de déterminer si ces protocoles d'interruptions programmées peuvent s'appliquer à une pratique clinique.
Source : Science 2000;290:1591-93
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