IPA salariés : des salaires modestes et des conditions de travail difficiles selon UNIPA
Depuis 2018, environ 1650 Infirmières et Infirmiers en Pratique Avancée (IPA) ont été diplômés en France. Si les difficultés dans le secteur libéral sont bien connues, les conditions de travail dans les établissements de soins public ou privés restaient jusqu’alors peu évaluées. UNIPA a publié les résultats d’une enquête pour le moins inquiétante en ce mois d’avril 2023.
Depuis 2018, environ 1650 Infirmières et Infirmiers en Pratique Avancée (IPA) ont été diplômés en France. Si les difficultés dans le secteur libéral sont bien connues, les conditions de travail dans les établissements de soins publics ou privés restaient jusqu'alors peu évaluées. UNIPA a publié les résultats d'une enquête mi-avril 2023.
Des conditions de travail difficiles pour les IPA salariés
L'enquête UNIPA sur l'état des lieux des IPA salariés montre que ces professionnels font face à des conditions de travail difficiles. En effet, près de la moitié d'entre eux travaillent plus de 40 heures par semaine, avec une charge de travail importante. De plus, ils sont souvent confrontés à un manque de reconnaissance et à une faible rémunération par rapport à leur niveau d'études et leur expertise.
Un gain de salaire modeste pour les IPA
L'enquête menée par l'Union nationale des IPA auprès de 331 professionnels (dont 73% dans le secteur public) met en évidence des conditions salariales décevantes pour ces soignants. Sur les 239 IPA du secteur public, 223 réponses ont été recueillies. Les résultats oscillent entre une perte de -300 euros et un gain de 600 euros, avec une moyenne de 97 euros et une médiane de 50 euros. Parmi les répondants, 10 personnes ont indiqué avoir subi une perte de salaire et 63 n'ont signalé aucune évolution salariale, représentant 28% des participants.
Cette faible augmentation salariale peut s'expliquer par plusieurs facteurs. Tout d'abord, les grilles indiciaires des IPA sont peu élevées, limitant ainsi les gains salariaux. Ensuite, les IPA travaillent majoritairement sur des horaires "classiques" et ne font plus d'horaires de nuit ou de week-end. Les augmentations salariales viennent donc à peine compenser ces pertes de revenus. En outre, certains professionnels ne bénéficient plus de primes (protocole de coopération, prime d'exercice en soin critique) lorsqu'ils deviennent IPA. D'autres facteurs, tels que la prime Ségur et des négociations avec les directions lors des prises de poste, expliquent des gains supérieurs à 200 euros pour certains répondants.
Dans le privé, les réponses varient d'une perte de 200 euros à un gain de 1400 euros, avec une moyenne de 353 euros et une médiane de 300 euros. Cette hétérogénéité s'explique principalement par l'absence de statut pour les IPA dans le secteur privé, les professionnels devant négocier leur salaire avec les directions. L'augmentation moyenne du salaire pour un IPA dans le privé est de 16,2% et de 4,1% dans le public, des chiffres bien en dessous des 40% constatés dans les autres pays de l'OCDE selon UNIPA.
Le faible gain salarial entre infirmiers et IPA dans le secteur public en France risque d'affecter l'attractivité et la pérennité du métier d'IPA. Des mesures devront être prises pour assurer un meilleur équilibre salarial et garantir la valorisation de ces professionnels de santé.
6 mois d'attente pour un poste en moyenne
L'enquête soulève également des problèmes d'organisation et de régulation, qui entravent l'accès aux postes d'IPA et l'exercice de leurs compétences. Le temps d'attente moyen pour obtenir un poste d'IPA dans le secteur public est de 7,98 mois (9 dans le privé), avec une médiane de 6 mois, reflétant des difficultés importantes. Parmi les raisons évoquées, on retrouve l'absence de budget pour la création de postes, les pénuries d'infirmiers poussant les directions à placer les IPA sur des postes d'IDE, et un manque d'organisation des structures n'ayant pas anticipé le retour des professionnels. De plus, 24% des sondés dans le secteur public (26% dans le privé) ne peuvent exercer leurs nouvelles compétences directement après l'obtention de leur diplôme, bien qu'ils aient bénéficié d'un financement de leur institution.
Un besoin urgent de régulation et de communication
UNIPA révèle qu'il existe une grande diversité d'offres hiérarchiques pour les IPA, avec environ une trentaine de personnes ayant répondu être soumises à des supérieurs hiérarchiques multiples, généralement un binôme direction des soins/cadre supérieur de santé. Cette organisation semble entraver l'étendue du champ d'action et des missions des IPA, en particulier pour ceux placés sous la hiérarchie des cadres de proximité. Les IPA sous la hiérarchie des directions des soins déclarent pouvoir investir un grand nombre de missions transversales au sein de la structure, contrairement à ceux dépendant d'un cadre de proximité. Ce constat est préoccupant, car l'IPA a un rôle essentiel dans le mentoring, l'apport des données probantes, l'analyse des pratiques et la formation.
Outre les défis organisationnels, l'étude souligne des problèmes salariaux et administratifs, ainsi qu'un sentiment d'inertie et de manque d'anticipation au sein des institutions. Les IPA rencontrent également des difficultés liées à la méconnaissance de leurs missions et des textes les régissant, créant parfois des tensions avec leur hiérarchie. Le frein majeur du protocole d'organisation est également mis en avant, surtout dans le contexte de pénurie médicale actuelle, où de nombreux intérimaires ou remplaçants travaillent dans les hôpitaux sans protocoles signés, empêchant l'IPA d'exercer. Par ailleurs, l'absence d'un modèle hiérarchique clair nuit à la lisibilité et à la clarté de la place des IPA au sein des institutions.
Face à ces difficultés, une partie des répondants envisage de quitter le secteur public.
Crédit photo : DepositPhotos
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