NSTEMI qui doit on prétraiter en 2016 ?

« En raison du doute diagnostique dans le NSTEMI, le pré-traitement par double AAP ne se discute que pour les patients à haut risque thrombotique »

La stratégie invasive réduit la mortalité et les événements ischémiques dans les NSTEMI à haut risque. Le prétraitement par anticoagulants et aspirine est largement utilisé mais l’association aux inhibiteurs de P2Y12 n’est généralement pas recommandée, excepté pour les patients instables nécessitant une coronarographie en urgence après confirmation du SCA.

Le prétraitement par prasugrel a la même efficacité que celui administré lors de la procédure mais au prix d’une augmentation des saignements majeurs. Il n’est donc pas recommandé dans cette indication. Le rapport bénéfice/risque du prétraitement par ticagrelor avant le diagnostic angiographique n’est pas connu.


Les NSTEMI – SCA sans surélévation du segment ST – sont la forme la plus fréquente de SCA. Il s’agit de patients souvent âgés avec des comorbidités associées et un pronostic à 6 mois plus péjoratif. « L’intérêt du prétraitement est de réduire les complications ischémiques (« as soon as possible », comme dans le STEMI) mais, en raison des difficultés diagnostiques, le risque est de traiter des patients qui ne sont pas des SCA. »

Une étude épidémiologique française sur la prise en charge des douleurs thoraciques non traumatiques (Epidoultho) a en effet montré que, chez 615 patients vus aux urgences et présentant une douleur thoracique non traumatique, seulement 9,8 % étaient des SCA et 7,8 % des SCA NSTEMI [8].

Les dernières Recommandations de l’ESC ont confirmé l’intérêt de la troponine ultrasensible et de la stratification du risque ischémique (score GRACE) et hémorragique (score CRUSADE) [9]. La stratégie invasive est choisie en fonction du niveau de risque : dans les 2 heures après le 1er contact médical en cas de SCA ST - à très haut risque (angor réfractaire, variations dynamiques du segment ST, arythmie menaçant le pronostic vital ou arrêt cardiaque, instabilité hémodynamique, insuffisance cardiaque), dans les 24 heures après le 1er contact médical en cas de risque élevé (augmentation ou chute de la troponine compatible avec un diagnostic d’IDM, variations dynamiques du segment ST ou de l’onde T, score GRACE > 140) et dans les 72 heures chez les patients à risque intermédiaire (diabète, insuffisance rénale avec DFGe < 60 ml/mn/1,73 m2, FEVG < 40 % ou insuffisance cardiaque, antécédents de pontage ou d’angioplastie, récidive douloureuse après infarctus, score de GRACE entre 109 et 140) [9].

Le traitement anticoagulant est systématique et arrêté dès la fin de la procédure, excepté en cas de risque hémorragique élevé ou de fort doute diagnostique, les relais sont proscrits (association à l’HNF en bolus unique si le fondaparinux est utilisé) et le traitement maintenu à l’identique en cas de traitement anticoagulant au long cours [9].

Le traitement antiplaquettaire est, quant à lui, administré en pré-hospitalier en cas de probabilité élevée de haut risque (aspirine 150 mg en i.v. ou 250 à 300 mg per os) et la double antiagrégation précoce réservée aux patients instables nécessitant une coronarographie en urgence après confirmation du SCA. L’administration pré hospitalière n’est pas recommandée pour le prasugrel et laissée au libre arbitre des cliniciens pour les autres molécules qui n’ont pas été évaluées dans cette situation [9]. L’étude ACCOAST [10], réalisée spécifiquement dans une population de 4 033 patients SCA NSTEMI avec majoration des troponines (≥ 1,5 x VLN) devant bénéficier d’une stratégie invasive, n’a en effet pas montré de bénéfice à une dose de charge de prasugrel (30 mg avant puis 30 mg après la coronarographie vs placebo puis 60 mg après la coronarographie) en terme de réduction des événements ischémiques (critère principal (à 7 jours) : décès CV, IDM, AVC et revascularisation en urgence, si nécessaire par anti GP IIb/IIIa en urgence ) : 10 vs 9,8 % en cas de prétraitement (HR=1,02 ; p=0,81). A 30 jours, les résultats du critère principal étaient strictement comparables dans les deux bras :
10,8 vs 10,8 % (HR=0,997 ; p=0,98). Le prétraitement majorait en revanche, et de façon significative, le risque de saignements majeurs (TIMI) au moment du geste de revascularisation (2,6 % vs 1,4 % soit un HR à 1,90 ; p=0,006) et à 30 jours (2,9 % vs 1,5 % soit un HR à 1,97 ; p=0,002).

« Les résultats d’ACCOAST montrent que c’est seulement après avoir réalisé l’angiographie et décidé de revasculariser qu’il faut administrer le prasugrel. » Enfin, les anti GP IIb/IIIa ne sont pas quant à eux indiqués en dehors de la salle d’angioplastie.

Références : 

[7] Montalescot G, Zeymer U, Silvain J et al. Intravenous enoxaparin or unfractionated heparin in primary percutaneous coronary intervention for ST-elevation myocardial infarction: the international randomised open-label ATOLL trial Lancet 2011 ;378(9792) :693-703
[8] Charpentier C. Should all suspect chest pain be hospitalized ? 24ème Journées
Européennes de la Société Française de Cardiologie – 15-18 Janvier 2014, PARIS Abstract
C193
[9] Roffi M, Patrono C, Collet JP et al. 2015 ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes in patients presenting without persistent ST-segment elevation Eur Heart J 2016 ;37 :267-315
[10] Montalescot G, Bolognese L, Dudek D et al. Pretreatment with prasugrel in non-ST- segment elevation acute coronary syndromes N Engl J Med 2013 ;369(11) :999-1010

D’après la communication de Didier Honnart (Dijon)

13ème édition du Congrès Thromboses et Urgences Coronaires (TUC)
(Du 23 au 25 mars 2016 – Eurosites George V, 28 avenue George V, 75008 Paris)

 

Compte-rendu du symposium, organisé avec le soutien institutionnel de Daiichi-Sankyo, le 24 Mars 2016

 

« SCA aux urgences »

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